lundi 27 janvier 2014

Editorial : Avec le temps, va, tout s’en va…


Voilà deux semaines que votre hebdomadaire préféré n’a pas paru. Deux longues semaines d’arrêt pour cause de fête du Maouloud. Un petit break qui fait parfois du bien, tant l’actualité et ses rebondissements peuvent donner le tournis. Même aux têtes bien faites. Cela dit, qu’avons-nous donc raté de si important ? Une odeur de ‘’malversation’’, dans l’affaire de la centrale dual (électricité et gaz) de Nouakchott, dont l’extension de 60 mégawatts risque fort – si ce n’est déjà fait – de ne plus être financée par la Banque Islamique de Développement (BID). Si l’on en croit l’ONG Sherpa, spécialisée dans le repérage des biens mal acquis. Et qui s’intéresse, depuis quelques temps, à notre cher pays. Où, comme vous le savez tous, il n’y a pourtant plus, depuis un certain 6 août 2008, ni gabegie, ni détournement de deniers publics, par la seule grâce de notre Rectificateur en chef. Pourquoi la seule BID, me direz-vous ? Si les autres bailleurs de fonds étaient plus regardants, sur les procédures d’attribution des marchés, on serait très haut placé, dans la liste des pays les plus corrompus de la planète, établie, chaque année, par Transparency International. On n’en est pas là encore mais le renoncement de la BID risque d’éveiller bien des soupçons.
Autre actualité « ratée » : le festival de Oualata. Comme chaque hiver, la Mauritanie se déplace, avec son chef, vers l’une des villes dites anciennes, pour assister à un carnaval. Comme disait feu Habib, ainsi va le pays là où va son président. De la musique, quelques pièces de théâtre, une exposition de produits artisanaux, des jeux traditionnels et le tour est joué. Pour ce cinéma qui dure trois à quatre jours, on mobilise des dizaines de millions et, pour cette édition, comme pour la précédente à Ouadane, « on » s’est offert le luxe d’affréter un avion – aux frais du contribuable, s’il vous plaît – pour acheminer, tous frais payés, des touristes depuis la France, pour démontrer, aux tours-operators, que nous sommes un pays « sûr ». Cette année, notre bien-aimé guide a, exceptionnellement, assisté à une soirée musicale, organisée en son honneur, où l’on a vu un laudateur particulièrement inspiré déclamer, en langue hindi, un poème sur ses innombrables qualités. Le président en a ri de bon cœur. Il avait, pourtant, toujours refusé de prêter ainsi le flanc aux flagorneurs. Maaouya l’avait systématiquement interdit, au début de son règne, mais avait fini par succomber aux charmes de la poésie, si bien que les tirades à sa gloire étaient devenues légion. Ses « visitations », à l’intérieur du pays, étaient l’occasion rêvée, pour les laudateurs, de rivaliser dans l’art de tomber le plus bas possible dans la versification reptile. Son élève serait-il en train de prendre le même chemin ?
On est, après tout, à quelques mois de la présidentielle et l’on a, parfois, besoin de quelques vers, pour stimuler son ardeur guerrière. Alors, poètes  de tout le pays, vous savez, à présent, ce qu’il vous reste à faire. On s’inquiétait, il y a peu, de ce qu’il subsistait, en notre modernité matérialiste, de votre légendaire million. Certes, la lèche n’est pas le nec plus ultra de la poésie, ni la tasse de thé de tous nos artistes. Mais, bon, on aura, au moins, un élément de comparaison, avec les productions de l’ère Ould Taya. Je fais le pari qu’on aura gagné en quantité. En qualité, j’en suis beaucoup moins certain. Hé oui, faut s’y faire, avec le temps, va, tout s’en va…
                                                                                                                  Ahmed Ould Cheikh

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