mercredi 12 janvier 2011

Editorial : Les faits sont têtus

Avec la fin de la session parlementaire, au cours de laquelle les députés de l’opposition et d’autres, peu nombreux, il est vrai, de la majorité, ont fait feu de tout bois, fustigeant l’action du gouvernement, on croyait que la tension allait baisser un peu. L’intervention du Premier ministre, lors de la dernière journée de cette session, le vendredi 7 décembre, et la sortie d’Ahmed Ould Daddah, au cours d’une conférence de presse tenue une journée auparavant, ont remis le feu aux poudres. Selon le chef de file de l’opposition, entre autres problèmes dont souffre le pays, «l'absence d'une politique économique rigoureuse a conduit à une anarchie libérale, à l'issue de laquelle les prix sont montés et le chômage a augmenté». Pour toute réponse, le gouvernement demande aux commerçants de monter au créneau. La fédération du Commerce, affiliée au Patronat, tient un point de presse. Tous ses adhérents, ou presque, étaient là, s’apitoyant sur leur sort, les mines patibulaires, l’air tellement sérieux qu’on croyait à un enterrement. Pour nous déclarer, sans honte, qu’ils se saignent aux quatre veines, pour continuer à approvisionner le marché national, que les marges bénéficiaires sont tellement réduites qu’ils en perdent, presque, de l’argent et que les prix de nos denrées sont plus bas que dans les pays voisins. L’éternelle litanie que tout le monde répète à l’envi, pour justifier nos malheurs, oubliant de comparer, avec ceux de ces pays, nos niveaux de salaire, la qualité de nos systèmes éducatif et de santé pour ne citer que ces exemples.
L’intervention du Premier ministre, venu à l’Assemblée pour répondre à une question écrite du député RFD, Yacoub Ould Moine, sur le recul de la Mauritanie, dans le dernier rapport de l’ONG Transparency International, fut l’occasion, pour Ould Mohamed Laghdaf, de prononcer un discours à la Castro, monotone comme pas un, qui a fait dormir aussi bien les députés présents que les téléspectateurs et les auditeurs. Sur le registre classique «Nous avons fait et nous ferons», il a parlé de tout, sans donner réponse à la question sur laquelle il a été interpellé. Et évitant, même, de donner la réplique à ceux, parmi les représentants du peuple, qui l’ont interrogé sur certains points.
Une sortie que les députés de l’opposition n’ont que très modérément appréciée. Selon eux, quoiqu’en dise Ould Mohamed Laghdaf, les faits sont têtus: Entre 2006 et 2010, la Mauritanie a reculé de 60 points, si l’on en croit le dernier rapport de Transparency International sur la corruption dans le monde, malgré le discours officiel sur la lutte contre la gabegie qui, selon le premier de nos ministres, a donné des résultats «probants». En envoyant certains prétendus gabegistes en prison pour laisser d’autres plus libres de leur mouvement?
Plus grave encore, aucun rapport d’audit du Fonds pétrolier n’a été publié, concernant la gestion postérieure à 2006, malgré les efforts, louables, déployés par la Coalition mauritanienne «Publiez ce que vous payez», qui n’a cessé d’attirer l’attention des pouvoirs publics sur la nécessité de poursuivre le devoir de transparence en ce domaine. En outre, ni l’exercice 2007 ni celui de 2008 encore moins de 2009 n’ont fait l’objet d’un audit indépendant, sur les industries extractives, d’où les inquiétudes exprimées, dans la page consacrée, à notre pays, sur son site web (www.eitransparency.org), par le secrétariat international de l’Initiative de Transparence des Industries Extractives, au sujet des retards observés depuis 2007, dans le processus de mise en œuvre de l’Initiative en Mauritanie.
Pour toute réaction, l’UPR vous dira, demain, dans un communiqué, que cette Initiative fait partie de la coalition de l’opposition et refuse de voir les «réalisations grandioses» accomplies, depuis le mouvement rectificatif du 6 août 2008, avec, à sa tête, le président des (de plus en plus) pauvres.

Ahmed Ould Cheikh

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