Au
moment où Nouakchott se débat dans d’inextricables difficultés suites
aux pluies diluviennes qui ont fait de la ville une mare géante à ciel
ouvert ; où la capitale est menacée dans son existence même, faute de
réseau d’assainissement ; où des quartiers entiers ne sont plus
accessibles ni aux voitures encore moins aux piétons ; où le pouvoir et
la COD n’arrivent toujours pas à s’entendre sur le minimum syndical,
pour des élections apaisées et transparentes ; voilà que notre guide
éclairé nous sort, d’un de ces tours de passe-passe dont il a le secret,
un remaniement ministériel, le plus vaste que le pays ait connu depuis
le coup d’Etat du 6 août 2008. On peut désormais l’appeler ainsi, depuis
que son principal auteur l’a reconnu à Néma. A la trappe, donc, la
vieille rectification ! Un remaniement marqué par le renvoi de cinq
ministres, remplacés, évidemment, par cinq nouveaux et la permutation
d’autres. Un communiqué laconique et la messe était dite. Les recalés
peuvent aller se rhabiller pour l’hiver. Ils ne sauront jamais pourquoi
ils ont été révoqués. Pas plus qu’ils ne connurent les raisons qui
présidèrent à leur promotion. En Mauritanie, le poste de ministre est,
sans doute, le plus courtisé mais, aussi, le plus ingrat. Sous Maaouya,
il ne se passait pratiquement pas un mois sans qu’un remaniement ne soit
jeté en pâture à l’opinion, pour amuser la galerie. Après quelques mois
d’accalmie, son ex-fidèle lieutenant est en train de reprendre les
mêmes vieilles habitudes. En quatre ans, nous avons eu droit à quatre
ministres des Finances, quatre autres au Pétrole et à la Santé, trois à
l’Equipement, sans compter les éternels changements à l’Education où
quatre ministres peinent à réunir les résultats qu’une femme seule,
Nebgouha Mint Mohamed Vall, obtint en un peu plus d’un an.
Enfin,
bref : y a-t-il quelque chose d’analysable en ce chambardement
gouvernemental ? Essayons-nous à cet exercice périlleux. Si Ould Abboye,
l’ex-ministre de l’Hydraulique, semble bien avoir été emporté par le
déluge, son collègue des pêches, lui, n’est jamais entré dans la peau
d’un ministre. Sous son magistère, le ministère s’est transformé en
coquille vide. C’était un de ses conseillers, colonel dans une autre
vie, qui en a pris les commandes, négociant avec les Chinois et les
Européens, mettant son nez dans toutes les sauces. L’ancien ministre du
Pétrole et des Mines était, dit-on, un peu trop proche des miniers. Ce
qui pouvait altérer sa vision. Les deux ministres de souveraineté
(Intérieur et Justice), débarqués eux aussi, ont grillé leurs cartouches
pour un résultat nul. Ils n’ont pas pu mobiliser la communauté haratine
pour Ould Abdel Aziz, pas plus qu’ils n’ont pu contrer le président
d’IRA dans sa campagne de diabolisation du pouvoir.
Mais,
bon, tout ceci n’est que conjectures. Une grille de lecture parmi
d’autres et ne prétendant nullement à l’exactitude. L’inexplicable rôde,
avec la vanité de s’enhardir à l’expliquer. De tenter de déchiffrer ce
qui se passe dans la tête d’un homme, seul maître à bord après Dieu.
D’ailleurs, que s’explique-t-il, lui-même ? Le pays n’est, pour lui,
qu’un immense jeu de cartes. Il les bat, en tire ce qu’il veut, bluffant
même, parfois. C’est probablement ce qu’il maîtrise le mieux.
Ahmed Ould Cheikh
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