Que
n’a-t-on pas dit de Mandela ? L’homme par qui le miracle est arrivé.
Celui qui a brisé les chaînes de l’Apartheid, qui s’est sacrifié pour
son pays et qui, après vingt-sept ans de prison, a toujours refusé de
prôner la violence. Pardon, réconciliation, paix des cœurs étaient ses
leitmotivs. Et il a réussi le pari – ô combien insensé, à l’époque ! – de faire passer l’Afrique du Sud d’un Etat raciste à
une république multiraciale. S’inspirant du Mahatma Gandhi, l’apôtre de
la non-violence, il a pardonné aux bourreaux qui lui ont fait tant de
mal, ainsi qu’à son pays, faisant, de Frederik De Klerk, le président de
l’époque, son premier vice-président. Une sorte de passage de témoin,
de transition en douceur, preuve de l’infinie sagesse de cet homme hors
du commun. Et l’Histoire lui a donné raison. L’Afrique du Sud a enterré
son passé douloureux, en douceur, sans haine ni rancune, et caracole en
tête des pays africains, en matière de développement. Il en sera
toujours ainsi, lorsque les pays, face aux difficultés de tous ordres,
rejettent les méthodes expéditives, privilégient le consensus, et que
leurs peuples, réellement libres de choisir, préfèrent des dirigeants
véritablement éclairés, au détriment de sombres démagogues, jouant aux apprentis démocrates.
Après
le départ d’Ould Taya, en 2005, nous avons hérité, au lieu d’un Mandela
dont nous avions tant besoin, non pas un, mais plusieurs présidents
militaires qui gouvernaient en même temps. Deux années durant, les
années de braise que le pays avait vécues, entre 1989 et 1991, sont
passées par pertes et profits. Ni le passif humanitaire ni la question,
lancinante, de l’esclavage ne furent effleurés par ces
militaires qui ne voulaient, surtout pas, ouvrir la boîte de Pandore
qui risquait de les éclabousser. Il a fallu attendre l’arrivée de
Sidioca, en 2007, pour que ces dossiers soient ouverts mais on ne lui
laissera pas le temps d’achever les chantiers et on lui mettra
suffisamment de bâtons dans les roues pour qu’il n’aille pas très loin
dans leurs règlements. Depuis, c’est à doses homéopathiques et au jour
le jour que les problèmes sont abordés. Au lieu d’une vision d’ensemble
qui nous permettrait de panser, une fois pour toutes, ces plaies encore béantes. Certes, n’est pas Mandela qui veut. Pourtant, il nous en faut un. Pour nous retrouver. Pour discuter entre nous. Pour nous insuffler le courage de pardonner. Pour
se dire que, finalement, tout peut se régler par le dialogue. Que nous
n’avons pas d’autre pays que la Mauritanie. Que nous sommes tous les
mêmes. Que chacun de nous a besoin de l’autre. Le passif humanitaire et
l’esclavage ne sont pas plus abjects que l’apartheid. Les sud-africains
se sont pourtant retrouvés autour d’une table et ont tourné la page,
sans haine ni passion. Pourquoi pas nous ?
Ahmed Ould Cheikh
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