mercredi 13 janvier 2010

Editorial : Qu’avons-nous fait, en un an ?

Cette année, qui vient de s’achever, a été plus mauvaise que l’année passée mais elle sera «plus bonne», pour paraphraser Coluche, que la prochaine. Serions-nous condamnés, comme dans la célèbre saillie de l’humoriste français, à aller de mal en pis, d’année en année? Qu’avons-nous fait, au cours de l’année écoulée, pour enraciner notre démocratie, assurer notre développement, garantir un minimum de bien-être à nos populations, soigner notre image, écornée par les attentats et les coups d’Etat, prendre pied dans le concert ders nations dites civilisées? Rien ou presque. Nous avons, certes, signé, les accords de Dakar, sous l’égide la communauté internationale, et organisé un premier tour d’élection présidentielle à l’issue duquel un candidat s’est déclaré élu. Mais notre situation ne s’est pas normalisée pour autant. Notre président, même vêtu des oripeaux du vainqueur d’une élection diplomatiquement qualifiée de «transparente», par les observateurs étrangers, n’arrive, toujours pas, à se départir de sa toque de putschiste multirécidiviste. Notre classe politique est, plus que jamais, divisée. L’opposition, qui s’est rendue compte, sur le tard, qu’elle a été flouée par les accords de Dakar, refuse de reconnaître le fait accompli. Résultat des courses: elle et le pouvoir se regardent en chiens de faïence, dans un duel, comme au Far-West, où celui qui dégaine en premier ne sera pas, nécessairement, le vainqueur. C’est à se demander s’il est écrit, quelque part, que notre pays ne goûtera, jamais, aux plaisirs d’une démocratie apaisée.
L’année 2009 s’était ouverte sur de curieux états généraux de la démocratie, sanctionnés par le revirement d’Ould Daddah, enfin convaincu des ambitions dictatoriales d’un putschiste pas tout-à-fait candidat mais presque. L’ancienne opposition à Maaouya reprenait du collier, significativement renforcée par des symboles sur-usés, pour ne pas dire corrompus, de l’ex-pouvoir. D’autres, sentant le vent d’une nouvelle dictature, s’empressaient de choisir, dans leur garde-boubous, le moins élimé de leurs vêtements réversibles. On se pâmerait, bientôt, dans les salons cossus, au son des «gabegie, gabegie, hou la vilaine!» et des «terrorisme, terrorisme, voici ton bourreau!».
L’année 2010 s’ouvre, quant à elle, sur des comptes d’épicier. Les hommes d’affaires, impliqués dans l’affaire dite de la BCM, ont été élargis, suite à un compromis, avec l’institut d’émission, dont les clauses restent tenues secrètes, à ce jour. En ordonnant leur arrestation, le président s’était, de fait, tiré une balle dans le pied. Le dossier a été politisé, aussi bien par l’opposition, qui n’a pas manqué d’y voir une volonté du pouvoir de régler des comptes à des hommes qui ont soutenu ses adversaires, lors de la dernière présidentielle, que par les proches des inculpés, qui n’ont pas hésité à manifester et à braver les forces de l’ordre. Il fallait, du coup, parer au plus pressé et retirer cette épine qui commençait à faire un peu désordre. Moyennant quelques entorses à la procédure.
Hanevy Ould Dehah croupit, toujours, en prison, malgré l’expiration de sa peine. Il n’y a qu’en Mauritanie et, probablement, en Corée du Nord, où cela est encore possible. L’Union européenne n’a, toujours pas, délié les cordons de la bourse. Elle exige, au préalable, que le dialogue s’instaure entre les différents acteurs politiques, conformément à l’Accord de Dakar. El Hay Sakin n’a, pas encore, été loti. Les salaires des fonctionnaires n’ont pas été augmentés, les prix des denrées de première nécessité ne cessent de flamber. Quant au terrorisme, il se porte, hélas, à merveille, permettant, ainsi, au pouvoir, de justifier, à bon compte, un certain nombre de mesures liberticides. La Mauritanie nouvelle ressemble, décidément, beaucoup à l’ancienne ou, comme disait si bien notre regretté Habib Ould Mahfoudh, c’est, comme normalement en notre charmant pays incrusté sur lui-même, toujours «la changité dans le stabilement»…
Ahmed Ould Cheikh

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