samedi 29 septembre 2012

Editorial : Il ne reste plus qu’à prier ?


Mais, bon Dieu, qu’avons-nous fait pour mériter un tel sort ? Entre un pouvoir militaire qui prend le pays en otage depuis 1978, une opposition qui refuse de voir plus loin que le bout de son nez, une classe politique indigente, une classe affaires atrophiée et des citoyens dont l’incivilité bat tous les records, il y a de quoi se faire une tignasse de cheveux blancs. La vision est, certes, un peu pessimiste mais, disons-le clairement, il ya quelque chose qui ne cloche plus dans ce pays, depuis quelques années déjà. Et, surtout, depuis 2005. On avait entrevu le bout du tunnel, avec l’élection de 2007 et nous sommes, illico, retombées dans nos travers. Depuis lors, c’est cahin-caha que le pays avance, avec, comme le dit l’opposition, un pas en avant et deux en arrière. Comment sortir de l’impasse ? Laisser Ould Abdel Aziz achever son mandat, en ne demandant plus son départ ? Mettre en place un gouvernement d’union nationale ? Organiser des élections apaisées ? Respecter les règles du jeu économique, en accordant les mêmes chances à tout le monde ? Il y a péril en la demeure et tout le monde a intérêt à y mettre du sien, pour nous éviter des lendemains qui déchantent car, avec la crise au Nord-Mali et la guerre qui menace d’éclater, à tout moment, à nos bordures orientales, nous devons faire preuve de la plus grande vigilance et de la plus large cohésion. Nos frontières sont poreuses, notre ennemi très mobile et nous avons pris, dans le passé, suffisamment de coups (bas) pour s’abstenir de dormir sur nos lauriers. Mais que faire, si notre front intérieur continue à montrer autant de lézardes ? Ill ne s’agit pas de signer un chèque en blanc au pouvoir actuel mais de lui démontrer, preuves à l’appui, que la gestion unilatérale du pays a ses milites et que rien ne peut se réaliser sans un minimum de consensus. Un gouvernement d’union nationale serait-il la panacée ? Le remède-miracle qui nous sortira du pétrin dans lequel on continue à s’enliser ? Encore faut-il convaincre, d’abord, la majorité et son chef que nous traversons une crise. Que la politique de l’autruche ne mène nulle part. Que l’UPR n’est pas un parti. Que Maaouya s’en est allé et personne n’a versé une larme, à commencer par sa propre formation politique.  Que l’opposition est composée de citoyens ordinaires et non pas de diables.  Qu’une élection sans la participation de tous n’est pas viable. Qu’une majorité composée d’applaudisseurs ne sert ni le pouvoir ni la démocratie. Que l’intérêt général n’est l’apanage de personne.  Que le développement du pays et l’enracinement de sa démocratie préoccupent tout le monde.  Si ces leçons sont assimilées, on aura, déjà, accompli un grand pas vers une meilleure entente. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Ould Abdel Aziz, conforté dans sa démarche par sa majorité, est convaincu qu’il détient seul la Vérité. Et que, quoique fasse l’opposition, il ne déviera pas de la voie qu’il s’est tracée. L’entêtement est un vilain défaut.
Dans le contexte actuel qui fait planer d’énormes risques sur le pays, nous avons, pourtant, besoin  de clairvoyance, de lucidité et de dépassement de soi.  Des qualités qui ne courent, malheureusement, pas les rues. Il ne nous reste qu’à prier. Alors, prions !

                                                                                                                       Ahmed Ould Cheikh

samedi 15 septembre 2012

Editorial : Débat en règle… d’exception


 Le brillant professeur qu’est Lô Gourmo l’a dit, vendredi soir, à la TVM, lors d’un débat qui l’a opposé au vice-président de l’UPR mais tout le monde le savait : le décret sur la base duquel a été convoqué le collège électoral en 2009 est frappé du sceau de la nullité, puisqu’il a été signé par le Premier ministre et non par le Président par intérim. Si l’on s’était référé à la Constitution à l’époque, et si le Conseil constitutionnel avait joué son rôle, il n’y aurait jamais eu d’élection dans ces conditions. Par le plus élémentaire des raisonnements, on peut donc dire que les résultats de cette élection sont de nul effet. Certes, tout ceci n’est qu’historiette, visant, avec la complicité de la France de Sarkozy et du Sénégal de Wade, à nous faire avaler la pilule du coup d’Etat du 6 août 2008 mais il est nécessaire, parfois, du moins chaque fois que l’occasion se présente, de la rappeler, à ceux qui chantent, sur tous les toits, que nous vivons une démocratie en tous points exemplaire. Lô Gourmo va même plus loin : à supposer que l’élection présidentielle soit valide, dans sa forme, pourquoi le Conseil constitutionnel, censé indépendant, n’a même pas daigné statuer sur les recours de l’opposition ? Quitte à les rejeter après, rien que pour donner l’impression qu’il n’était pas simple chambre d’enregistrement à qui le pouvoir pouvait faire avaler toutes sortes de (grosses) couleuvres. Mais il n’en fut rien. Le Conseil a validé, en un tour de main, les résultats de cette élection, comme s’il voulait en fermer la parenthèse et passer à autre chose.
Autre anomalie révélée par le juriste : comment un parlement, dont le mandat a expiré en octobre 2011 en vertu de la Constitution et qui n’a donc plus d’existence légale, peut se réunir, trois mois après en congrès, pour voter des amendements constitutionnels ?
Au cours du même débat, Gourmo a également évoqué le dialogue inclusif qui tarde à voir le jour, alors qu’il figure, en bonne place, dans l’Accord de Dakar. Et profite de l’occasion pour rappeler, aux bons souvenirs de l’opinion publique, qu’après les échanges avec le pouvoir sur les modalités et les sujets du dialogue, l’opposition a été la dernière à faire des propositions. Lesquelles ont été remises, en mains propres, il y a près d’un an, par Messaoud Ould Boulkheïr et maître Mahfoudh Ould Bettah, à Ould Abdel Aziz. A l’heure qu’il est, la réponse à ces propositions n’est toujours pas parvenue à l’opposition que la majorité continue pourtant à accuser de refuser le dialogue. 
Le débat de haute facture, premier et, probablement, dernier du genre, a permis de rétablir certaines vérités et de proposer aux téléspectateurs autre chose que ce qui les a toujours dissuadés de regarder celle qui est devenue une vulgaire caisse de résonance du pouvoir. La TVM est, pour une fois, sortie de l’ordinaire. Avant de replonger, rapidement, dans les mêmes travers. Dans la nouvelle Mauritanie qui se veut tant démocratique, ce qui devait être la règle est devenu l’exception.


P.S. qui n’a rien à voir
A combien a été vendu Senoussi ? S’il existait une discipline sportive de la vitesse avec laquelle on dit quelque chose et l’on fait son contraire, Ould Abdel aziz aurait été, de loin, champion du Monde. Ne nous a-t-il pas répété, à Atar, que Senousssi ne serait livré à la Libye que lorsque la justice mauritanienne en aurait fini avec lui ? Un mois après, jour pour jour, alors qu’aucun juge ne l’a entendu, il est livré à une délégation libyenne dirigée par le ministre des Finances (??!!). La presse a parlé de transaction, de gros montants, de financements, de dessous et dessus de table. En Mauritanie nouvelle, tout se monnaye, apparemment. Même la parole donnée.

                                                                                                                     Ahmed Ould Cheikh