dimanche 30 juin 2013

Editorial : Opposition échaudée…



Depuis quelques jours, la scène politique bruit de toutes sortes de rumeurs. Ce n’est pas une première. Malgré la floraison de journaux, de sites, de radios et de chaînes de télévision, la rumeur reste le premier moyen de (dés)information, dans ce pays. La nature ayant horreur du vide et en l’absence d’informations puisées à de bonnes sources, le « on dit » a encore de beaux jours devant lui. Toujours est-il que nos analystes politiques – en fait, le premier peshmerga venu d’on ne sait où – ont glosé sur tout et son contraire : les futures élections d’octobre prochain ou, selon l’angle de vision, de juillet 2014, leur boycott de tout ou partie, par la COD, les états d’âme d’Ould Abdel Aziz qui ne sait plus où donner de la tête, entre une majorité qui risque de s’effriter et une opposition participationniste qui demande toujours plus de garanties. Sans parler de celle qui se radicalise de plus en plus et ne réclame, ni plus ni moins, que son départ.
Dans ce contexte qui n’a rien d’apaisé, sans doute imaginez-vous qu’il serait utopique de vouloir organiser des élections consensuelles. D’ailleurs qui en veut, de ces élections ? Ni le président, jouissant, au Parlement, d’une confortable majorité qui lui obéit au doigt et à l’œil, ni la majorité qui risque de perdre des plumes dans cette consultation, ses parlementaires ayant déçu, pour la plupart, ni l’opposition pour qui plus rien ne peut se faire avec Aziz aux commandes, encore moins Messaoud, malgré son initiative de sortie de crise, tant son parti, grandement saigné, est loin d’être assuré de retrouver son perchoir. Faut-il en déduire qu’il n’y aura pas d’élection du tout, ni cette année ni l’année prochaine ? Il n’y a qu’un pas que beaucoup n’hésitent plus à franchir.
Pourtant et tout compte fait, l’opposition a vraiment intérêt à aller aux élections. Ne serait-ce que pour éviter le syndrome de 1992, lorsque la politique de la chaise vide l’avait empêchée de glaner quelques sièges au Parlement de l’époque, laissant libre cours au régime d’Ould Taya qui ne s’est pas fait prier pour tout rafler. Certes les conditions ont changé. Même si le pays est toujours dirigé par un (ancien) militaire, la démocratie est entrée dans les mœurs. Et, plus important, des avancées significatives ont été réalisées, au cours du dialogue politique de 2011. En fait des concessions qui desservent surtout le pouvoir et qu’il a accepté de lâcher, sans mesurer, probablement, leur portée réelle. Quatre-vingt députés élus à la proportionnelle, candidatures indépendantes impossibles et nomadisme entre les partis interdit, autant de décisions qui pourraient être lourdes de conséquences, pour le parti au pouvoir qui a toujours profité des ralliements opportunistes rendus possibles par le flou de naguère.
Si l’opposition réussit à mobiliser son électorat pour le recensement à vocation électorale, occuper le terrain, affûter son discours et se battre pour la transparence du scrutin, elle pourrait donner des sueurs froides à un pouvoir qui aura toutes les peines, au moment de choisir ceux qui défendront ses couleurs, à satisfaire toutes les sensibilités locales. C’est là le véritable enjeu du scrutin. Et c’est dans ces brèches que l’opposition doit s’engouffrer. A moindre d’être convaincue que tout cela n’est que de la poudre aux yeux, pour couvrir une mascarade analogue à celle de 2009. Dans ce cas, on ne peut que lui donner raison. Opposition échaudée… Mais cette crainte est, paradoxalement, une vraie faiblesse que le pouvoir ne cesse d’exploiter : rien n’est jamais simple, en politique…

Ahmed Ould Cheikh

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