dimanche 27 janvier 2013

Editorial : Remember…



« Il vaut mieux s’exposer à l’ingratitude que de manquer aux misérables ». En soutenant le futur président des pauvres, Mohamed Ould Bouamatou (MOB) ne pensait certainement pas avoir affaire au moins reconnaissant d’entre eux. Et pourtant : Mohamed Ould Abdel Aziz (MOAA) atteint des sommets d’amnésie envers les bienfaits de son cousin qui n’aura eu de cesse de faire accepter le poupinet putschiste auprès des Guéant, Bourgi, Wade et consorts, avant d’aligner quelques deux milliards pour sa rectification électorale, assistant à ses meetings et appelant à voter pour lui… A peine deux ou trois mois après, voilà MOB convoqué à la police économique et interrogé, comme un vulgaire malfrat, pour l’affaire dite des « hommes d’affaires » à laquelle il est totalement étranger.
Désormais concurrencé par l’Etat et la parentèle de MOAA dans ses affaires, l’homme voit son empire menacé par diverses requêtes fiscales simultanées. Trois sociétés dans lesquelles il a des actions (GBM, BSA Ciment et Mattel) ont reçu des avis de redressements fiscaux pour un total de 4.1 milliards d’ouguiyas. Le plus aberrant dans l’affaire est que BSA Ciment a vu ses comptes épluchés sur les cinq dernières années, alors qu’en matière de fiscalité, la prescription est de trois ans, même si la fraude est avérée. Certes, il y aurait à redire, sur cette commodité si propice à la distraction intéressée, mais, tout de même, on ne peut modifier la loi sans quelque décret et, surtout, n’en appliquer les excès qu’à des cibles « privilégiées »… Pire : alors qu’un juge a ordonné que le milliard cent vingt millions d’ouguiyas que les impôts réclament à la cimenterie soit bloqué sur un compte au Trésor public, en attendant que la justice statue sur le fond, le directeur des impôts a refusé de tenir compte de cette décision et carrément envoyé la police fermer l’usine. On comprend que Bouamatou ait quelque lourdeur sur l’estomac et préfère vivre en exil, pour ne plus supporter les vexations de son cousin.
A dire vrai, on se demande si MOB n’aurait pas, ici ou là, laissé échapper quelque doute sur les capacités gestionnaires et politiques de son ex-poulain. Car celui-ci semble avoir désormais choisi d’utiliser l’arme du fisc comme moyen de pression sur ses opposants ou, plus généralement, ceux qui douteraient qu’il faille rentrer dans les rangs. « L’Etat, c’est moi », pérorait, en France, Louis XIV. En Mauritanie, c’est MOAA et cela suffit à faire, pour l’instant, recette et variance comptable. Limam Ould Ebnou, le PDG de Mauritanie-Leasing, a reçu il y a quelques mois, un redressement fiscal de plus d’un milliard d’ouguiyas. Comprenant vite d’où venait le boulet, il a immédiatement juré – Ouallahi ! – de ne plus jamais soutenir un opposant. Et, par un de ces mystères de la divine rectification six aoûtarde, le milliard s’est transformé en deux cent millions d’ouguiyas, bonifiés d’un agrément pour fonder la Banque Populaire de Mauritanie (BMP). Amine.
Le groupe MAOA continue, lui, à traîner le péché originel d’être constitué de cousins à Ould Taya. Son président éponyme a été traîné dans la boue, accusé d’avoir siphonné les comptes de la Banque centrale et envoyé en prison. Lui aussi avait pourtant mis la main à la poche pour les besoins de la campagne de MOAA. D’autres soutiens de l’Ego Rectificateur de tout – surtout de ses dettes – n’ont guère plus été payés en retour. Le groupe  Azizi, dont le patron a débloqué des centaines de millions pour la campagne du président des pauvres, fait l’objet d’un ostracisme à peine voilé, lorsqu’il soumissionne à un marché public. Quelle incidence tout cela aura-t-il sur les prochaines (hypothétiques) élections ? Apparemment, notre guide éclairé n’a plus seulement l’intention de renouveler la classe politique. Il veut aussi propulser sur le devant de la scène des hommes d’affaires qui lui répondent au doigt et à l’œil. Garde-à-vous ! Repos ! Main à la poche ! Mais voilà : l’ingrat oublie beaucoup plus vite que celui qui en subit la noirceur. Ingratitude d’autant plus amère et noire que le bienfait fut grand, comme dit le dicton. Et, donc, d’autant plus rude, le retour de bâton. MOAA risque fort d’avoir en s’en souvenir d’ici peu…

                                                                                                                              Ahmed Ould Cheikh


jeudi 17 janvier 2013

Editorial: I have a dream





J’ai fait un rêve. J’ai rêvé d’une année 2013 totalement différente de celle qui vient de s’achever.  Une année où il y aura un vrai dialogue politique, non un simulacre. Où notre président aura plus les pieds sur terre et ne nous prendrait plus pour des oisillons. Où l’opposition pourra organiser marches  et sit-in sans craindre déferlements policiers et canons d’eau glacée. Où personne ne tirera une balle sur quiconque, qu’il soit président ou simple citoyen(ne). Où l’on pourra organiser des élections apaisées, avec une vraie CENI, sans redouter l’intervention de l’administration dans le processus. Où les députés de la majorité ouvriront, enfin, les yeux et proposeront au moins un amendement aux lois qu’ils votent les yeux fermés et les bras levés. Où l’Etat sera moins présent dans l’économie et encouragera l’initiative privée. Où la convention de pêche signée avec les Chinois sera révisée ou abrogée. Où les ministres pourront dire un mot plus haut que l’autre sans craindre l’ire présidentielle.  Où l’on aura, après plus trois années de disette, un gouvernement digne de ce nom. Où les marchés seront attribués avec transparence. Où les organes de presse officiels feront preuve d’un tout petit peu de courage dans le traitement de l’information. Où tous les Mauritaniens, sans distinction, pourront se faire enrôler. Où une véritable politique permettra de réduire les prix pour fermer la parenthèse de ces boutiques de charité que sont les boutiques Emel. Où le président voyagera beaucoup moins. Où les problèmes d’eau, à Magta Lahjar, ne seront plus qu’un mauvais souvenir. Où les militaires se consacreront plus à leur mission initiale de défense du territoire qu’à la politique. Où le problème de l’assainissement de Nouakchott sera abordé. Où les tarifs prohibitifs de la Somelec baisseront. Où l’on pourra se soigner chez nous, sans risquer des complications ou une intoxication médicamenteuse. Où un diagnostic clair et précis de l’Education sera établi.  Où l’on s’emploiera, enfin, à construire une vraie république islamique, c’est-à-dire fraternelle, juste, ouverte à tous, promotrice de la responsabilité humaine et sûre de ses valeurs.
Tout cela n’est qu’un rêve, certes. Mais il est permis de rêver, au moins. Peut être n’avons-nous plus que cela comme exutoire. Alors, rêvons !
                                                                                                                       Ahmed Ould Cheikh

dimanche 6 janvier 2013

Editorial : Option irréversible


Voilà, c’est fait. L’UPR a débattu. Débattu des sentiers archi-battus par un nombre impressionnant de ses cadres : la gabegie. Ce n’était pas très compliqué : il suffisait d’ajouter, au slogan pudiquement tu : « la gabegie, une option irréversible » de la plupart de ces messieurs, trois petits mots en exergue : « la lutte contre » et voilà nos gras seigneurs promus en Savonarole de la croisade présidentielle, braillant, à qui mieux mieux, la nouvelle formule magique qu’il fallait avoir le culot, reconnaissons celui-ci à ceux-là, d’oser prononcer. Un petit effort, à l’entrée, pour bien enfouir, dans la poche du boubou, les liasses ouguiyeuses baillant imprudemment, et tout le monde pouvait s’aviser d’écouter, sagement, les conseils déjà mille fois rabâchés mais longtemps piétinés, du vrai croisé, lui, contre la corruption et les détournements de deniers publics.
Mohamed Horma Ould Abdi aura-t-il été entendu, en ce cénacle volage ? Pas vraiment certains, nous avons demandé à l’ancien inspecteur général d’Etat qui fit trembler, en son temps, tant de ces messieurs et dames, de bien vouloir rappeler à tous les Mauritaniens, via nos colonnes, ses propositions pour une lutte efficace contre le terrible fléau qui gangrène notre république : indépendance effective, explicitement réglementée, de l’IGE ; transmission directe de ses dossiers à la justice ; recrutement rigoureux de ses cadres, sur les seuls critères de la compétence et de la probité, constamment renforcés par une formation continue, concrète et précisément adaptée ; fin de toute impunité et sanctions appliquées à tous les contrevenants, hors de toute considération partiale ou clientéliste…
Le plus inouï, dans cette histoire, c’est qu’à l’issue de son intervention, l’homme a été applaudi. Vous me direz, les applaudissements, à l’UPR… Mais, tout de même, cela réduit, un tantinet, les contorsions à venir, s’il prenait, à notre rectificateur en chef, la lubie de suivre les conseils avisés – ô combien ! – du maître inspecteur. On voit mal, d’ailleurs, quelles autres décisions seraient en mesure de faire, de cette croisade tant vantée, autre chose que ce qu’elle s’est révélée être, jusqu’au présent : un nouvel outil, pour le pouvoir, de tordre le cou à qui il veut, où, quand et comment ça lui chante. Alors, puisque la messe a été dite – et bien dite, merci Mohamed Horma Ould Abdi ! – attendons la suite. Nul doute qu’elle nous édifie sur les intentions réelles des caciques de l’UPR et de leur mentor, dans leur lutte « acharnée » contre ce qui nous accable… On aura, alors, tout loisir de choisir, nous, peuple mauritanien, la plus irréversible option qu’il soit.

                                                                                                                           Ahmed Ould Cheikh