jeudi 17 octobre 2024
Editorial: Douce Françafrique…
Monsieur Robert Bourgi, le célèbre avocat et conseiller politique franco-libanais, nous en apprend de bien belles ! Dans son dernier ouvrage : « Ils savent que je sais tout : Ma vie en Françafrique », Max Milo Éditions, Paris, 2024 ; l’élève du mythique Jacques Foccart se prend à sortir quelques secrets du placard. Oh, pas tous, évidemment, le monsieur connaît les limites des indiscrétions fuitables sans trop de risques… Mais tout de même assez pour nous instruire, nous, pauvres Mauritaniens, combien le sort d’une république africainepouvait être scellé, il y a peu encore – plus maintenant ? – par des conversations de salon, de Saint-Tropez à l’Élysée, en passant par quelque établissement huppé, à l’instar du « Bristol », « un monde d’élégance et de volupté, pour des séjours d’exception », comme le souligne sa présentation sur Google…
C’est donc en vacances dorées sur la Côte d’Azur que Robert Bourgi rencontra, quelques jours après le coup d’État d’Ould Abdel Aziz, l’homme d’affaires Mohamed ould Bouamatou
dépêché par son cousin pour prêcher la bonne cause des militaires « soutenus par les grandes tentes mauritaniennes », expliquera plus tard le général Mohamed Ould Ghazouani, le chef d’état-major de l’armée limogé par le président déchu, «dont l’impopularité a causé sa perte. » Une argumentation on ne peut plus simpliste mais tout de même convaincante, semble-t-il, puisqu’après avoir acquiescé à l’idée que « le chef d’état-major de l’armée mauritanienne, le général Mohamed ould Ghazouani, qui avait été révoqué par le président défait, soit reçu à l’Élysée », l’habile avocat libanais obtint un entretien dudit général avec Claude Guéant, secrétaire général de lElysée.
Alors conseiller « Afrique » du Palais français, Bruno Joubert fut convié à se joindre à l’entrevue et présenta clairement son opinion : « L’Union européenne rejette le pouvoir de Mohamed ould Abdel Aziz. Il n’est pas pensable que le président de la République puisse accepter cette situation. En outre, vous faites partie, général Mohamed ould Ghazouani, de ceux qui ont précipité la chute du président Abdallahi. – Ne me parlez pas sur ce ton ! », répliqua, ulcéré, Ould Ghazouani, avant que Claude Guéant ne se rangeât à l’avis des autres personnes présentes qui jugeaient l’impopularité responsable de la chute de notre premier président démocratiquement élu. Une majorité de politesse… ou d’intéressements ? Bourgi ne nous en a rien dit…
Puis on partit déjeuner au Bristol… où les dés, entre la poire et le fromage, furent pratiquement jetés : Joubert bientôt « déplacé » de sa fonction à l’Élysée, Ghazouaniréinvité à discuter en 2009 avec Guéant et divers hauts cadres de l’État français – problématique djihadiste au Sahel oblige… – le colonel Kadhafi « encouragé » en suivant à faire reconnaître le nouveau régime mauritanien par l’Union Africaine, Ould Abdel Aziz reçu par le président Sarkozy quatre mois plus tard, soit une sorte de blanc-seing officiel quelques semaines à peine avant une élection présidentielle ainsi courue d’avance… Quant à la disgrâce de Mohamed ould Bouamatou, en 2010, elle n’est peut-être pas en rapport avec tous variablement gracieux entrechats mais n’en confirme pas moins ce que la destitution de Sidi ould Cheikh Abdallahi nous avait déjà appris : l’ingratitude monumentale de Mohamed ould Abdel Aziz et ce que cela révélait de son avidité sans frein…
Ahmed ould Cheikh
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