Ould Abdel Aziz
est finalement rentré le samedi dernier (8 juin), après plus de trois semaines
de villégiature, ou de soins, on ne sait pas, en France. Hormis une
vague réunion sur le Mali, à Bruxelles, au début de son séjour, et une
apparition à l’Elysée, à sa fin, personne n’a la moindre idée de ce que notre
président faisait dans la capitale gauloise. On raconte qu’il avait un
rendez-vous avec son médecin qui le traitait des suites de la balle ‘’amie’’,
reçue en octobre dernier. Mais aucun communiqué officiel ni bulletin de santé
ne sont venus éclairer notre lanterne, sur le véritable état de l’auguste
intestin. Nous sommes, pourtant, en démocratie et le président n’est pas
censé se comporter en tyran, n’ayant de compte à rendre à
personne. Un communiqué sibyllin aurait pu suffire pour qu’on ne nous prenne
pas pour des crétins qui n’ont le droit de savoir que ce qu’on veut bien leur
dire. L’heure est suffisamment grave pour exiger justification d’une
vacance aussi prolongée du pouvoir. Le foyer de tension qu’est le
Mali n’est toujours pas éteint. La crise politique qu’on vit depuis 2009
n’a pas baissé d’un cran, malgré la décision de la CENI d’organiser des
élections en octobre prochain. Le Ghanagate n’a toujours pas connu son épilogue.
Les tensions sociales sont plus que vivaces. Et notre président se permet
d’aller vadrouiller sur les Champs Elysées, comme un touriste insouciant !
Il n’a pourtant laissé les clés de la maison à personne. Certes, l’armée veille
au grain, surtout quand son chef est absent, mais les affaires courantes
n’étaient même pas gérées, durant la période. Certes, le pays ne tournait
pas au ralenti, il ne tournait même pas. Avec un Premier ministre incolore et
inodore, mal entouré, incapable de prendre la moindre décision et dont
le principal souci est de placer les siens dans n’importe que poste laissé
vacant. Oui, Ould Abdel Aziz a choisi quelqu’un qui ne risquait pas de lui
faire de l’ombre. Sans parler des ministres, insipides à souhait et dont le
manque d’initiative semble être la marque de fabrique.
Notre guide
éclairé pouvait-il donc dormir sur ses lauriers ? Avec une armée
verrouillée et au pas, une opposition qui se contente de meetings et de
slogans, il n’aurait pas de quoi être inquiet ? Serait-il immunisé ?
Un régime dont les fondations sont instables, d’essence putschiste et sourd à
tout dialogue, ne peut, normalement pas, dormir sur ses deux oreilles. La
chute, brutale, le menace perpétuellement, à moins que ce ne soit la fatalité
même de sa nature. L’alternative ? Se préparer, en toute simplicité, à
partir tranquillement, par le jeu régulier d’une volonté populaire enfin
respectée : écouter les gens, tous les gens ; dialoguer ;
chercher le consensus ; organiser, collégialement, des élections réellement
ouvertes à tous, excluant toute implication des autorités publiques, civiles ou
militaires…
Mais il semble
bien que la seule éventualité d’un désaveu objectif soit, tout bonnement,
odieuse à l’ego du despote. Incapable de seulement l’envisager, il en rejette soigneusement
les prémisses, niant toute objectivité à la moindre contestation, l’excluant,
plus ou moins habilement, de la légalité citoyenne. On réduit donc la
démocratie à l’emballage et au pays de tous les sables, l’autruche reste reine.
En attendant le prochain putschiste. Et dire que certains crient au génie !
Pauvre, pauvre Mauritanie…
Ahmed Ould
Cheikh
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