samedi 23 décembre 2023
Editorial: Au delà des faits
samedi 16 décembre 2023
Editorial: En fidélité à nos pères...
samedi 9 décembre 2023
Editorial: Jugement de Salomon?
samedi 2 décembre 2023
Editorial: Au p’tit malheur la chance…
vendredi 17 novembre 2023
Editorial: Massacre : dix, cinquante ou cent pour un ?
samedi 11 novembre 2023
Editorial: Une probité mauritanienne à retrouver
samedi 4 novembre 2023
Editorial: Grandeur, déchéance… et élévation
samedi 28 octobre 2023
Editorial: Servir tant que l'on peut
samedi 21 octobre 2023
Editorial: Visites-éclair en guise de coutures ?
samedi 14 octobre 2023
Editorial: Tour de passe-passe
samedi 7 octobre 2023
Editorial: Irresponsabilité individuelle et collective
samedi 30 septembre 2023
Editorial: Prédateurs protégés?
samedi 16 septembre 2023
Editorial: Sans loi… ni même plus foi ?
samedi 9 septembre 2023
Editorial: par une fenêtre grand ouverte
samedi 2 septembre 2023
Editorial: Annuel chaos
samedi 26 août 2023
Editorial: Un quatrième pouvoir exsangue
dimanche 13 août 2023
Editorial: Admonestation publique suivie d’effets ?
samedi 29 juillet 2023
Editorial: Petit peut-être mais mur toujours
dimanche 23 juillet 2023
Editorial: Recyclage avant quelle révolution?
dimanche 16 juillet 2023
Editorial: Du nouveau et du réchauffé
samedi 8 juillet 2023
Editorial: Une déroute salutaire?
jeudi 22 juin 2023
Editorial: Pagaille à ciel ouvert
jeudi 15 juin 2023
Editorial: Problématique
Après la mort en février dernier de Souvi ould Cheïne dans les locaux d’un commissariat de police à Dar Naïm, suite à des tortures que lui ont fait subir le commissaire et ses agents, le décès d’un autre citoyen entre les mains des agents d’un autre commissariat, cette fois à Sebkha, a failli sonner le glas d’une institution dont la main paraît devenir démesurément lourde lors des interpellations. Elle s’est pourtant lavée de tout soupçon, dans le cas d’Oumar Diop, en déclarant que celui-ci était déjà sous les effets de substances psychotropes lors de son arrestation. Mais personne ne l’a crue. Des hommes politiques sont montés au créneau et ont fait monter les enchères, en accusant, sans preuves, la police d’avoir liquidé Diop. Il n’en fallait pas plus pour embraser la rue. À Sebkha, El Mina, Kaédi, Boghé et Bababé, des jeunes ont affronté pendant deux jours les forces de l’ordre, brûlant des voitures et pillant des commerces. Des troubles qui ont provoqué la mort, à Boghé, d’un jeune homme victime d’une balle tirée, selon ses parents, par un policier. Après un déploiement sans précédent de la Garde nationale et de la police, la situation a été rapidement maîtrisée. Dans le même temps, l’autopsie du corps de Diop était réalisée en présence d’un membre de sa famille et de son avocat. Envoyés au Maroc pour analyses, les prélèvements n’ont pas tardé à révéler les véritables raisons du décès. Elle résulte, selon l’expertise, « d’un arrêt cardiaque avec une affection aigue du système nerveux central en rapport à une présence à forte dose de cocaïne, en plus de la consommation récente d’alcool ». On en accepte le verdict mais tous ces évènements n’en révèlent pas moins une vraie problématique entre les différentes communautés cohabitant en Mauritanie. Ce n’est pas fortuit et exige un traitement approprié, dans une pratique magnifiée de nos échanges fraternels entre gens de couleurs différentes…
Ahmed ould Cheikh
samedi 10 juin 2023
Editorial: Accidents ou bavures policères?
Comme Dakar ces derniers jours, Nouakchott a connu, la semaine dernière, des journées d’enfer. Suite à la mort « accidentelle » – encore une ! – du jeune Oumar Diop entre les mains de la police, plusieurs quartiers de Nouakchott se sont embrasés. Voitures brûlées, commerces vandalisés, forces de l’ordre attaquées par des groupes de jeunes. À Nouadhibou et Boghé – où un second jeune, Mohamed Lemine ould Samba, a trouvé la mort à la suite des manifestations ! – la même tension a prévalu. Une véritable atmosphère d’intifada. La police aurait-elle eu encore une fois la main trop lourde ? Si « l’enquête diligentée par le procureur de la République à Boghé est en cours », sans laisser filtrer la moindre information supplémentaire, le communiqué de la Sûreté nationale affirme, en ce qui concerne le cas du regretté Oumar Diop, que le défunt a été extirpé d’une bagarre et serait « mort à l’hôpital suite à une insuffisance respiratoire ». L’autopsie réalisée en présence de l’avocat et d’un membre de la famille révélera sans doute les véritables raisons du décès.
Dans l’un ou l’autre des deux drames, si la police se retrouve impliquée, comme dans le cas de feu Souvi ould Cheïne, des sanctions exemplaires doivent être prises à l’encontre des fautifs. Pour qu’à l’avenir ce genre de bévues ne se reproduise plus. Et éviter ainsi de donner, à ceux qui profitent du désordre, l’occasion de s’attaquer à des biens publics et privés, comme on l’a vu lors de ces journées de folie qu’ont connues Nouakchott et Nouadhibou. Auxquelles « de nombreux étrangers auraient participé », selon la version officielle. Leur expulsion a d’ailleurs déjà commencé. Mais attention à l’excès de zèle ! Nous avons-nous-mêmes
Ahmed ould Cheikh
dimanche 4 juin 2023
Editorial: Des élections et des surprises
Après le deuxième tour organisé le samedi 27 Mai, les rideaux sont enfin tombés sur les élections municipales, législatives et régionales. Plusieurs partis ont dénoncé la désorganisation qui a entaché le scrutin en certains endroits, la fraude à ciel ouvert et l’intervention des démembrements de l’État au profit du parti au pouvoir…Ces scrutins n’ont donc pas dérogé à la règle non écrite qui veut qu’aucune consultation électorale ne se déroule normalement. Autre tradition, chaque élection apporte son lot de surprises. L’une d’elles – et non la moindre, sans contestation aucune – est l’affaiblissement fatal des partis de l’opposition traditionnelle (RFD, UFP et APP) qui se retrouvent sans aucun député à l’Assemblée nationale. Un véritable coup de tonnerre dont on n’a pas encore saisi toute l’ampleur. La faute à quoi ? A l’érosion progressive de l’électorat observé depuis quelques années ? Au discours modéré face aux problèmes du citoyen? À la politique d’apaisement vis-à-vis du pouvoir depuis l’arrivée de Ghazwani? A l’émergence de nouveaux partis et sensibilités aux discours plus véhéments ? Au vote tribal et identitaire qui a marqué plus que jamais ces élections ? Il y a en tout cas comme un nivellement de l’électorat. L’opposition-ère nouvelle (Tawassoul, FRUD, SAWAB/RAG et AJD/MR) se retrouve avec une trentaine de députés. Comme à son habitude, le parti au pouvoir obtient une majorité confortable (107 députés) et n’a donc plus besoin de ces partis-cartables qui ont servi de refuge à tous ses mécontents et l’ont tout de même battu à plate couture dans certaines localités. Prendra-t-il sa revanche, comme il l’a promis ? Réponse dans quelques jours lorsque le nouveau gouvernement sera formé.
Ahmed ould Cheikh
samedi 27 mai 2023
Editorial: Foutoirs et déconfitures
Des bureaux de vote avec plus de votants que d’inscrits ; des présidents de bureaux qui refusent de remettre les procès-verbaux aux représentants des partis ; un candidat qui a voté avec sa famille dans un bureau et se retrouve avec zéro voix ; un informaticien qui prend ses aises en améliorant les scores d’un parti et qui a été pris la main dans le sac ; les résultats faussés en plusieurs localités par l’inscription à distance sur les listes électorales… Comme tous les scrutins qui l’ont précédé, celui du 13 Mai a eu son lot d’irrégularités ; certaines étaient flagrantes. Faussent-elles pour autant les résultats globaux ? « Sans aucun doute ! », affirme l’opposition qui crie à la fraude et demande l’annulation des votes à Nouakchott et Boutilimitt. Pour la première fois dans l’histoire de notre démocratie, le parti du pouvoir rafle les neuf communes de la capitale au premier tour. La faute à la proportionnelle qui permet au parti arrivé en tête de diriger la mairie. Un mode d’élection que seul Boydiel ould Houmeïd, pourtant membre de la majorité, avait récemment décrié dans une interview au Calame, tandis que l’opposition le validait. Ila été pourtant fatal à tous ses partis, nouveaux et anciens (RFD, UFP et APP). S’y ajoute la raclée que ceux-ci ont reçue, incapables qu’ils se sont révélés de glaner le moindre siège de député. Alors que des partis de rien auront plusieurs représentants dans l’Hémicycle. Une nouvelle configuration politique dont les contours sont en train de se dessiner sous nos yeux…
Ahmed ould Cheikh
samedi 20 mai 2023
Editorial: Faute absolvable
Pour la première fois depuis l’avènement de la démocratie, sur pression de la France et sous le contrôle de nos vaillants militaires, les Mauritaniens se sont rendus aux urnes dans un climat politique apaisé. Près de vingt-cinq partis se sont lancés dans un scrutin à valeur de test pour le président de la République, quatre années après son élection et donc à un an de la fin de son mandat. Il doit être déçu par au moins un point : la façon avec laquelle « son » parti a géré les candidatures, selon des critères que personne n’est arrivé à expliquer. Et le résultat de l’improvisation ne s’est pas fait attendre. Si l’INSAF est assuré d’obtenir une majorité confortable à l’Assemblée nationale, le « parti du pouvoir » aura quand beaucoup souffert. Plusieurs de ses bastions au Nord et à l’Est, jadis imprenables, sont tombés en d’autres mains. Témoignages[p1] , s’il était besoin, de la prise de conscience des populations qui n’acceptent plus d’être conduites comme moutons de Panurge à l’abattoir électoral, sans qu’elles aient leur mot à dire. Bassiknou, Tamchekett, Guérou, Kiffa, Atar, Nouadhibou, Aoujeft, Ouadane, Bir Moghreïn, la liste est longue des villes qui ont vomi ceux qui leur ont été imposés sans qu’on leur demande leurs avis. Un vote-sanction comme on n’en voit pas souvent sous nos cieux. Mais, à quelques mois de la présidentielle, le Raïs a encore le temps de rectifier le tir. Les présentes élections devraient lui servir de vide-grenier, en mettant à la porte ceux qui ne lui apportent rien, ceux qui se sont mouillés lors de la décennie azizienne et qui tentent de se refaire une virginité, ceux qui brillent par leur incompétence et, enfin, restructurer son parti, en privilégiant les politiques sur les technocrates. « En politique, toute faute est un crime », disait Eugène Chatelain. Pas chez nous, en tout cas : sinon, les prisons seraient déjà gorgées de monde.
Ahmed ould Cheikh
dimanche 14 mai 2023
Editorial: Rien de nouveau sous le soleil?
Lancée il y a une dizaine de jours, la campagne électorale bat son plein de bruits et de tintamarres pour ceux qui peuvent se les payer. Il existe en effet un hiatus évident entre les tentes, leurs équipements et animation, selon la moughataa où l’on se trouve. D’un côté, ceux qui ne lésinent pas sur les moyens, dressant des lieux de rencontres superbement équipés et animés par des groupes musicaux dont les cachets ne sont pas à la portée de toutes les bourses ; de l’autre, ceux qui n’en ont pas ou si peu mais essayant tant bien que mal d’assurer l’essentiel. Rien que du classique dans un pays où le fossé ne cesse de se creuser entre les riches et les pauvres.
Outre le fait qu’elle nous a, une fois de plus, rappelé cette dichotomie, la campagne a fait passer au second plan le procès de la décennie. Après s’être accroché à l’article 93 de la Constitution stipulant qu’un président ne peut être jugé que par une haute Cour de Justice, Ould Abdel Aziz a fini par prendre la parole la semaine dernière. Accablé par les témoins appelés à la barre, aussi bien les hauts fonctionnaires ayant travaillé sous ses ordres que les hommes d’affaires, à qui il confiait des sommes énormes, Aziz a essayé de se défendre tant mal que bien. Mais les faits sont têtus, dit-on, et il sera difficile voire impossible pour cet ex-Président qui se croyait intouchable de justifier les milliards trouvés en sa possession. Une équation à plusieurs inconnues que ses conseils devront résoudre au plus vite, s’ils ne veulent pas voir leur client finir ses jours en prison. Une hypothèse lourde de conséquences pour le fossé susdit ? Il n’est peut-être pas vain d’espérer quelque chose de nouveau sous le soleil…
Ahmed ould Cheikh
dimanche 7 mai 2023
Editorial: Eternelle, l'attente du peuple?
De passage en Mauritanie il y a quelques années, feu Michel Guignard, un fin connaisseur de la musique maure à laquelle il consacra une thèse de doctorat au cours des années 50, répondit à un journaliste qui lui demandait comment il voyait la musique actuelle : « on doit parler plutôt de vacarme ». Une réponse cinglante qui peut s’appliquer aussi à nos campagnes électorales. En effet, depuis que les militaires ont décidé de nous octroyer une démocratie sous contrôle et sur pression de la France, les campagnes électorales qui se suivent ne donnent lieu qu’à un tapage assourdissant. Avant même leur lancement, le décor est planté. Et c’est la course aux places les mieux exposées le long des axes urbains. Des tentes poussent comme des champignons aux couleurs des différents partis, avec les photos grandeur nature des candidats. Des baffles distillent jour et nuit une musique stridente et cela durera jusqu’à la fin de la campagne. Pas de débat d’idées, ni de confrontation entre candidats, ni vulgarisation de programmes qui se limitent généralement à « des promesses qui n’engagent que ceux qui y croient », comme disait Jacques Chirac. Une fois élus à la tête des mairies ou à l’Assemblée nationale, nos vaillants politiciens qui avaient promis le changement ne se l’appliquent qu’à eux-mêmes. Le peuple, lui, peut attendre… la prochaine campagne. On viendra de nouveau l’endormir avec de nouvelles promesses. Heureusement pour eux qu’il a jusqu’à présent la mémoire courte. Mais le jour où il prendra son destin en main… Songez-y messieurs, mesdames : tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se brise.
Ahmed ould Cheikh
dimanche 30 avril 2023
Editorial: Sous la contrainte de quel (dé)sordre ?
Des plus poissonneuses du monde, nos côtes deviendront-elles dans si peu de temps les moins riches en ressources halieutiques et les plus polluées de la planète ? Des vidéos qui circulent depuis quelques jours sur Internet, montrant des bateaux turcs et chinois utilisant des filets tournants pour racler les fonds marins, font froid dans le dos. On les voit lancer leurs filets géants sur des bancs de poisson et tout rafler sans aucun respect ni pour la ressource ni pour les zones de pêche. Le problème est que le phénomène n’est pas nouveau et aucun gouvernement n’a accepté de prendre son courage à deux mains pour y mettre fin. Les Chinois et les Turcs sont bien protégés, semble-t-il. Quand on ajoute à cette situation déjà catastrophique, les dizaines d’usines de poisson installées à Nouadhibou – Aziz avait, en son temps, délivré au moins quarante agréments – qui polluent non seulement l’air mais aussi la mer en y déversant directement leurs déchets non traités, il y a de quoi craindre pour la baie de cette ville. Pas plus tard que la semaine dernière, des milliers de poissons ont été retrouvés morts sur ses côtes : pollution, sans aucun doute. Sombre tableau à tous les niveaux. Pourtant les acteurs de la Société civile, notamment les ONG internationales, les media et les chercheurs n’ont cessé de tirer la sonnette d’alarme mais elle est tombée dans des oreilles de sourds. Affichant haut et fort ses bonnes intentions, chaque nouveau ministre promet de s’attaquer aux problèmes du secteur mais – rappelé à quel (dés)ordresi puissamment incrusté en hauts lieux ? –ne tarde pas à revenir sur terre. Le voilà donc à gérer les affaires courantes jusqu’à son départ et son remplacement. Tournez, tournez, petits navires, il ne nous suffisait pas d’un désert de sable, tuez-nous donc aussi nos eaux !
Ahmed ould Cheikh
samedi 15 avril 2023
Editorial: Remise en cause après les élections ?
Que se passe-t-il au RFD et à l’UFP, les deux partis qui ont toujours représenté l’opposition et passé des décennies à combattre l’arbitraire et l’injustice ? Les dissensions qui les minent auront-elles raison d’eux ? Après l’UFP qui a vu le départ de la député Kadiata Malick Diallo et plusieurs membres de son directoire, c’est au tour du RFD de poursuivre la saignée. Me El Id ould Mohameden, député sortant, a choisi de défendre les couleurs de la coalition Espoir, tandis qu’une de ses figures de proue, Mouna mint Dey, préfère claquer la porte. Dénoncer en suivant la mainmise d’un clan sur le parti et qui empêche son président de voir la réalité. Pressentie pour diriger la liste nationale des femmes, elle a été écartée à la dernière minute. Ce qu’elle n’a visiblement pas apprécié. Elle se présentera sous les couleurs du parti El Vadhila de la majorité présidentielle. Et l’on risque ne pas s’arrêter là. La publication des listes candidates fera certainement de nouveaux mécontents. Déjà que le score réalisé par ces deux partis, lors de la dernière présidentielle, fut très en-deçà de ce qu’ils représentaient sur l’échiquier politique il y a quelques années. La « démocratisation » des moyens de contestation avec l’éclosion des réseaux sociaux et l’apparition de nouveaux opposants beaucoup plus virulents et aux discours accrocheurs, érodera encore plus leur base. Sera-ce enfin l’occasion de se remettre en cause ? Revoir leurs méthodes ? Réponse au lendemain des résultats de Mai prochain…
Ahmed ould Cheikh
dimanche 2 avril 2023
Editorial: Empoignades évidentes mais… en quelle transparence ?
es Mauritaniens n’ont pas fait dans la dentelle : 1329 listes pour 238 communes, 146 pour13 conseils régionaux, les vingt-cinq partis reconnus ont bouclé leurs discussions dans les temps. En attendant les listes nationales mixtes et celles des jeunes et des femmes qui battront elles aussi des records, le combat risque d’être ardu. L’INSAF a certes investi des candidats dans tous les coins du pays mais il aura fort à faire pour obtenir une majorité, tant ses investitures ont suscité de mécontentements. Certains de ses candidats ont même désisté, sous pression de leurs tendances considérant que ses choix ne reflètent pas la réalité du terrain ; d’autres pour ne pas essuyer de revers. C’est la première fois en tout cas qu’un parti-État se retrouve en aussi mauvaise posture. Signe de vitalité démocratique ou… mauvais choix assumés ? Malgré les mises en garde répétées qui lui ont été adressées, l’INSAF n’a pas misé sur les bons chevaux en plusieurs localités du pays. Et risque d’en payer les frais, bien qu’il ait mis les choses au point : ceux qui ne respecteront pas les choix du parti en subiront les conséquences. Mais les mécontents n’en ont eu cure et les voilà accourus aux « partis-cartables » pour confectionner leurs propres listes, comptant bien tailler des croupières à un INSAF qui se refuse à regarder la réalité en face. De belles empoignades en perspective donc…à condition que tout se passe dans la transparence ! Ce qui est loin d’être gagné d’avance.
Ahmed ould Cheikh
samedi 25 mars 2023
Editorial: Miracle
Depuis quelques semaines on ne parle plus que de ça, faisant passer au second plan le procès de l’ancien président qui s’est réouvert ce lundi 20 mars. Alors qu’il tenait l’opinion en haleine avec ses multiples rebondissements et recours introduits par ses avocats pour empêcher la Cour de statuer enfin sur le fond de l’affaire, il est subitement passé au second plan. Les investitures des candidats au parti au pouvoir aux futures élections législatives, régionales et municipales lui ont subitement ravi la vedette. Jamais dans la courte histoire de notre démocratie, des candidatures n’ont suscité autant d’intérêt et donné lieu à tant de rumeurs, de contre-rumeurs et d’intox. Il faut dire que la discrétion absolue qui a entouré la confection des listes de la part d’Insav n’a pas aidé les colporteurs d’infos et autres racoleurs à vendre la mèche. Ce qui n’a pas empêché certains, ‘’de sources fiables’’, de jurer la main sur le cœur, que tel ou tel bénéficiera de la confiance du parti. Résultat des courses après près de 24 heures d’attente : des reconduits, des éconduits, des nouveaux investis et des mécontents à la pelle. La confection de la liste nationale, celles des jeunes et des femmes permettra sans doute de résorber certains mécontentements mais il serait illusoire de contenter tout le monde. Ce qui nous réservera sans doute de futures empoignades entre ceux qui étaient hier ‘’frères’’ et qu’une ambition dévorante a jetés dans les bras d’autres partis. Certains enjeux locaux expliquent en partie cette course folle contre la montre et dont le parti ne semble pas avoir pris toute la mesure. Dans certaines localités en tout cas où les élections risquent de ne pas être de tout repos pour un parti au pouvoir assez mal en point mais qui réussit toujours, comme par miracle, à tirer son épingle du jeu.
Ahmed Ould cheikh
dimanche 19 mars 2023
Editorial: Coup de semonce?
L’évènement a tenu toute la Mauritanie en haleine pendant près de deux semaines. Quatre (prétendus) djihadistes se sont enfuis de la prison civile de Nouakchott, tuant deux gardes lors de leur retraite et mettant à nu les défaillances sécuritaires du système carcéral. Depuis, c’est le branle-bas de combat. Tout le pays est en alerte. L’évasion de « salafistes », dont deux condamnés à mort, risque d’être du plus mauvais effet pour un pays jusqu’alors à l’abri d’attaques terroristes. Surtout que la facilité avec laquelle ils ont pris la poudre d’escampette n’augure pas d’un système de surveillance à toute épreuve. C’était une nécessité pour le pouvoir de régler ce « problème » au plus vite. Dès l’alerte lancée, tous les services se sont donc mobilisés. Le danger pouvait venir de partout et les fuyards frapper n’importe où. L’exception mauritanienne, tant vantée par les Occidentaux, à échapper aux attaques terroristes risquait de prendre un sérieux coup. Finalement tout est bien qui finit bien. Les fugitifs sont interceptés dans une zone montagneuse de l’Adrar, grâce au signalement d’un chauffeur croisé dans leur fuite. Et après un accrochage avec une unité d’élite de la gendarmerie, trois d’entre eux sont abattus avant que le quatrième ne rende les armes. Non sans avoir fait une troisième victime, un gendarme de l’unité qui les avait pris en chasse. Passée l’épreuve, plusieurs questions restent en suspens. Comment l’arme qui a permis de neutraliser les grades fut-elle introduite en prison ? Ont-ils bénéficié de complicités à l’extérieur pour couvrir leur fuite et leur offrir un gite, des armes et une voiture pour sortir de la ville ? Existe-t-il des cellules dormantes d’organisations terroristes capables de planifier une telle évasion ? Bref, accident de parcours ou coup de semonce ?
Ahmed Ould Cheikh
dimanche 5 mars 2023
Editorial: Dans les règles de l'art, enfin!
Dans quelques semaines, les Mauritaniens seront appelés aux urnes. Pour la première fois depuis 2019, date de la dernière élection présidentielle qui les vit tourner la page d’une décennie qui les avait tant fait souffrir, théâtre qu’elle fut d’une des plus grandes opérations de détournement de leurs maigres ressources. Fruit d’un accord entre le ministère de l‘Intérieur et les partis politiques, la CENI est déjà à pied d’œuvre. Le recensement électoral a été lancé. L’atmosphère rappelle étrangement l’ambiance qui prévalait lors de la Transition 2005-2007, marquée par un apaisement inédit de notre scène politique. Avant que les militaires ne viennent la polluer, en encourageant le mouvement dit des « indépendants » et en soutenant « leur » candidat à la présidentielle. La suite, on la connaît. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ? Va-t-on assister pour une fois à des élections « normales » ? Il y a de quoi en douter quand on voit l’affluence que génèrent les missions du parti au pouvoir où chacun veut tirer la couverture à soi pour montrer un poids électoral très souvent factice. Si l’on y ajoute la faiblesse de l’opposition et ses divisions, on peut facilement imaginer les résultats de l’exercice ;du moins à l’intérieur du pays où le poids des chefferies et des notabilités peut faire pencher la balance. Le seul espoir de celle-là reste les grandes villes, habituellement frondeuses, où elle a par le passé réussi à tirer son épingle du jeu. La donne va-t-elle changer ? Réponse dans quelques mois… à condition que tout se passe dans les règles de l’art.
Ahmed ould Cheikh
dimanche 26 février 2023
Editorial: Faux fuyant sans lendemain
«Plus de cinquante millions de dollars auraient été généreusement offerts par un chef d’État arabe au président Mohamed ould Abdel Aziz»: la rumeur, très probablement lancée à titre préventif, il y a des mois par l’entourage de l’ex-Président va-t-elle devenir l’argument central de sa défense après avoir été corroborée par son avocate libanaise qui a écrit sur Facebook qu’Aziz lui a affirmé que sa fortune a pour origine un chef d’Etat arabe? Après l’effondrement de sa barricade «Article 93 de la Constitution» et la très faible chance de voir déclarée inconstitutionnelle la loi anti-corruption – qu’il avait lui-même fait voter lors de son règne – que pourrait donc espérer MOAA de cette nouvelle stratégie ? Admettons que la rumeur se voit corroborée par ledit supputé donateur. Un aveu, soit dit en passant, qui mettrait celui-ci en piètre posture devant la Communauté internationale désormais officiellement attachée à la lutte contre la corruption…
Cela dit, cette somme resterait plus du double inférieure aux quarante-sept milliards d’ouguiyas déjà saisies par l’État mauritanien, sans compter les placements et investissements à l’étranger qu’il reste encore à tracer, ainsi que les acquisitions foncières et immobilières vraisemblablement obtenues via des marchés publics truqués. À ce dernier égard, les témoignages de ses anciens ministres et collaborateurs ne tarderont pas à l’accabler. Et l’on ne manquera certainement pas de surligner en rouge la soudaine fortune de ses proches et autres principaux bras droits. Tout aussi généreusement dotés par ce même mystérieux chef d’État arabe, je présume ?
Mais sur quels critères ces éventuels cadeaux et dons d’un gouvernement étranger à un président de la République en exercice pourraient-ils être soustraits des comptes publics ? De tradition en Mauritanie – cf. l’exemple de Moctar ould Daddah et même de son épouse Mariem qui remettaient au Trésor public tout ce qu’on leur offrait lors de leurs missions à l’étranger – et tout aussi systématique ailleurs, notamment à l’ONU, aux USA ou en France où n’est considéré « personnel » qu’un cadeau valant moins de cent dollars, ces largesses étrangères sont bien évidemment portées au compte du peuple, c’est-à-dire à l’État lui-même.
Il faudra donc, aux avocats d’Ould Abdel Aziz, beaucoup de contorsions, d’effets de manche et, surtout, de clameurs médiatiques – encore et toujours… – pour seulement espérer semer le trouble et duper ainsi l’opinion de notre bon peuple. Mais il est très improbable que cela soit suffisant pour convaincre les juges, beaucoup plus attentifs, eux, à l’examen des faits… Bref, un faux-fuyant sans lendemain pour une défense aux abois ?
Ahmed ould Cheikh
dimanche 19 février 2023
Editorial: Trop c'est trop!
L’affaire fait grand bruit depuis quelques jours. Suite à des tortures infligées dans un commissariat de police, la mort de l’activiste Souvi ould Cheïne a fini de convaincre que l’État de Droit s’arrête à la porte des commissariats. Pourtant – et espérons qu’enfin une fois devienne coutume – cette affaire, a contrario de tant d’autres qui l’ont précédée, ne passera pas par pertes et profits. Dès que les policiers ont déposé le corps sans vie de Souvi à l’hôpital Cheikh Zayed, la machine de l’État s’est mise en branle. Le président de la République a ordonné au ministre de la Santé la constitution dans les plus brefs délais d’une équipe de médecins pour procéder à l’autopsie du corps. Le procureur de Nouakchott-Nord s’est déplacé à l’hôpital pour en attendre les résultats et le directeur de la Sûreté – que certains malintentionnés voulaient associer à un évènement auquel il est totalement étranger – a mis aux arrêts tous les agents présents ce jour-là audit commissariat, ainsi que son commissaire. Fait nouveau : la TVM a suivi l’affaire de bout en bout, évoquant ses différentes péripéties dans ses journaux télévisés. Il y a réellement de quoi se féliciter quand on sait que jusqu’à tout récemment, les – excusez du peu -« bavures » policières étaient soit passées sous silence, soit réglées à l’amiable avec les familles des victimes.
Cette fois, les autorités ont pris les devants : plus rien ne sera comme avant. Comme l’a claironné le procureur, l’enquête suivra son cours et les responsables répondront de leur acte devant les tribunaux. L’opinion publique est pour une fois unanime et suit de près l’évolution de l’affaire. Espérons qu’après un si bon début, elle ne finira pas en eau de boudin. Quoiqu’il advienne, toute la rédaction du Calame s’associe à présenter nos condoléances attristées à la famille du regretté martyr. Inna lillahi oua inna ileyhi raji’oune.
Ahmed ould Cheikh
samedi 11 février 2023
Editorial: Au travail, messieurs les juges!
Depuis l’ouverture de son procès le 25 Janvier dernier, Ould Abdel Aziz doit se faire du mouron. Il n’imaginait sans doute pas que le processus engagé avec la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire, allait, deux ans plus tard, le voir assis sur le banc des accusés comme un vulgaire chef de bande pris la main dans le sac. Confiant en ce que les informations qu’il détient seraient de nature à le protéger contre toute poursuite, il était même persuadé que le pouvoir n’ira pas jusqu’à le juger. Je te tiens, tu me tiens par la barbichette… C’est pourquoi le retour sur terre fut rude pour celui qui se disait invincible et « ne connaissait pas l’échec », selon ses propres termes. Pour essayer de le tirer de ce mauvais pas, ses avocats ont multiplié les manœuvres et invoqué à n’en plus finir l’article 93 de la Constitution stipulant qu’un président de la République ne peut être jugé que par une Haute cour de justice. Un argument rejeté par le tribunal de première instance, la Cour d’appel et la Cour suprême. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, il s’est alors attaché, en plus de ses conseils locaux, les services de trois avocats étrangers : une libanaise, un français et un sénégalais. De quoi faire un sacré boucan au tribunal ! Surtout lorsqu’ils croiseront le fer avec leurs homologues de la partie civile et avec un procureur particulièrement au fait de ses dossiers. Les joutes oratoires ont d’ailleurs déjà commencé et ne s’arrêteront pas de sitôt. Un long procès en perspective nous attend, quoique son issue ne fasse aucun doute, tant les charges qui pèsent sur Ould Abdel Aziz et ses co-accusés sont flagrantes. Et les peines devraient être lourdes, très lourdes même, si notre Droit pénal en permettait le cumul. Seront-elles assez bien choisies, au final, pour dégoûter une fois pour toutes les aspirants à – aspirateurs de ? – nos richesses publiques ? Au travail, messieurs les juges !
Ahmed ould Cheikh
EDitorial: Place au Droit
Le mercredi 25 Janvier s’est enfin ouvert le procès tant attendu. Celui d’Aziz et douze de ses compagnons d’in(fortune). Longtemps attendu par l’opinion nationale, il devrait sceller pour de bon le sort de l’ex-Président qui n’a cessé de narguer le pouvoir et la justice incapables, selon lui, de lui faire un procès. Ses avocats n’ont d’ailleurs pas cessé de multiplier les manœuvres dilatoires, en usant de tous les recours possibles et imaginables, allant jusqu’à la Cour Suprême pour éviter que le procès n’ait lieu. Sans doute savaient-ils que leur client serait dans une des positions les plus inconfortables qui soit au cas où il aurait à justifier les milliards qu’il a amassés. Et dont une (petite ?) partie est déjà entre les mains de la Justice. Il est en effet écrit noir sur blanc, dans la nouvelle loi sur la corruption, que c’est à la personne inculpée de prouver l’origine de sa fortune. Que dira donc Ould Abdel Aziz en cette occurrence ? Lui à qui il était interdit de s’adonner au commerce et aux affaires durant l’exercice de ses fonctions. Et qui devait, de surcroît, verser toutes les donations de quelque nature qu’elles soient au Trésor public.
On a donc à entendre le Droit. Non pas les arguties subtiles autour d’éventuels vices de forme ou de procédure qui permettraient à l’un ou l’autre des accusés, voire tous, de se voir, non pas blanchis, mais très salement exemptés des suites pénales de leurs forfaits. Non, le Droit dans toute sa noblesse, au service de la vérité. Il ne s’agit pourtant pas ici d’idéalisme ni même d’éthique. C’est très concrètement notre avenir qui est en jeu. Rien de plus pragmatique donc. Car en plus d’être un test pour le pouvoir actuel, qui laissera – ou non… – la justice suivre son cours normal, il servira de leçon pour nos futurs dirigeants convaincus– ou non… – à ne plus se hasarder, comme s’y complut notre ancien guide éclairé, à faire preuve de boulimie.
Ahmed ould Cheikh
samedi 21 janvier 2023
EDitorial: Enjeux réels d'un procès exceptionnel
Mohamed ould Abdel Aziz, encore et toujours à truster le devant de la scène… Mais pour combien de temps encore ? Le lancement enfin de son procès sonne-t-il le glas de sa disparition des radars ? Probablement. Surtout s’il s’en tient à son actuel dispositif de défense articulé autour de deux grandes lignes : « Je suis visé parce que je suis perçu comme une menace politique » et « le régime actuel n’a aucune preuve de ce que j’aurais détourné de l’argent public ». Les deux arguments sont pourtant apparemment de poids : il est effectivement visé pour des raisons politiques et il n’existe, à ce jour, aucune preuve de ce qu’il se soit personnellement servi dans la caisse publique. Ses avocats vont certainement se barricader derrière cette ligne de défense. Mais, ce faisant, l’ex-Président et ses conseils éludent la bonne question qu’ils n’essaient même pas de (se) poser : comment Ould Abd El Aziz est-il devenu riche ?
Et c’est à cette question de l’enrichissement sans cause que les avocats doivent pourtant répondre. L’examen d’un enrichissement sans cause est une évolution significative dans la lutte contre la corruption et la criminalité économique. À une certaine époque, on se limitait à chercher si des biens publics avaient été détournés ou pas. Aujourd’hui, détourner directement de l’argent public est considéré comme la préhistoire de la corruption. En effet la corruption moderne, ce n’est jamais piquer directement dans la caisse publique, nul ne s’y risque, sauf les idiots, pour reprendre les termes de Mohamed El Mounir.
Aussi a-t-on mis au point le concept d’enrichissement sans cause. Un attrape-tout qui couvre potentiellement tout ce qui est illégal : trafic d’influence, par exemple, recours parcimonieux ou excessifs à la planche à billets, ventes manipulées du domaine public de l’État, attributions intéressées de marchés publics, etc. Le plus important avec ce concept est que la charge de la preuve de son inadéquation incombe à la personne présumée coupable. C’est à elle de démontrer que ce qu’elle a acquis l’a été de manière légale. Comme Ould Abd El Aziz ne peut pas et ne voudra pas dévoiler l’origine des quarante-sept milliards saisis en dehors de ses propriétés immobilières, il va persister à répéter qu’il est visé par un procès politique et que la justice n’est pas capable d’apporter la preuve qu’il ait détourné l’argent public.
Petit atout : il sait que la compréhension de la corruption chez le citoyen de base se réduit à piquer dans la caisse et cela explique ses manœuvres populistes. Mais peut-il négliger que ses juges ont évidemment une vision autrement plus affutée des réalités ? Ses avocats ne pourront longtemps continuer à chercher à inverser la charge de la preuve. Alors, les vices de procédures, voire de l’enquête, jusqu’à obtenir la relaxe de leur client après maints recours ? Le dol est cependant assez conséquent et connu –voire implicitement avoué par l’accusé, dans l’ampleur de son enrichissement sans cause – pour qu’une telle vicieuse fin soit seulement envisageable. D’autant moins, d’ailleurs, qu’elle retomberait immanquablement sur le pouvoir ou, plus exactement, le système qui prétend nous gouverner. Oui, c’est bien leur crédibilité qui est en jeu, au final de toute cette affaire. Et les chances de notre nation multi-ethnique à trouver un modus vivendi acceptable par tout un chacun…
Ahmed ould Cheikh
samedi 14 janvier 2023
EDitorial: L'heure des comptes
Il est vraiment inénarrable, notre ancien guide éclairé ! Voulant filer à l’anglaise, alors que l’ouverture de son procès est imminente, il en a été empêché par la police de l’aéroport qui lui a confisqué au passage son passeport, histoire sans doute de lui passer l’envie de changer d’air. Contrarié, l’Ex s’est soudainement pris de diarrhée verbale. Avant même de rentrer chez lui, le voilà en direct sur Facebook pour s’attaquer, comme à son habitude, au pouvoir en place. Et rebelote le lendemain, beaucoup plus longuement cette fois, à discourir surtout autour de sa fortune personnelle. « Si les responsables mauritaniens arrivent à justifier 50% de leurs biens, moi, ce sera à 100% ! », a-t-il martelé.
Sans le vouloir, il s’est ainsi mis le doigt dans l’œil. Ayant reconnu être arrivé pauvre au pouvoir, comment parviendrait-il à justifier une fortune qu’il dit colossale ? Les obligations d’un président de la République sont à cet égard sans équivoque : ne s’adonner ni au commerce ni aux affaires dans l’exercice de ses fonctions, reverser au Trésor public toutes les donations, en natures ou en espèces, reçues dans le cadre de celles-ci. Il est donc censé sortir comme il est entré. Soit, en ce qui concerne Ould Abdel Aziz, les mains vides. Dans le cas contraire, sa position serait des plus inconfortables. Du pain béni pour la Justice qui n’aura qu’à lui poser la question qui tue : « Quelle est l’origine de ta fortune ? »
Mais, bon, on s’attend à tout avec cet acrobate voltigeant de branche en branche. Pas vraiment Tarzan, tout de même : n’en déplaise à sa perruque de président des pauvres, passablement ébouriffée par ses aveux de richesse, il aura bien du mal à se présenter en sauveteur du peuple qui subit, pour sa part et de plus en plus chaque jour que Dieu fait, les conséquences des filouteries de la Décennie. Ceux qui s’y trompent – il en resterait encore, semble-t-il – auraient-ils oublié qu’aujourd’hui naît toujours d’hier ? Quant aux moins dupes, ils attendent effectivement des comptes. Pas des grimaces.
Ahmed ould Cheikh
mardi 3 janvier 2023
Editorial: Chant du cygne?
Après une longue période de grâce accordée au président Ghazwani, une partie de l’opposition (RFD, UFP ET UNAD) sort enfin de sa torpeur. Déçue par l’annulation du dialogue sur lequel elle fondait beaucoup d’espoirs, elle a accepté finalement de participer aux réunions préparatoires pour les prochaines élections initiées par le ministère de l’Intérieur. Mais l’absence de dialogue lui est restée apparemment en travers de la gorge. En témoigne le communiqué qu’elle vient de publier sous le titre : « Appel pour une politique de large entente nationale au service de l’unité, de la démocratie et de la stabilité de notre pays ».
« À la veille des élections législatives, régionales et municipales », nous font ainsi savoir les trois partis susdits réunis en une significative Coalition des Forces du Changement Démocratique, « la scène politique est caractérisée par la persistance et l’accélération de facteurs de risques graves sur la stabilité et la paix, [suite] en grande partie à la crise politique, économique et sociale qui perdure depuis des années, dans un contexte mondial et régional particulièrement instable et dangereux. » Puis, après avoir rappelé les difficultés de l’opposition durant « la décennie de la gabegie », le communiqué souligne «la justesse [depuis l’accession de Ghazwani au pouvoir] de la politique d’apaisement du président de la République et de l’opposition démocratique, malgré certaines faiblesses et inconséquences. »
Mais « alors que la classe politique, dans sa grande majorité, cherchait à approfondir et à renforcer ce climat d’apaisement pour aboutir à des réformes consensuelles, certains milieux extérieurs à l'opposition ont manœuvré pour susciter une nouvelle polarisation politique, articulée autour de l'alternative entre le choix de la confrontation et du retour à la décennie de braises et son bilan catastrophique et le choix du changement pacifique dans un climat apaisé. […] D’ores et déjà, le paysage politique est marqué par cette ligne de fracture profonde et dangereuse. Dangereuse aussi serait l’organisation d’élections dans ce climat délétère. »
Et d’appeler en conséquence « toutes les forces politiques patriotiques, de tous bords, [à] anticiper sur les menaces qui pèsent sur notre pays, dépasser nos contradictions secondaires et nous engager dans la voie salutaire d’une large entente nationale, quelle qu’en soit la forme, seule à même […] de faire face aux dangers qui nous guettent. » Il y a sans doute beaucoup (trop ?) à lire entre les lignes. Inquiétude ou aveu d’impuissance devant la montée des populismes identitaires, exacerbés par l’inflation galopante des prix et la mollesse du pouvoir à corriger les hiatus sociaux – notamment ethnico-tribaux – cette mobilisation a-t-elle une chance d’être suivie de réels effets ? Elle semble en tout cas avoir tout du chant du cygne… Et la menace croissante d’une nouvelle récession mondiale – programmée de longue date en l’espoir de compenser les folies des produits financiers dérivés ? – n’est certes pas de nature à y entendre plutôt un hymne à la résurrection du sphinx…
Ahmed ould Cheikh