mardi 30 mars 2010

Les derniers instants du président irakien racontés par son avocat : Comment Saddam a été assassiné


Le président irakien Saddam Hussein a été pendu le 28 décembre 2006, le jour de la fête d’Al Adha. Comme si ses bourreaux, dans un ultime pied de nez, voulaient que ce jour de fête, célébré par des millions de musulmans et d’arabes à travers le monde, soit un jour de tristesse et de chagrin. A part les images livrées par le gouvernement irakien issu de l’occupation, on ne sait pas grand-chose de cette mise en scène. Des images où on voyait le leader irakien, l’allure fière, marcher vers l’échafaud sans hésiter, sous les insultes et les quolibets de ses ravisseurs, répétant la Chahada jusqu’au dernier souffle.

Avec le livre de Khalil Al-Doulaîmi (Saddam, les secrets d’une mise à mort livrés par son avocat, ed. Sand), ce vide est à présent comblé. Cet avocat, président du comité de défense du président irakien, qui s’est entretenu pendant de longues heures avec Saddam dans sa prison, nous livre un témoignage poignant sur les deux guerres du golfe, les grandes étapes de l’occupation de l’Irak, la parodie de procès qui a condamné à mort son illustre client, le combat héroïque que mène la résistance et le rôle néfaste joué par l’Iran et Israël dans la situation actuelle de l’Irak et donne des détails troublants sur sa mise à mort.

Un livre à lire absolument pour avoir une idée réelle de ce qu’était Saddam et voir combien le fossé est grand entre ce que nous chantent les médias occidentaux et la situation sur le terrain où depuis l’invasion du pays en 2003, la résistance ne cesse de marquer des points.

Extraits


‘’Les dernières volontés

Dans la nuit du vendredi qui précéda l’exécution, plusieurs officiers américains, dont le Commandant du camp, se mirent au garde-à-vous pour faire leurs adieux au président. Saddam, quant à lui, exigea de voir une dernière fois ses deux frères, Barazan et Sabaoui. Puis, comme à son habitude, il termina la prière du soir et passa la nuit sur son lit, à lire le Coran. Les heures passèrent. Les gardiens américains, persuadés qu’il pourrait se pendre, avaient renforcé leur surveillance… A quatre heures du matin, le commandant du camp se présenta dans la chambre du président et l’informa qu’il allait le livrer aux irakiens. Il lui demanda quelle était sa dernière volonté. Le président fit ses ablutions, s’empara du Coran et en lut quelques versets pendant le peu de temps qu’il lui restait. Ensuite, il demanda que ses affaires personnelles soient remises à ses avocats puis à sa fille bien-aimée Raghad. Il leur demanda également d’informer celle-ci qu’il était sur la route du paradis, à la rencontre de son Dieu, la conscience tranquille et les mains propres, qu’il donnait sa vie en soldat, sacrifiant sa famille pour l’Irak et pour son peuple.

Il mit une chemise blanche, son costume gris, son pardessus noir et enroula sur sa tête la traditionnelle écharpe irakienne. Puis, il enfila le gilet pare-balles qu’il portait quand on l’emmenait au tribunal.

Il monta, avec les membres américains de sa garde, dans l’une des voitures blindées qui lui étaient réservées et qui portaient l’insigne de la Croix-Rouge internationale. Ensuite, selon les sources américaines, il voyagea dans l’un des hélicoptères Black Hawk et demanda qu’on ne lui bandât pas les yeux. Il regarda Bagdad. Peut-être Bagdad a-t-il jeté sur son fils, qui se préparait à partir, un dernier regard d’amour ? Il traversa le ciel de Bagdad comme si c’était son dernier regard d’adieu. Comme si cette cité qu’il avait bâtie, honorée, et à qui il avait sacrifié sa vie, était, elle aussi, en partance. Elle disparut dans le lointain. Quelques minutes plus tard, l’avion se posait dans un camp du renseignement militaire américain, dans le quartier à majorité Chiite d’Al Kadhimya, sur la rive occidentale du Tigre. La région avait été divisée en trois secteurs : le camp américain, un secteur es forces de sécurité, et une zone de haute sécurité rattachée au ministère de la Défense du gouvernement irakien d’occupation.

Le président descendit de l’hélicoptère. On lui posa sur les yeux des lunettes noires opaques, que l’armée américaine utilisait pour les déplacements de prisonniers. C’est entouré par des membres de la police militaire américaine que le président pénétra dans la zone de haute sécurité. Et qu’il y fut laissé, au premier poste de contrôle. En ce jour sacré de l’Aïd Al Adha, commémorant le sacrifice d’Abraham, le funeste sacrilège devait être commis. Tous les musulmans du monde en furent bouleversés, humiliés.

Entre les mains du gouvernement irakien d’occupation

Une fois débarrassé de son gilet pare-balles et de ses lunettes noires, le président fut introduit dans la première section de la zone, celle de « la lutte contre le terrorisme », spécialisée dans l’exécution des sentences de mort (on devrait dire assassinat). Y passaient les dirigeants et les héros irakiens, condamnés par des tribunaux illégitimes, en ces temps où la loi était bafouée. Il était cinq heures et demie du matin quand le président entra. Il découvrit, entassés dans des cages, des irakiens et des Arabes résistants, tous condamnés à mort.

Le président les regarda fièrement et leur sourit. Il savait qu’ils étaient là du fait de leurs actions héroïques. Puis il reprit sa progression. Il était désormais escorté par des gardiens issus de milices ethniques qui l’accablaient de leurs insultes, lui reprochant la guerre avec l’Iran dans les années 1980. Dans une nouvelle salle, il se trouva face à l’ancien avocat Mounir Haddad, qui était devenu juge d’instruction. C’est lui qui, au cours de l’une des audiences concernant les déplacements forcés des kurdes en 2005, avait déclaré qu’il résidait dans un pays du Golfe, qu’il était milliardaire, et que personne ne pouvait l’influencer. Il avait poursuivi, s’adressant au président : « Arrête de parler politique ! Tu nous as abreuvés de politique pendant trente-cinq ans et aujourd’hui, tu es poursuivi pour crimes de guerre ! »

Les Milices Chiites encerclent le bâtiment

Pendant ce temps, à l’extérieur, les brigades de la mort des milices du Mehdi encerclaient la direction des renseignements militaires. Elles étaient décidées à l’envahir et à enlever Saddam pour le remettre à l’Iran contre des sommes vertigineuses. Al Maliki était donc intervenu auprès de Moktada Al Sadr afin d’éviter un nouveau scandale politique et un affrontement avec les Américains. C’est ainsi que « l’assassinat » fut retardé, le temps de permettre à Moktada d’arriver sur place. Il est vrai que d’autres sources nient sa présence ce jour-là, pour des raisons qu’il est facile d’imaginer : Il ne fallait embrasser ni le gouvernement d’occupation, ni les puissances d’occupation elles-mêmes…

Moktada est présent

Moktada pénétra dans la zone avec ses gardiens et, quand il vit le président assis en train de lire le Coran, il lui lança : « comment vas-tu, tyran ? » Le président le regarda avec mépris, et l’un des gardiens de Moktada lui frappa la tête de la crosse de son fusil.

Le juge Mounir Haddad demanda à Saddam de s’asseoir sur le siège qui lui était réservé, puis il lut la décision inique de l’exécution. L’acte portait la signature de Nouri Al Maliki, mais n’était pas validé par le présumé Conseil de la présidence, comme l’exigeaient les propres lois de cette cour ridicule.

Face aux bourreaux

Le président commença alors à clamer : « Vive le peuple ! Vive la lutte ! Vive la nation ! Vive l’Irak ! Vive la Palestine arabe et libre ! »Puis il ajouta : « Nous sommes au paradis et nos ennemis sont enfer. »

Il cria ensuite, à l’adresse du juge et du procureur général : « A bas les Perses, à bas les Américains et leurs agents ! » Puis, il fut introduit dans la salle maudite de l’exécution. Il se retrouva face à tous les chefs des brigades de la mort. Contrairement à ce que l’on a pu dire, il n’y avait aucun imam sunnite. Moi-même, je ne pouvais être présent. Etaient là des officiers des services de renseignements iraniens, maîtrisant parfaitement la langue arabe, afin de confirmer qu’on exécutait bien Saddam Hussein et non son sosie, comme on avait pu le craindre. Ce sont ces mêmes officiers iraniens qui assistèrent à toutes les exécutions des anciens gouvernants. Ils prirent même part à l’audition de Barazan, avant de l’égorger de leurs mains, Ali Al Dabbagh relatant « une séparation de la tête du corps.» L’un des officiers, le visage masqué, se tenait sur l’estrade même où devait avoir lieu l’exécution. Parmi eux encore, le haut responsable des renseignements iraniens en Irak. On pouvait aussi dénombrer dans la salle plusieurs chefs de l’armée du Mehdi et des membres de l’ambassade iranienne. Et si les avocats étaient absents, si aucun sunnite n’était témoin, c’est bien à cause de la présence, sur les lieux mêmes de l’exécution, de hauts responsables des renseignements iraniens, de la garde révolutionnaire et de la brigade iranienne d’Al Qods. Parmi ces hauts responsables, il y avait le général Sulaymani. C’est lui qui, avec d’autres officiers, s’adressa au président en farsi alors que ce dernier montait vers son martyre, lui signifiant clairement que sa destinée et celle de l’Irak étaient entre les mains de l’Iran.

Mais rien de tout cela ne fut révélé, ni par les autorités d’occupation, ni par leur gouvernement.

La montée au martyre et à la gloire

Le président Saddam Hussein gravit dignement les dernières marches avec le plus grand panache. Il affrontait son destin avec une foi profonde. En face de lui, une foule ennemie l’accablait d’insultes, de slogans hostiles et d’obscénités. Certains tentèrent même de l’agresser et de le frapper alors qu’il avait les mains liées. Mais Saddam ne perdit, à aucun moment, ni sa fierté, ni son courage. Il leur répondit : « Vous êtes des traîtres… des agents de l’ennemi… des ennemis du peuple… A bas l’Amérique et ses agents… »

Mouaffak Al Rabii prenait un plaisir manifeste à l’insulter et à l’humilier. Le président lui dit : « Vous êtes des terroristes… de Terroristes… Vive la résistance ! « Vive le peuple ! Vive la lutte ! Vive la nation ! Vive l’Irak ! Vive la Palestine arabe et libre ! »Puis il ajouta qu’il avait servi l’Irak et qu’il l’avait édifié.

Pendant ce temps, Ali Al Messadi, photographe officiel dAl Maliki, prenait des clichés. Ensuite les criminels délièrent les mains de Saddam pour les lier de nouveau dans son dos, remplacèrent les fers qui entravaient ses pieds par un lien réservé aux exécutions. Le président demanda au procureur général Monkidh Al Feraoun de remettre le Coran qu’il avait sur lui à l’avocat Badr Al Bandar, afin qu’il soit reis à sa famille. Le président présenta son cou à la corde avec une fierté et une foi exemplaires que le monde entier a pu constater et qui sont bien loin de ce qu’a pu prétendre Al Rabii à propos de la peur qu’aurait exprimé le visage de Saddam. Il monta à l’échafaud, le nom de Dieu à la bouche : »Ya Allah, Ya Allah. » Telle la montagne altière, tel le haut palmier irakien, il se tint droit, ferme et courageux devant la corde. Cette attitude imposante prit de court les comploteurs et dérouta ceux qui assistaient à l’exécution.

Saddam présente son cou aux Bourreaux

Les quatre individus qui entouraient Saddam étaient de hauts responsables des brigades de la mort (l’armée du Mehdi). C’et Riadh Al Nouri, le gendre de Moktada Al Sadr, qui mit la corde au cou du président. Mais ils cachaient tous leur visage et portaient un masque pour ne pas être reconnus. Quelque soient leurs déguisements et leurs dénégations, nous demeurons persuadés aujourd’hui que Moktada Al Sadr en personne était présent, lors de l’exécution du président Saddam Hussein. Nous sommes sûrs que c’est lui qui ajusta la corde autour de son cou, en se tenant à sa droite, celui qui exigea de Maliki d’exécuter la sentence de ses propres mains.

Pourquoi Trente-neuf pouces ?

Le président refusa le sac qu’on voulait lui mettre sur la tête mais demanda qu’on le glisse autour de son cou, sous la corde. La corde avait été remise aux Américains par un soldat sioniste. Elle avait été fabriquée selon des normes de longueur, de matière et de tressage tout à fait contraires à la loi. Avant qu’elle soit placée autour du cou de Saddam, un soldat américain d’origine juive pénétra dans la salle. Il mesura la longueur de la corde jusqu’à ce qu’il eût atteint exactement trente-neuf pouces. Puis le soldat demanda qu’on lui donne un cutter. On lui tendit un couteau de boucher, celui qui était destiné à décapiter le président afin que ses ennemis puissent brandir sa tête au bout d’une pique et la promener à travers la ville.

Mais pourquoi couper la corde à trente-neuf pouces ? Parce qu’en 1991, l’Irak avait lancé sur Tel-Aviv 39 missiles qui déclenchèrent la haine des sionistes contre Saddam Hussein et constituèrent, probablement, l’une des causes de son exécution. Moktada s’avança et mit soigneusement la corde autour du cou du président. Il s’assura que celui qu’il allait exécuter de ses propres mains était bien Saddam Hussein, et non son sosie. Le président s’avança avec assurance et se plaça au-dessus de la trappe carrée de 80 centimètres de côté. L’un des membres du gouvernement-et non le gardien comme on le prétend-déclama selon la tradition iranienne : « Dieu bénisse Mohammed et la famille de Mohamed, Mohammed et Ali » ; un autre cria le nom de Moktada. Il y eut même des invectives aigries envers le président, qui le poussèrent à répondre : « Moktada… quelle bravoure !? ». Ses bourreaux ne l’épargnaient même pas au moment où il s’apprêtait à affronter le destin que Dieu lui avait réservé. L’un des membres du gouvernement de Maliki lui cria au dernier moment : « Va en enfer ! », ce à quoi le président répondit : « Au paradis, si Dieu le veut, en martyr pour l’Irak ! » C’est à ce moment-là aussi que deux personnalités ont filmé la scène avec un téléphone portable ; l’un d’eux devait, par la suite, vendre le film à l’une des chaînes satellitaire, pour la somme de 18 000 dollars.

Munkidh Al Feraoun, vice procureur général du tribunal ethnique et illégitime, tenta de faire taire les invectives et les huées envers le président, au moins devant la caméra… Il leur répétait : « Je vous en prie… mes frères », mais ses appels furent perdus dans l’agitation et le vacarme. D’ailleurs, il pensait sans doute beaucoup plus à la caméra qu’au respect du président.

Tout cela n’a rien d’étonnant de la part de ceux dont les scandales n’arrêtaient pas d’éclater depuis qu’ils avaient commencé à comploter contre l’Irak et son régime national ! Par exemple, les Américains avaient invoqué toutes sortes de raisons pour interdire au comité de défense de Saddam Husseïn d’accéder au tribunal. Ils avaient ensuite préparé eux –mêmes une pétition pour la défense du président martyr. Et c’est ce même tribunal médiocre et infâme qui demanda à un avocat nommé Abd Al Samad Al Husseïni, titulaire d’un diplôme de droit falsifié, de lire la prétendue pétition.

Pendu ou Battu à mort ?

Le président prononça la Chahada en entier, une première fois, mais ils ne lui donnèrent pas le temps de la répéter. Le corps pur tomba dans la trappe maudite. Mais la corde avait été délibérément allongée pour qu’il tombe par terre encore en vie et qu’on puisse le tuer en le frappant. Et effectivement, le président, tombé à terre, leva la tête en souriant. Ils se mirent tous à le piétiner et à le frapper, particulièrement Muwafak Al Rabii et Myriam Al Riss, jusqu’à ce que mort s’ensuive, loin de la caméra. Puis ils accrochèrent le cadavre inerte à l’échafaud pour donner l’illusion que le président avait été pendu, selon la procédure légale.

Feraoun prit alors la tête d’une manifestation à laquelle participèrent les officiers iraniens et des éléments des brigades de la mort. Il fut porté sur les épaules de manifestants qui psalmodiaient des formules iraniennes, trahissant ainsi le degré de justice et d’impartialité de la Cour de justice instaurée par un occupant qui n’avait pas hésité à y rassembler des miliciens et des agents de pays ennemis de l’Irak : l’Iran et Israël.

Le corps inerte du président fut ensuite transporté au foyer de l’un des chefs des milices, afin que l’infamant rituel mazdéen pût y être achevé. Les bandes chiites iraniennes accueillirent le cadavre pur du martyr de l’Irak par des insultes, des coups de pied, mais aussi des coups de couteau dont ils criblèrent le cadavre. Tous les chefs et représentants des partis iraniens et des milices chiites, associés au concert des bourreaux et des ennemis sanguinaires de l’islam, prirent part à ce rituel odieux en poussant des cris hystériques. Puis des officiers des services de renseignements iraniens vérifièrent l’identité du cadavre, avant de lui trancher la gorge avec un couteau pour s’assurer définitivement de sa mort !

Le ministère de l’Intérieur du gouvernement d’occupation avait prévu que l’exécution du président Saddam Hussein se ferait au cours d’une cérémonie protocolaire officielle. Mais l’obstination des chefs des milice qui tenaient à exécuter Saddam Hussein de leurs propres mains, bouleversa totalement leurs plans.’’


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