dimanche 22 janvier 2012

Editorial : Que Dieu nous garde!

Ça y est! Les parlementaires de la majorité sont, enfin, sortis de leur torpeur maladive. C’était à l’occasion d’une conférence de presse, tenue, jeudi dernier, dans les locaux de l’Assemblée nationale. Parmi le parterrre choisi pour flinguer l’opposition, figuraient trois députés ayant soutenu, corps et âme, le coup d’Etat du 6 août 2008 et un transfuge sur le tard, plus zélé, aujourd’hui, que ceux-là mêmes qui ont applaudi le renversement d’un président démocratiquement élu. Tous n’avaient qu’un seul mot à la bouche: l’opposition ne veut pas voir ce que le pouvoir a réalisé et en arrive, même, à inciter à la violence. El Khalil Ould Tiyeb, qui sait de quoi il parle, s’en est pris à ceux qui cherchent des intérêts limités et n’ont pas de principes fixes. Lui, en tout cas, ne poursuit jamais ses propres intérêts, comme lorsqu’il se battait, becs et ongles, pour que Messaoud rallie Sidioca, en 2007, au détriment du candidat de l’opposition, ou lorsqu’il a quitté l’APP dont les voix l’avait, pourtant, élu, pour rejoindre l’UPR. Pour les beaux yeux d’Ould Abdel Aziz, peut-être?
Mais la question, essentielle, qui taraude tous les esprits, sur la légalité ou non de l’actuelle session parlementaire, alors que le mandat des députés a expiré, n’a eu droit qu’à quelques mots. Pour un de nos trois larrons, «la prolongation, jusqu’en avril prochain, du mandat du Parlement a été avalisée, par le Conseil constitutionnel, et, si les députés de l’opposition contestent cette légalité, pourquoi continuent-ils à percevoir leurs salaires?». Notre valeureux député n’a, peut-être, pas eu connaissance de l’avis, sur la question, de l’éminent juriste qu’est Lô Gourmo, lors du colloque organisé, récemment, par l’institution de l’opposition. Selon ce spécialiste en droit, «le Conseil constitutionnel ne pouvait donner mandat, à l’Exécutif, de modifier le calendrier électoral. Aucune autorité ne peut inciter une autre à violer la Constitution. Ensuite, encore faut-il, pour donner son avis, que le Conseil constitutionnel en ait la compétence. Cet avis ne change rien a l’inconstitutionnalité, il n’a pas l’autorité d’une décision constitutionnelle [...] Lorsque le mois de novembre arrive et que les élections n’ont pas été organisées, les pouvoirs de l’assemblée expirent». Et l’article 51 de la constitution stipule: «est nulle toute délibération hors du temps des sessions et hors des lieux de séances».
En principe, ce n’est pas parce qu’on est soutien d’un pouvoir qu’on peut fouler la Constitution en vertu de laquelle on est élu. Le mandat du Parlement est a-che-vé, qu’on se le dise, une bonne fois pour toutes. On aura tout vu, dans cette Mauritanie nouvelle! Un militaire qui renverse un président parce que celui-ci ne veut plus lui confier sa sécurité. Des parlementaires qui soutiennent un putsch. Un président qui reconnait avoir violé la loi de finances, en autorisant des dépenses extra-budgétaires. Un Premier ministre qui refuse de répondre aux questions des députés. Un Trésor public qui fait main basse sur les fonds de la Communauté urbaine, sans autre forme de procès. Des militants anti-esclavagistes qu’on jette en prison, parce qu’ils ont dénoncé des pratiques punies par la loi. Et la liste n’est pas exhaustive. Chacun pourra y mettre du sien. Pourtant, on n’en est qu’à trois ans et demi. Que serons, alors, dans sept ans et demi, à l’issue du deuxième mandat d’Ould Abdel Aziz? Que Dieu nous garde!
Ahmed Ould Cheikh

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