Voila
douze jours que la campagne électorale pour les élections législatives
et municipales du 23 novembre prochain est lancée. Douze jours de
bruits, de défilés motorisés et de meetings. Aucun programme politique
ni débat d’idées, encore moins confrontation entre les candidats. Comme
s’il ne s’agissait que d’un tintamarre destiné à couvrir l’incurie des
partis et de leurs candidats. On a, certes, parlé. Parfois même, un peu
trop. De mécontentements, de nomadisme (pas celui des élus, désormais
prohibé par la loi) mais celui des politiques qui s’accrochent, comme
ils peuvent, de partis fondés à partir de rien, d’autres volatisés en
fumée, de ralliements – une manifestation courante de la politique du
ventre que les Mauritaniens pratiquent à la perfection et qui trouve ses
lettres de noblesse au cours des campagnes électorales. Même si l’enjeu
de celle-ci diminue fortement l’impact et, donc, l’utilité de ces
girouettes. Pour attirer un électeur de plus en plus insaisissable, les
partis n’hésitent plus à utiliser les plus faux et saugrenus slogans.
« Votez pour les ambassadeurs du Prophète Mohamed, PSL », écrit l’un
d’eux. « Pour la liste des oulémas » (docteurs en théologie), affiche un
autre. Un parti est même allé jusqu’à demander, aux électeurs, de
choisir son candidat, « prix Nobel de physique en 2004 ». Du n’importe
quoi ! Comment pourrait-il en être autrement, quand on sait qu’une fois
exclus les trois partis de l’opposition dite dialoguiste, tous les
autres se réclament du président de la République ? Et exagèrent dans la
mise en relief de ses photos, dans les tentes, les affiches et sur les
voitures. La CENi avait pourtant mis en garde contre l’utilisation des
symboles de l’Etat, dont son chef, dans le but d’attirer ou d’intimider
les électeurs. Mais personne n’en a cure, apparemment. Comme si de rien
n’était. La course vers les bonnes grâces de notre guide éclairé
continue de plus belle. On se réclame de lui à l’UPR, ce qui est, somme
toute, normal, mais aussi dans les partis satellites qui ont reçu des
fournées de mécontents qui refusent de couper les ponts et veulent
rester dans le giron de la majorité présidentielle. Un air de déjà vu,
avec le PRDS et autres UDP ou RDU. L’argent en moins. Le nerf de la
guerre est, de fait, le grand absent de cette campagne, justifiant
amplement sa morosité. Voilà pourquoi le pouvoir s’est retrouvé dans
l’obligation de venir à la rescousse des partis en campagne. Une
première, en démocratie. Chaque parti recevra un pécule calculé selon le
nombre de listes candidates qu’il a déposées. Une corruption qui ne dit
pas son nom. On peut comprendre que les formations politiques soient
financées en fonction de leurs résultats mais qu’on dilapide ainsi
l’argent public est injustifiable. On aura tout vu, dans cette
Mauritanie nouvelle. Un président qui encourage ses soutiens à aller
vers d’autres partis que le sien. Un commerçant qui rachète un parti et
vers lesquels on afflue, parce qu’il bénéficie de liens de parenté
opportuns. Des candidats qui jettent leur dévolu sur des partis dont ils
n’ont jamais entendu parler. Et enfin des parachutes, pas si dorés que
ça, pour des parachutés qui risquent de se ramasser. La Mauritanie
nouvelle, vous dis-je.
Ahmed Ould Cheikh
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