Pour
le troisième anniversaire de son investiture à la tête de l’Etat, Ould Abdel
Aziz a choisi, cette année, d’aller faire son show à Atar. Depuis plusieurs
jours, c’est le branlebas de combat, dans cette ville sortie, soudainement, de
sa torpeur ramadanesque. Les organes de presse officiels, le protocole d’Etat,
la sécurité, les hauts responsables, les applaudisseurs de partout se sont passé
le mot, pour donner, au président, l’illusion que tout va bien dans le meilleur
des mondes et que les citoyens sont unanimes, dans leur soutien à sa politique
« éclairée ». C’est donc très confiant, ce dimanche 5 août vers 23
heures 30 mn, qu’Ould Abdel Aziz se présente à la tribune officielle, dressée
au stade d’Atar pour l’occasion. Rapidement, l’ambiance se gâte. Les
applaudisseurs, recrutés pour l’occasion, donnent de la voix, l’empêchant de
continuer son exposé. Et quelques militants de l’opposition, infiltrés, crient
des slogans hostiles. Ils seront rapidement maîtrisés. Mais le mal est fait.
Donnant l’impression de tendre l’oreille à ce qui se dit dans le public, il
perd son assurance. Il commence son exposé par un long monologue sur la
situation économique, donne des chiffres reluisants, s’empêtre dans des
comparaisons, hésite sur les montants. Il parle de l’accord de pêche avec
l’Union européenne, omettant volontairement celui, léonin, accordé aux Chinois,
de l’électricité, de l’eau qui coule, à flots, dans tous les coins du pays, du
nombre d’aides-soignants recrutés, l’année passée. Il nous sort, une nouvelle
fois, trouvaille du siècle, l’inadéquation formation/emploi qui explique, selon
lui, le « faux » chômage qui frappe la jeunesse. Mais, s’étonne un
journaliste, « cette situation économique que vous qualifiez d’excellente
n’a aucun impact sur la pauvreté et n’a pas résorbé le chômage, monsieur le
président ». Tout est dit.
Sur
le plan politique, Ould Abdel Aziz n’a pas dérogé à la règle. Pour lui, il n’y
aucune crise politique, seulement de la médisance. L’opposition veut accéder au
pouvoir ? Seulement par la voix des urnes, sans préciser s’il faut un coup d’Etat avant. « Dégage ! »
n’a jamais fait partir personne – Ben Ali, Moubarak, Kadhafi, vous êtes
où ? – La proposition de Messaoud pour un gouvernement d’union nationale, éludée.
Le dialogue ? Il n’a pas échoué. Ses résultats sont visibles et les
élections auront lieu bientôt. La question nationale ? Le passif
humanitaire a été réglé et l’enrôlement se passe dans les meilleures
conditions. La répression policière ? Ceux qui organisent des marches sans
autorisation administrative s’exposent à des sanctions et, comme aux USA ou en
Suède (sic !), ils sont réprimés et peuvent même perdre la vie. Aucun mot
de compassion pour les familles des victimes, ni regret ni remords. La grâce de
Biram ? « Ne pas perdre espoir », répond le maître, ignorant sans
doute qu’on ne gracie que les condamnés…
Concernant
le Mali, Ould Abdel Aziz a écarté toute intervention militaire de la Mauritanie, dans le
nord de ce pays désormais aux mains des jihadistes. Une position raisonnable,
quand on sait que Sarkozy, qui le poussait à traquer AQMI au-delà de ses
frontières, avec les résultats qu’on sait, a passé la main à un socialiste ne
manifestant aucun empressement à collaborer avec son pouvoir.
Par
contre, le président n’a pas dit un mot sur la justice, dont l’état de
déliquescence dépasse l’entendement, les marchés douteux, l’enrichissement de
ses proches, les agréments bancaires délivrés à sa parentèle.
Pour
ce troisième one-man-show, on aurait aimé voir un président décontracté, ouvert,
n’ayant rien à cacher et répondant à toutes les interrogations. On a eu un
homme crispé, campant sur ses positions et ne reconnaissant aucune faute. Que
dit l’article 1 du règlement militaire ? Que le chef a toujours raison.
Rompez !
Ahmed Ould Cheikh
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