lundi 20 mai 2013

Editorial : Ah, ça ira, ça ira, ça ira…



Après un silence de plusieurs mois, les partis dits de la majorité – en fait, les partis « pro-Aziz », puisqu’on ne peut plus parler de majorité, le Parlement étant forclos depuis octobre 2011 – ont, enfin, réagi à la fameuse Initiative du président de l’Assemblée nationale. Cette médecine censée nous sortir de l’ombre à la lumière, régler la crise politique que nous vivons depuis 2008 et permettre l’organisation d’élections, libres et transparentes, à l’ombre d’un gouvernement d’union nationale. Vaste programme, comme eût dit de Gaulle ! Un précieux mais hypothétique sésame, pour un pays qui n’arrive pas à trouver le chemin de la normalité, depuis que les militaires ont décidé d’en faire leur chasse-gardée. Rien n’indique, cependant, que cette potion magique ait la moindre chance d’aboutir. L’opposition lui a donné, c’est vrai, une réponse hautement politique et globalement favorable, dans ses grandes lignes. Avait-elle, d’ailleurs, le choix ? Mais la « majorité » (?), elle, n’a rien dit. Strictement rien. Ou, plus exactement, si l’on s’en tient au communiqué sanctionnant la réunion que certains de ses partis ont tenue, la semaine dernière, avec Messaoud, un monument de langue de bois où l’on parle de bonnes « intentions », de « disponibilité » au dialogue et de démarche « importante », sans oublier de jeter quelques fleurs à l’auteur de l’Initiative. Pas un mot sur le gouvernement d’union nationale ou sur la CENI. Des choses trop sérieuses, de toute évidence, pour qu’elles leur soient confiées. Leur rôle se limite à faire de la figuration et à donner l’impression de bouger sur la scène politique. Mais c’est assez godiche pour laisser deviner le marionnettiste en chef qui tire les ficelles et rabat les cartes. Ould Abdel Aziz l’a dit et redit : il n’y a de chef que lui. Et ce n’est pas à des civils, spécialistes en retournement de boubou, qu’il confierait un aussi sensible dossier. S’il s’agit de discuter gouvernement d’union nationale ou CENI, c’est à lui qu’il faut s’adresser et non aux paravents dressés pour amuser la galerie. C’est lui qui tient les cartouches – les prend même, à l’occasion, dans le ventre – et il ne s’en servira qu’en dernier recours. Comme il l’avait déjà fait en  2009, lorsqu’il accepta gouvernement de transition et CENI, quelques jours seulement avant l’élection présidentielle, pour donner l’impression d’un scrutin libre. Alors que les dés étaient pipés Avec le résultat et la crise que l’on sait.
Echaudée par l’expérience, l’opposition retombera-t-elle dans le panneau ? Ce serait se déclarer totalement niaise et inculte, politiquement parlant. Non, elle n’acceptera plus aucune concession de façade. Rouler dans la farine, ça suffit d’une fois ! Mais, pour l’instant, le problème n’est pas là. Le pays ne peut pas se permettre de rester à l’arrêt, retenant son souffle, à attendre que ces messieurs-dames veuillent bien trouver une quelconque – mais vraie – solution politique. A y regarder de plus près, on a comme l’impression que le pouvoir joue la montre, fort de sa « majorité » ( ?) et campant sur ses lauriers. C’est à se demander, d’ailleurs, si l’initiative de Messaoud ne fait pas son jeu, en se jetant en pâture à une opposition en panne d’idées. En attendant qu’elle la décortique, Aziz, lui, ne perd pas son temps. Il fait main basse sur le pays, place ses pions et règle ses comptes. Quand son manège finira, il se réveillera, un beau jour, en déclarant tout de go : « Allez, populo, à la votation ! » Et vous croyez, vraiment que, comme le dit la célèbre chanson de la Révolution française, Ah, ça ira, ça ira, ça ira ?
                                                                                                                         Ahmed Ould Cheikh

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