Après quarante jours de convalescence en France,
Ould Abdel Aziz est, finalement, rentré le 24 novembre à Nouakchott… avant de
repartir, moins d’une semaine après, reprendre ses soins dans la capitale
française. Comme s’il mettait un point d’honneur à être présent le jour de la
fête de l’Indépendance. Pour faire taire l’opposition qui criait à la vacance
du pouvoir et rassurer des partisans qui ne vendaient pas chère de sa peau.
Leur chef de file, l’UPR, le parti qu’il a pourtant fondé de rien, multipliait,
certes, les communiqués et les réunions, pour tenter d’entretenir la flamme, mais,
en l’absence du chef, le ressort semblait cassé. Ce n’était pas la grande
affluence, dans les commissions chargées de maintenir les populations en haleine
d’un accueil toujours annoncé comme incessamment et invariablement reporté. Certains se
faisaient porter pâles, pour ne pas assister aux réunions. Ce n’est qu’après
l’apparition du président avec son médecin, puis à l’Elysée, que tout le monde
a rappliqué, dare-dare, pour ne pas être en reste. Ce fut alors la classique effusion
de sentiments, de slogans et de banderoles, pour souhaiter la bienvenue au
Rectificateur enfin rectifié, remercier Allah pour sa guérison, lui souhaiter
bonne santé et longue vie, le tout sur fond de photos géantes. On se serait cru
aisément en Irak ou en Syrie, au plus fort des régimes de Saddam ou d’Assad,
lorsque le culte de la personnalité était poussé à son paroxysme. Notre
président, imbu de lui-même et croyant fermement en sa mission de sauveur,
devait se délecter, en son for intérieur, de tant de « sincérité »
exhibée par ceux-là mêmes qu’il fustige à la moindre occasion. La secousse
qu’il vient de subir l’aurait-elle changé au point qu’il se prenne, désormais,
pour le guide sans lequel son peuple bédouin
reviendrait au temps des ténèbres ? A l’écouter, lors de la mini-conférence
de presse qu’il a animée, jeudi soir, on n’en serait pas loin. Sans la
Rectification d’août 2008, le pays ne serait plus là. Pfuitt ! Parti en
fumée, sous l’effet conjuguée des prédateurs et des terroristes ! Avec
lui, les voleurs sont sevrés et les islamistes boutés hors du territoire. Le
tout enrobé dans l’éternelle litanie : la situation économique n’a jamais
été aussi bonne, les réserves en devises atteignent des records, les frontières
sont sécurisées. Mais pas un mot sur le chômage qui fait des ravages, sur le
népotisme érigé en système, sur les institutions frappées de forclusion. Pire,
il a évoqué les attaques contre un homme politique et un journaliste sans les
condamner ouvertement, se contentant de dire qu’il est, lui-même, l’objet de
quotidiennes attaques verbales. Il a, peut-être, oublié qu’il est président
d’un pays prétendu démocratique et peut, de ce fait, être attaqué de partout.
Tout comme il a oublié que l’ITS (Impôt sur les Traitements et Salaires) ne
peut pas être supprimé, que le bac de physique-chimie n’existe pas et que le
parti Al Moustaghbel a été reconnu, de fait.
Mais ce serait trop demander, à un convalescent, de
tout retenir. Surtout que, dans une vie antérieure, il était militaire.
Laissons-le se rétablir le temps qu’il faut. Et plus, affinités obligent :
il a déjà passé quarante jours hors du pays et celui-ci ne s’en est porté que mieux.
Au moins, le prix du gasoil n’a pas augmenté, durant cette période. Pourvu que
ça dure !
Ahmed Ould Cheikh
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