jeudi 29 septembre 2011

Editorial : Droit de véto

Le droit de veto, ça en a des formes. Par exemple, comment ouvrir les médias, en Mauritanie, en exerçant un droit de veto tout à fait contraire à l’esprit de démocratisation à tout-crin qu’on prétend promouvoir ? Réponse : en glissant, dans le texte de loi ordonnant cette ouverture, un montant exorbitant pour obtenir une licence d’exploitation : dix millions d’ouguiyas, pour une simple radio! Les professionnels de la presse libre attendaient, depuis vingt ans, une ouverture des médias qui place, enfin, notre pays au même rang que les pays de la sous-région. Dans les colloques, nos voisins se gaussaient gentiment : «alors, la Mauritanie, toujours à la traîne ? Au moins, vous vous distinguez des autres… » Dix millions d’ouguiyas. Autant dire : les pros de la presse libre, dehors du marché! Ou, alors, passez par les fourches caudines de nos forces d’argent, banquiers, hommes d’affaires et consorts! Si, si, je suis sûr qu’ils vont aimer ce genre de mécénat!
Par quel tour de passe-passe, Obama, notre défenseur afro-européen américanisé des droits de l’Homme, va-t-il, lui, justifier de son droit de veto, au conseil de sécurité des Nations-Unies, pour contrer la saisine de Mahmoud Abbas, pour la fondation, enfin, de l’Etat de Palestine, condition inséparable de celle de l’Etat d’Israël, lors de la résolution 181 du 29 novembre 1947? Soixante-cinq ans que cette résolution est piétinée, et que la comédie perdure, avec la seule fondation de la Sionie, caricature de ce que devrait être un Etat juif. Soixante-cinq ans que les Sionistes bafouent toutes les résolutions des Nations-Unies, guerroyant ici, invoquant, là, des feuilles de route, des plans de paix, des accords d’Oslo ou de Madrid, appuyés par des quintettes, des quartettes, et autres trompettes à musique variable, mais colonisant, toujours, à tout-va. Les négociations sont rompues, les « gens des territoires » n’ont pas accepté nos conditions préalables. Hé, Palestiniens, reprenez les négociations, sans poser, vous, de conditions ! Seulement, voilà : en usant de son droit de veto pour la défense d’une situation inacceptable, Obama rejoint la triste cohorte des marionnettes des droits de l’Homme et des peuples, révélant les grosses ficelles qui l’animent; au même niveau qu’un ex-général subsaharien, moins président des pauvres, on s’en doutait déjà, que pantin des forces d’argent…
AOC

mercredi 21 septembre 2011

Editorial : A la recherche du temps perdu……..

Le dialogue politique, entre la majorité et l’opposition, est, désormais, lancé. Depuis samedi dernier, très exactement, au Palais des Congrès, en présence du président de la République qui a même prononcé un discours, pour ajouter à la solennité du moment. Son speech, prononcé dans un arabe très approximatif, évoquera, pêle-mêle, un tournant important de l'histoire de notre pays; l'opportunité offerte, aux différents partenaires politiques, d'examiner les voies et moyens nécessaires à la promotion de notre vie démocratique; le dialogue constructif, sur notre situation politique; la gouvernance démocratique; les relations nouvelles, fondées sur la confiance réciproque ; le respect des différences, le pluralisme des positions et la diversité des attitudes. De bien jolis mots qui pourraient faire croire, au premier venu, que nous vivons une démocratie en tous points parfaite, qui n’a jamais connu de coup d’Etat contre un président démocratiquement élu et respecte, à la lettre, ce texte fondamental qu’est la Constitution. En réalité, il y a loin, de la coupe aux lèvres. Mais ne boudons pas notre plaisir. Pour une fois que s’assoient, autour d’une table pour discuter, l’opposition, la majorité et le représentant du président – qui se démarque, ainsi et ouvertement, de ses soutiens pour lesquels il n’a, paraît-il, guère d’estime ; et pour cause: ils ont, déjà, soutenu tous ceux qui ont conquis, précédemment, le palais ocre!
La situation exige cette discussion. S’il avait toutes les cartes en main, Ould Abdel Aziz n’aurait jamais transigé. Il serait allé seul aux élections, laissant l’opposition ruminer sa colère. Mais la donne a évolué, depuis l’élection de 2009. Des révolutions ont balayé plusieurs dictatures, dans le monde arabe; la situation interne est loin d’être reluisante; AQMI frappe à nos portes et la France, principal soutien de notre putschiste légitimé, a bien changé, depuis que Guéant s’occupe de l’Intérieur et non plus de l’Extérieur. Dommage que Robert Bourgi, dans ses révélations, se contente de la période Chirac. Acteur de premier plan, dans le changement d’attitude de la France, vis-à-vis du coup d’Etat d’août 2008, il nous dira, peut-être un jour, en échange de quoi ce revirement a été opéré. Il attend, sans doute, que Sarkozy soit éjecté de son fauteuil, en 2012, pour évoquer d’autres valises, pleines à ras bord.
Pour en revenir à notre dialogue au rabais, auquel ne participent, réellement, que deux partis, il y a lieu de se demander ce qu’on peut en attendre. Les médias publics changeront-ils, du jour au lendemain, pour devenir, non plus la voix de leur maître, mais des organes permettant à tout le monde de dire ce qu’il pense? Le pouvoir va-t-il multiplier les concessions, pour que des élections les plus transparentes possibles soient organisées? Une CENI véritablement indépendante sera-t-elle mise en place? Une nouvelle loi électorale sera-t-elle promulguée, pour interdire le nomadisme des élus, d’un parti à l’autre?
Si le dialogue aboutit à l’adoption de tous ces points, nous applaudirons, des deux mains, et nous donnerons raison à ceux qui ont brisé les rangs de l’opposition, pour faire bouger les lignes. Dans le cas contraire, on aura encore perdu du temps et déçu des espoirs. Au risque de s’acheminer vers des lendemains incertains. Qui sera, alors, le grand perdant?

Ahmed Ould Cheikh