samedi 5 octobre 2013

Editorial : Sale temps pour les bookmakers…



Le dialogue tant attendu, entre le pouvoir et l’opposition, que tout le monde appelait de ses vœux, a été lancé ce lundi 30 septembre à Nouakchott. Après une série de rencontres, entre le Premier ministre et  divers leaders de partis-membres de la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD), il s’agit maintenant de débattre sur un certain nombre de points relatifs aux futures élections législatives et municipales, prévues le 23 novembre prochain. La discussion devait être précédée par une entrevue entre le président  Ould Abdel Aziz et Ahmed Ould Daddah, chef de file de l’opposition, mais ce dernier a décliné, tout aussi poliment que fermement, l’invitation. Avant de s’envoler pour Bamako, pour assister à l’investiture du président IBK, puis New-York où il doit assister à une réunion de l’Internationale Socialiste. Laissant, à ses partenaires, la porte ouverte à des négociations avec un pouvoir qui ne fera des concessions – Ahmed, boycottiste convaincu, en est persuadé –  que si elles servent sa cause.
Que faut-il donc attendre de ce dialogue-bis ? D’après Boydiel Ould Houmeïd qui l’a répété à hue et à dia, il n’aura jamais lieu. Faut-il en déduire que la Coalition pour une Alternance Pacifique (CAP réunissant l’APP, El Wiam et Sawab) est désormais à la touche et que l’Initiative de Messaoud est morte et enterrée ? Que le pouvoir a fini par se rendre compte que des élections sans la COD ne sont pas viables ? Que l’opposition ne privilégie plus l’option de la chaise vide ? Qu’on s’achemine, enfin, vers des élections apaisées ? Ce serait aller trop vite en besogne de l’affirmer, alors que le premier round des négociations vient à peine de commencer. Des négociations qui s’annoncent âpres, tant l’opposition  va jouer serré, pour obtenir un maximum de concessions de la part d’un pouvoir qui a déjà donné le coup d’envoi du match, avant même que ses adversaires n’aient enfilé leurs tenues. Les randonnées ministérielles à l’intérieur du pays, sous forme de missions – en fait, campagne avant l’heure – continuent de plus belle ; distributions d’argent au profit des coopératives féminines, inaugurations de projets et autres promesses de réalisations : autant de cartes déjà copieusement distribuées… Sans oublier l’immixtion flagrante des généraux qui font ouvertement campagne pour le parti/Etat.
Quels résultats peut-on prévoir à l’issue de cette rencontre? Un nouveau report des élections semble, a priori, inévitable. La CENI a fixé le  9 octobre, date à partir de laquelle le dépôt des listes candidates aux élections législatives peut commencer. Une date impossible à tenir, pour une opposition qui n’a même pas encore décidé si elle va participer ou non au scrutin. Une refonte de cette même CENI, pour l’élargir à des représentants de tous les pôles politiques ; la mise en place d’un observatoire des élections, pour faire contrepoids à la puissante Direction générale des élections au ministère de l’Intérieur ; le tout sur fond de « moins d’armée et moins d’Etat » dans le processus, pour y distiller un tant soit peu d’équité entre les partis : tout cela ne se fera pas en huit jours. Certes, il reste utopique de penser qu’un pouvoir putschiste puisse jouer franc-jeu jusqu’au bout mais il est permis d’espérer. Les paris sont donc ouverts : ces négociations ne seront-elles que feu de paille ? Tout ce cinéma juste destiné à disculper ceux qui nous dirigent, une simple opportunité de clamer, une fois que l’opposition en aura claqué la porte, que c’est celle-ci qui sabote la démocratie et patati et patata ? Il n’est pas sûr que les bookmakers fassent fortune, sur ce coup-là… 
                                                                                                              Ahmed Ould Cheikh

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