vendredi 4 mars 2011

Editorial : Gare aux réveils !

Humant la bourrasque qui agite le monde arabe, depuis la fin de l’année dernière, qui a, déjà, à son actif, des pouvoirs qu’on croyait solidement assis, au moins sur le plan sécuritaire, (Tunisie et Egypte) et qui est en train d’emporter un autre régime de terreur, celui de Kadhafi, une partie de la jeunesse mauritanienne a essayé de prendre l’air du temps. Organisés via Facebook, le réseau social Internet, quelques-uns se sont donné rendez-vous, le vendredi 25 février, pour dénoncer la détérioration des conditions de vie des populations, demander du travail et dire non aux inégalités. La manifestation n’a pas drainé grand monde, juste quelques centaines de jeunes, munis de banderoles. Mais l’essentiel n’était pas là. Les mouvements de masse ont toujours commencé ainsi. Et toujours dans des endroits symboliques. Comme la place des anciens blocs, qui vient d’être cédée à de gros bonnets de la finance, moyennant des sommes qui donnent le tournis. Dites à de pauvres citoyens qui ne voient poindre aucun espoir à l’horizon et dont la vie de tous les jours ressemble, de plus en plus, à un parcours de combattant, que cette place a été vendue à plus de cinq milliards et demi d’ouguiyas et vous verrez la tête qu’ils feront. Ils vous diront, certainement, que l’Etat a fait une bonne affaire mais se demanderont en quoi cela améliorera leur misérable quotidien.
Toujours est-il que la menace a été prise au sérieux, par le pouvoir. Et il y a de quoi avoir des sueurs froides. Quand elle veut se manifester, la volonté populaire devient, assez souvent, incontrôlable. Des exemples récents l’ont démontré et des régimes, autrement plus solides, n’ont résisté que quelques jours avant de s’effondrer. Un comité de crise, composé du président et de son Premier ministre (excusez du peu !), s’est réuni, en urgence, la veille de la manif, pour discuter des mesures à annoncer et couper, ainsi, l’herbe sous les pieds des jeunes «égarés» qui allaient manifester le lendemain et qui n’ont, toujours pas, assimilé la Mauritanie nouvelle. Ould Mohamed Laghdaf s’est, en suivant, rendu dans un quartier périphérique de Nouakchott, pour lancer les travaux d’une route de quelques kilomètres. Compte-rendu, par l’agence officielle d’information, de ce moment «historique»: «Le Premier ministre a transmis, aux populations, les salutations du président de la République, monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz, réaffirmant la détermination du gouvernement à assurer la justice et la transparence, dans l'attribution des terrains aux habitants de ces quartiers, ainsi qu'à trouver des solutions, appropriées, à leurs problèmes quotidiens. Il a souligné, également, que le président de la République a réitéré son soutien aux démunis dans le pays et aux couches qui étaient marginalisées, sous les régimes antérieurs, aussi bien au niveau de la scolarisation que pour l'électrification, ajoutant que les engagements du président de la République, dans ce domaine, ont été traduits par des actes. Le Premier ministre a affirmé que le pays dispose d'importants moyens qui seront distribués, de manière équitable et juste, à tous les Mauritaniens qui en profiteront, soulignant l'intérêt qu'accorde le régime, dans ce domaine, aux couches marginalisées.»
Les populations qui ont assisté à l’événement sont restées bouche bée, devant tant de sincérité, de bonne volonté et de détermination. Elles en étaient, même, à se demander de qui ce monsieur en costume, comme venu d’un autre monde, parlait. Justice, transparence, solutions aux problèmes, scolarisation, électrification, soutien aux démunis, la coupe est pleine. Chacun peut, désormais, rentrer chez lui, le ventre plein de… bonnes paroles, et dormir. Mais attention aux réveils brutaux!

Ahmed Ould Cheikh

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