L’opposition a marché, la semaine dernière. De
l’ancienne Maison des jeunes à la mosquée Ibn Abass où elle a tenu meeting. Ses
principaux leaders ont parlé. Dénoncé la morosité ambiante, évoqué la crise
politique, la cherté de la vie et même fait écouter, à leurs militants, les
enregistrements d’Ould Abdel Aziz en train de négocier une affaire louche avec
un prétendu irakien au Ghana. C’est à croire que notre opposition n’a de
programme que le sujet de l’heure : le refus du dialogue avec une partie
d’elle-même, la balle amie qui a failli coûter la vie au président, la guerre
au Mali, l’affaire Bouamatou et, last but no least, le Ghanagate. Chaque fois,
c’est le même itinéraire et la même rengaine. Pas de quoi inquiéter un
président, jouissant d’une confortable majorité au Parlement, verrouillant
l’armée et riant sous cape, au spectacle de l’opposition crier tout son saoul,
sans que cela ne l’ébranle d’un pouce.
Il aurait pu, pourtant, avoir des sueurs froides.
Lorsque le Printemps arabe frappait à nos portes ou lorsqu’il gisait sur le lit
d’un hôpital parisien. Mais, encore une fois, l’opposition a raté le coche. Elle
a été frileuse, la première fois, pour éviter, dit-elle, que le pays ne sombre
dans l’instabilité. En fait, rien n’indique qu’elle pouvait mobiliser son monde
pour cette cause et que ses militants étaient prêts au sacrifice nécessaire
pour la réussite d’une révolution. Lors de la vacance du pouvoir, elle a décidé,
tout simplement, de signer un cessez-le-feu avec… elle-même, en attendant que
le président se rétablisse et revienne plus hardi que jamais. L’occasion se
répétera-t-elle ? On peut légitimement en douter.
Faut-il en déduire que nous avons, pour paraphraser
Guy Mollet parlant en 1956 de la droite française, l’opposition la plus bête du
monde ? Sinon, comment expliquer que, face à un pouvoir empêtré dans ses
propres turpitudes et qui multiplie erreurs sur erreurs, elle n’arrive pas à
tirer son épingle du jeu ? Certes, son péché originel a été d’avoir signé
les accords de Dakar, de compétir avec un putschiste et de le reconnaître mais
elle a eu d’autres occasions de se racheter par la suite. Qu’elle a toutes
ratées. Il est donc normal qu’elle refuse d’aller aux élections législatives et
municipales, pour ne pas donner, à son adversaire, un nouveau bâton pour la
battre. Et se donner, ainsi, un nouveau crédit à moindre frais.
La politique de la chaise vide peut, parfois, se
révéler fatale mais il arrive, en certains cas, qu’elle devienne la solution.
Face à un pouvoir juge et partie, qui a toutes les cartes en main et ne veut
rien lâcher pour s’offrir une nouvelle majorité, la seule issue serait de le
laisser jouer tout seul. Donner le coup d’envoi et siffler la fin du match.
Pour montrer, à la face du monde, qu’on ne peut se prétendre démocrate et ne
pas respecter un minimum de règles. Mais, au-delà du bout de ce nez, de cette
révélation de La Palice, quoi d’autre ? Le vague espoir que la Nature a
horreur du vide ?
Ahmed Ould Cheikh
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