Le
premier tour des élections législatives et municipales du 23 novembre a
vécu. Dans un désordre absolu, une absence totale de transparence et
une organisation qui frise l’amateurisme. Que n’a-t-on pas dit, pour
accabler une pauvre commission électorale à qui l’on avait confié la
mission quasi-impossible d’organiser quatre scrutins en un seul et un
temps record ? Il ne s’agit nullement de défendre une CENI victime de
son propre zèle qui pensait, naïvement peut-être, qu’avec les maigres
moyens dont elle disposait, elle pouvait parvenir à ses objectifs. Avec,
à la clé, de l’argent parti à vau-l’eau et un scrutin que tout le
monde, même ceux qui l’ont gagné, voue aux gémonies. Une sorte d’entente
illicite entre les politiques en course à qui gagnera le plus de
députés et de maires, tout en fustigeant la structure qui l’organisé, de
A à Z. Chacun y est allé de son couplet. Jemil Mansour a affirmé que la
Mauritanie n’avait jamais connu une élection aussi désatreuse. Boydiel
s’est dit outré par les manquements de la CENI qui auraient, surtout,
porté préjudice à son parti. Messaoud a réitéré ses griefs contre une
structure qu’il ne porte pas spécialement dans son cœur. Les trois ont
même menacé de boycotter le second tour. Mais, rassurez-vous, seulement
du bout des lèvres. On ne crache pas sur une dizaine de députés,
quelques maires, un statut d’opposant et une subvention publique qui
bouchera les trous laissés vacants par le tarissement de certaines
sources. Une façon, aussi, de se refaire une virginité politique à
moindre frais. On ne s’engage pas dans telle aventure, contre l’avis de
ses amis de l’opposition, pour s’arrêter au milieu du gué et reconnaître
qu’on a fait fausse route. Continuer, donc, au risque de se noyer ? Ou
faire amende honorable et ne plus cautionner ce que tous qualifient de
mascarade ? De toute évidence, ceux qui ont participé au scrutin du 23
novembre n’en ont, apparemment pas, compris l’enjeu véritable, pour le
pouvoir. Qui ne se serait jamais aventuré à organiser une élection sans
suffisamment de partis de l’opposition pour lui donner un semblant de
crédibilité. Et se serait, alors, retrouvé dans l’obligation de lâcher
du lest et de négocier. Tous ces messieurs-dames seraient ainsi, avec
les partis de la COD, en position de force pour arracher, au pouvoir, un
maximum de concessions. Ont-ils cru pouvoir privilégier leurs intérêts
et ceux de leurs partis, au détriment de celui de l’opposition et,
au-delà, du pays ?
De
telles lézardes, dans le mur de l’opposition, ont toujours profité au
pouvoir qui ne se prive pas de les exploiter au maximum. Comme en 2007,
lorsqu’il obtient le soutien de Messaoud au candidat soutenu par la
junte militaire. Ou 2008, quand Ould Daddah convint que le coup d’Etat
d’Ould Abdel Aziz n’était qu’une « rectification ». 2013 et nous voilà
sous le joug d’une énième incurie de notre opposition, fidèle miroir de
celle du pouvoir. Les peuples, dit-on, n’ont que les dirigeants qu’ils
méritent. Etant entendu que le vocable «dirigeants» englobe pouvoir et
opposition, il va sans dire que nous sommes très mal lotis. Une certaine
majorité d’électeurs – 75% d’entre eux, selon la CENI – continuera,
donc, à parer au plus pressé. Flairer l’odeur de la soupe et suivre la
direction du vent. Gens du désert, ne sommes-nous pas passés maîtres en
l’art de la survie ? Chacun pour soi et Dieu pour tous, une nation de
bric et de broc, tout en micmac et compagnie, et cahin-caha, tieb-tieb
démocratie pour de tieb-tieb démocrates...
Ahmed Ould Cheikh
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