samedi 8 mars 2014

Editorial : Être ou ne pas être…



Le Forum pour la Démocratie et l’Unité (FDU) s’est ouvert le vendredi 28 février, non sans quelques soubresauts, le RFD menaçant de ne pas y prendre part. Après avoir senti le vent du boulet, les organisateurs s’en sortent avec plus de peur que de mal. Il aurait été, en effet, inconcevable qu’une manifestation de cette envergure et sur laquelle beaucoup d’espoirs sont fondés, se tienne sans le plus grand parti d’opposition. Mais cette éventualité, annoncée deux jours avant le début des travaux, n’était, en fait, qu’une manœuvre destinée à rendre à César ce qui lui appartient. Autrement dit, un peu plus de considération pour le poids de ce parti et une reconnaissance, pour son parcours dans l’opposition. Bref, il a fini par obtenir gain de cause, quelques heures avant l’ouverture de la grande messe, à l’issue d’une réunion-marathon de son bureau exécutif. Ould Daddah pouvait, désormais, présider la cérémonie d’ouverture et prononcer le discours annonçant le début du conclave. La face était sauve.
Les participants se sont, en suivant, répartis entre plusieurs ateliers, pour plancher sur la situation du pays et définir les voies et moyens d’en sortir, avant qu’il ne soit trop tard. A quoi faut-il donc s’attendre, après trois jours de palabres non-stop ? Une feuille de route pour dépasser la crise où nous débattons depuis 2008 ? Un manuel de procédures, pour des élections consensuelles et transparentes ? Un canevas de mesures urgentes, pour faire, de notre pays, un État « normal » ? Tout cela est bien beau et tout citoyen, un tant soit peu honnête, ne peut rêver mieux pour sa Nation. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Comment le pouvoir réagira-t-il aux propositions concrètes qui ne manqueront pas d’émaner du Forum ? De quels moyens disposent l’opposition, la société civile et les autres participants au FDU, pour amener celui-là à s’asseoir autour d’une table et discuter ? Pourquoi devrait-il lâcher du lest, alors qu’il a toutes les cartes en main ? Et, si jamais il faisait preuve d’un peu de volonté contraire, qui pourrait l’obliger à céder ? Certes, l’intérêt du pays est en jeu et tout le monde tirera le plus grand bénéfice à dépasser la crise qui nous plombe, depuis quelques années, mais il faut, d’abord, lever la barrière psychologique sur laquelle se brisent les meilleures volontés du monde.
Ould Abdel Aziz doit tout faire, lui, pour se départir d’un des plus pénibles défauts qui lui collent aux pieds, depuis les accords de Dakar : ne pas faire grand cas de ses engagements. Mohamed Ould Maouloud disait, récemment, dans une comparaison peu flatteuse, que Maaouya était dur en négociations mais qu’avec lui, on pouvait considérer, quand il cédait sur un point précis, que c’était acquis. Ould Abdel Aziz semble, au contraire, tout accepter d’emblée, mais au moment de passer aux actes, c’est une toute autre paire de manches… Et ce d’autant plus facilement qu’en face, son opposition s’acharne, obstinément, à ne jamais se mettre d’accord. On comprend qu’il dorme, le béat, très paisiblement sur ses deux oreilles. Faut-il donc s’apprêter, dès maintenant, à rempiler pour un nouveau mandat de cinq ans, avec ce président qui n’aura cessé de nous promettre la lune, durant six ans, pour mieux nous asservir à ses étoiles et celles de ses collègues galonnés ? C’est maintenant, à quelque quatre mois de la présidentielle, que l’opposition doit nous montrer autre chose qu’un grouillement de crabes.  Le temps presse. Chaque jour qui passe dans le combat des chefs consolide le pouvoir en place. Ce n’est pas, seulement, qu’on ne peut pas être et avoir été, c’est, très concrètement aujourd’hui, qu’il s’agit de choisir, entre être… et ne pas être.

Ahmed Ould Cheikh

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