samedi 26 septembre 2020

Editorial: Déni de promesse malvenu

 Le Web n’a cessé de l’évoquer tout au long de la semaine dernière. Les blogueurs l’ont reprise en boucle. La presse en a fait ses choux gras. La nomination, par le ministère des Finances et sans passer par la voie normale, d’une quinzaine d’inspecteurs-vérificateurs dont certains, pour ne pas dire tous, disposent d’appuis haut placés, a constitué un énorme pavé dans le jardin de ceux qui croyaient ce genre de pratiques révolu. « Fils de tel » reste toujours le plus court chemin vers la haute fonction publique. À l’occasion, le hashtag « Prête-moi ton père ! » a fait florès sur le Net ; opposants et détracteurs du pouvoir n’ont pas manqué de l’exploiter à fond. Une décision désastreuse dont celui-ci aurait d’ailleurs pu faire l’économie. À l’heure où de pauvres citoyens poireautent des jours et des nuits pour déposer un dossier et passer un concours de recrutement dont les résultats sont en général connus d’avance, il aurait été plus sage de ne pas heurter une opinion publique dont la sensibilité est à fleur de peau. Surtout en cette période de crise où le chômage bat des records ! Il n’est pas normal qu’en plus de continuer à recycler divers symboles de la gabegie, en les maintenant à leurs postes, alors que leurs responsabilités sont clairement engagées dans les dossiers noirs de la décennie, le pouvoir s’abandonne à ce qu’il avait promis de combattre de toutes ses forces ! Les promesses électorales n’engagent donc que ceux qui y croient, comme disait je ne sais plus qui ?

                                                                                             Ahmed Ould Cheikh

dimanche 20 septembre 2020

Editorial: Un peu de dignité, Mohamed!

 Après sa conférence de presse ratée où il a refusé systématiquement de répondre, malgré l’insistance des journalistes, aux questions relatives à l’origine d’une fortune qu’il reconnaît colossale, Ould Abdel Aziz est revenu sur le devant de la scène. Cette fois-ci, c’est sur France 24 qu’il a jeté son dévolu ; et en français, s’il vous plaît ! Comme s’il voulait s’adresser à un public bien ciblé. Et de se mettre à nouveau dans la peau d’une victime dont on a bloqué les comptes, confisqué les passeports et enfermé dans la grande prison qu’est Nouakchott. Exactement comme il s’y employa avec ses innombrables victimes, le plus souvent pour des motifs fallacieux. Qui a tué par l’épée…. Victime au-dessus des lois, cependant : il maintient en effet son raisonnement absurde sur l’article 93 de la Constitution, comme quoi un ancien Président ne peut être poursuivi que par la Haute Cour de justice et pour haute trahison. Et les actes commis durant son exercice dénués de tout rapport avec la fonction de Président, sinon d’en abuser sans aucune vergogne, comme tous ceux que lui reproche la Commission d’enquête parlementaire, on en fait quoi ? On les passe par pertes et profits ? Ses avocats devraient commencer par lui rappeler qu’une fois libéré de la charge suprême, un Président devient un justiciable ordinaire qui doit rendre compte pour tous ses méfaits. Et Dieu sait qu’ils sont nombreux ! Non content d’avoir mis le pays sous coupe réglée pendant une décennie, il veut à présent s’en tirer à compte optimal, nabab en ses palais dorés, tandis que les concitoyens dont il avait mission de servir le bien-être croulent sous les charges les plus basiques : loger, nourrir et vêtir un tant soit peu dignement leur famille ; sans parler des soins de santé et d’éducation relégués aux oubliettes ? Ho, Mohamed, un peu de dignité, justement : rappelle-toi combien ton illustre homonyme (PBL) s’employa à tout donner au service de son peuple ! Et si celui-ci est bel et bien en droit de te demander des comptes en cette vie, n’oublie pas que c’est celui-là (PBL) qui te réglera définitivement ceux de votre nom, dans la vie future…

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                            Ahmed ould Cheikh

vendredi 11 septembre 2020

Editorial: Frugalité perdue?

Arrivé au pouvoir quatre années plus tôt, le président malien, feu Modibo Keïta, voulut, en 1964, offrir à sa mère un pèlerinage à La Mecque. Mais, ayant renoncé à la moitié de son salaire au profit de son pays, il n’avait pas assez d’argent pour payer tous les frais inhérents au voyage Il écrivit alors une lettre, devenue célèbre, à l’ambassadeur du Mali en Arabie Saoudite, lui demandant de lui prêter 60.000 francs maliens à remettre à sa maman et qui lui seraient remboursés dès sa maigre paye présidentielle perçue. Plus près de nous, feu Mokhtar ould Daddah reçut d’innombrables dons en espèces ou en nature de ses homologues africains (Mobutu, Bongo, Houphouët-Boigny..) mais sefit invariablement un point d’honneur à tout verser au Trésor public. Aujourd’hui, on est très loin, en nos deux pays frères et voisins, de l’esprit de ces pères fondateurs honnêtes et désintéressés. Accusé, au Mali, d’avoir détourné des milliards de Fcfa, le président IBK vient d’être balayé par un coup d’État militaire et, en Mauritanie, l’ex-président MOAA n’est pas mieux loti :une commission d’enquête parlementaire vient de transmettre à la justice un rapport accablant sur sa gestion. Déjà convoqué à trois reprises par la police chargée de la répression des crimes économiques et financiers, il n’est pas encore au bout de ses peines.

Nos pays seraient-ils maudits au point d’être encore, soixante ans après leur accession à l’indépendance, des havres de mauvaise gestion, prévarication, détournement de deniers publics et malversations en tous genres ? Au moment où d’autres pays plus pauvres rivalisent d’ingéniosité pour assurer le bien-être de leurs populations, les nôtres caracolent en tête de liste des Etats où il ne fait pas bon vivre. Certes, la société importée de consommation et de spectacle s’est chargée, dessous de table aidant, de promouvoir l’avidité et la passion irréfrénée envers les biens de ce monde. Mais c’est partout. Alors pourquoi si intensément et cruellement en nos sables où la noblesse se faisait justement honneur du frugal ? Serait-ce que le pouvoir nous rende aujourd’hui vulgaire ? Ne s’accommode plus que de celui-ci, chez nous comme trop souvent ailleurs ? Ou que seul le vulgaire ait été assez frustré pour s’acharner à y accéder ? Avant d’y sévir, au grand dam du peuple… Et nous laisser, au sortir de cette souffrance, cette intrigante question : son ami de quarante ans aurait-il l’âme –et le courage… – de se révéler à tout le moins l’exception qui confirme la règle ?

                                                                                                                                                                                                                                                                                    Ahmed ould Cheikh

dimanche 6 septembre 2020

Editorial: CQFD

Naît-on pour perdre ? Quoique nul n’en sait rien pour lui-même et autrui – sinon, à l’heure de sa mort ; et encore : il reste le Jour Dernier… – Mohamed ould Abdel Aziz s’est déclaré, lui, persuadé du contraire… en ce qui concerne son auguste personne. Ça lui a donné une morgue de tous les diables et un apparent mépris envers tout ce qui n’est pas lui. Une semaine de garde à vue n’aura donc fait que le promouvoir à la tête d’une opposition qu’il croit évidente au pouvoir qui s’est osé à seulement l’imaginer perdant. Sûr, ça va ameuter le peuple mauritanien ! CQFD.

On l’interroge sur ses ressources. « Moi » – ce fameux Moi qui l’obnubile au point de lui faire perdre toute prudence… – « je n’ai jamais eu besoin de toucher Ma solde de Président », clame-t-il, « Mes affaires ont toujours prospéré » Est-ce compatible avec une fonction administrative ? « Je suis né pour gagner, c’était [c’est toujours ?] Moi le chef et toute décision passait [doit toujours passer ?] obligatoirement par Moi ». N’y a-t-il pas eu des abus, des violations de la Loi ? « Le Chef a toujours raison : c’est cela, la Loi. Et le Chef ainsi couvert, par la Loi, de toute erreur, c’était [c’est toujours ?] Moi … Tel est le sens de l’immunité constitutionnelle. » Ça se discute… « Non : Je suis, Moi, immunisé contre toute discussion ! » Mais cette immunité vous permettait-elle de vous servir démentiellement de l’État pour vous enrichir personnellement ? « L’État, c’était [c’est toujours ?] Moi ! » CQFD.

L’affaire d’Accra ? « Un secret de Moi – donc d’État – dont Moi, Je consens à vous révéler aujourd’hui quelque détails »… Et tutti quanti. De quoi étoffer copieusement l’accusation dans les procès qui s’annoncent ?À être trop prolixe, on s’expose à commettre des impairs ou à aggraver son cas... À moins que ne se profile, en cette logorrhée narcissique, une nouvelle ligne de défense : la maladie mentale… Ce Qu’il Fallait Démontrer ?


                                                                                                         AOC