mercredi 29 octobre 2025

Editorial: Ces « justiciers » acharnés derrière leurs claviers

 Ils sont camionneurs, livreurs de pizzas, plongeurs dans les restaurants, taximen, gardiens d’immeubles que l’ignorance crasse a chassés de leur pays. Les autres, locaux ceux-là, sont soit chômeurs désœuvrés, soit délinquants en rupture de ban, soit aigris par une vie qui a souri à d’autres. Tous ont un point commun : l’acharnement. Dès qu’une information, même fausse, est mise en ligne par un membre de ce clan, c’est le branle-bas de combat. Tous s’y mettent à fond. S’érigeant en politologues, économistes, statisticiens ou sociologues, ils inondent la toile d’analyses si peu brillantes et… tout y passe : les plus basses insultes, les plus gros mots et les plus ignominieuses bêtises ! Même le président de la République n’est pas épargné par ce torrent de boue immonde ! Il encaisse, tous les jours, invectives, injures et quolibets. Se cachant souvent derrière des pseudonymes, ils se croient tout permis. À visage découvert, certains d’entre eux commencent à avoir pignon sur rue. Ils sont quotidiennement suivis par des milliers de followers qui reprennent en boucle des propos pourtant loin de la réalité, décousus, où les règlements de comptes se sentent à plein nez. Témoin, s’il en est, de la déchéance d’une société qui a perdu ses repères, Umberto Eco avait on ne peut plus raison lorsqu’il disait que « les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d'imbéciles qui, avant, ne parlaient qu'au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd'hui, ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel. »

                                                                   Ahmed ould Cheikh

vendredi 24 octobre 2025

Editorial: Agir maintenant ; posément, certes, mais vite !

 Coupures d’eau, d’électricité et d’Internet récurrentes, alors que s’accroissent les difficultés à joindre les deux bouts – du mois, pour ceux qui ont la chance d’avoir un salaire régulier, aussi faible soit son montant –, voilà largement de quoi indigner nos populations devant les énormités des manquements gestionnaires relevés méthodiquement par la Cour des comptes et révélés tout dernièrement au grand public. La culture du vol en hauts lieux instaurée – que dis-je, magnifiée, protégée, encouragée –, faut-il se fâcher contre celle, galopante, des divers délits et crimes dans les banlieues éloignées du pactole ? On appelle, ici, à un renforcement de la répression policière, c’est tout-à-fait compréhensible… mais là-haut, on fait quoi ?

Il ne peut plus s’agir de limoger, quelque temps, avant de réintégrer ailleurs, en des postes à peine moins juteux ; sinon carrément plus. Ça suffit ! La coupe est archipleine et déborde depuis trop longtemps. Il faut im-pé-ra-ti-ve-ment sévir ! Marquer dé-fi-ni-ti-ve-ment une frontière, nette, entre les avantages normaux inhérents à une lourde tâche publique et les invraisemblables excès justement signalés par la Cour des comptes. Le peuple gronde. Et quoi ? C’est à une révolution effrénée que le régime actuel appelle ? On veut croire le président Ghazouani et ses vrais fidèles plutôt attelés à une franche et décisive réforme en profondeur, excluant, notamment et carrément, les tristes sires coupables de ces insupportables détournements de fonds. Plus de tergiversations ! Il s’agit maintenant d’agir ; posément, certes, mais vite !

                                                                            Ahmed ould Cheikh

mercredi 15 octobre 2025

Editorial: Trop, c'est trp!

 On ne le dira jamais assez. La lutte contre la gabegie, la mauvaise gestion et le détournement des deniers publics est un combat de longue haleine. Il ne suffit pas de la proclamer mais il faut la mettre en œuvre par des mesures fortes. Radicales, s’il le faut. Le dernier rapport de la Cour des comptes, qui vient d’être mis en ligne sur le site de cette institution – une mesure louable qui a au moins l’avantage de désigner les coupables de malversations à la vindicte populaire, à défaut d’une cour de justice – indique qu’on est loin d’être sortis de l’auberge. À parcourir le rapport, on ne peut qu’être pris de vertige devant l’ampleur du gâchis. Des milliards volatilisés, des procédures violées au grand jour, des marchés fractionnés pour être attribués sans appel d’offres, des recrutements de complaisance, des comptes ouverts et approvisionnés en violation flagrante de la loi, des créances irrécouvrables par absence de volonté… la liste est longue.

Le moins qu’on puisse dire est qu’en deux ans, les limiers de la Cour des comptes n’ont pas chômé. Ils ont repéré tellement d’irrégularités, là où ils sont passés, qu’ils ne savaient plus où donner de la tête. Et ils ne sont pas passés partout, en plus ! Des institutions qui ne sont pas loin de tout reproche, loin s’en faut, ont échappé à leur contrôle. En attendant le prochain tour ? On veut bien savoir pourquoi. Quelle suite sera donnée à ce rapport ? Les gestionnaires épinglés vont-ils répondre de leurs actes devant la justice ? Ou exigera-t-on seulement d’eux qu’ils remboursent les montants détournés… avant les maintenir en fonction, comme par le passé ? Il y a, en tout cas, urgence à frapper fort, pour mettre fin – sinon réduire sensiblement – des pratiques qui rongent le pays. Invité, il y a quelques années, d’une émission de télévision, le contrôleur d’État Ethmane Sid’Ahmed Yessa avait dit, en réponse à une question sur les sanctions à infliger aux auteurs des détournements de deniers publics : « On ne peut quand même pas dupliquer des lois venues d’ailleurs et condamner ces fautifs à la peine de mort. » Ce à quoi répliqua le célèbre journaliste, feu Amar ould Bouhoubeyni : « En ce cas, nous perdrons beaucoup de nos vaillants hommes. » Mais aujourd’hui, soyons clair : trop, c’est trop ! Il faut agir ! Sans plus tarder !

Ahmed ould Cheikh

vendredi 10 octobre 2025

: Ould Diay: du nouveau à venir?

 C’est la question de la semaine : Après plus d’un an à la tête de la Primature, Ould Diay a-t-il réussi ou échoué ? A-t-il pu insuffler un sang nouveau à une institution qui en avait tant besoin ? Est-il parvenu à coordonner avec succès l’action d’un gouvernement dont il n’avait pas prise sur certains membres ? Ou n’a-t-il été, au contraire, que le premier des ministres, se contentant, comme tous ceux qui l’ont précédé, d’être un bon exécutant ? Ce qui est sûr, en tout cas, c’est qu’au début de son « mandat », Ould Diay a fait preuve de beaucoup de vivacité, multipliant réunion sur réunion et descentes sur le terrain pour constater, de visu, l’évolution de divers projets. Il a également proposé une restructuration de son cabinet super pléthorique pour en obtenir une équipe homogène, tirant dans la même direction. Mais, au bout de quelques mois, tout a semblé s’étioler. Au lieu d’être compressé, ledit cabinet s’est retrouvé étoffé par des parachutages venus de partout et la fougue a cédé la place au train-train quotidien. 

Pourtant, le PM ne désespère toujours pas. Ceux qui le connaissent de près affirment qu’il se révèle souvent fin manœuvrier et qu’il finira bien par faire pencher la balance dans le sens qu’il désire… pourvu qu’on lui en laisse le temps. Avec lui en tout cas, la Primature est devenue un centre d’intérêt. Personnage clivant, considéré, à tort ou à raison, comme l’un des hommes forts de la décennie azizienne, Ould Diay ne laisse personne indifférent. Sa résurrection, qui lui a permis de rebondir alors que tout le monde l’avait enterré, est le signe, pour certains, de sa capacité de manœuvre hors du commun ou, selon d’autres, de son étrange propension à se rendre indispensable. Quoi qu’on en dise, l’homme a, dans son sac, en tout cas plus d’un tour. On attend donc le prochain avec impatience ...

                                                         Ahmed ould Cheikh

vendredi 3 octobre 2025

Editorial: Agir, enfin

 Il y a quelques jours, le quotidien marocain Al Akhbar a rapporté un fait divers très particulier. Deux fonctionnaires marocains (un homme et une femme), employés dans une administration publique du célèbre quartier Agdal de Rabat, sont tombés dans les filets de la police grâce à un ressortissant mauritanien. Venu chercher un document – délivré, en principe, sans frais par ladite administration – notre compatriote s’est vu proposer, par les deux indélicats, de passer d’abord à la caisse pour pouvoir l’obtenir. Il appelle aussitôt un numéro vert destiné à recevoir les plaintes de ce genre. Le Parquet ordonne à la police de prendre contact avec lui. Aussitôt dit, aussitôt fait. Les limiers décident de l’utiliser comme appât et de mettre en place un traquenard pour prendre les deux rapaces la main dans le sac. Notre ressortissant fixe donc ainsi à ceux-ci un rendez-vous dans l’après-midi, pour leur remettre le montant. Au moment même où ils s’apprêtent à l’encaisser, les policiers font irruption et les arrêtent la main dans le sac. Présentés à la justice en comparution directe, ils ont été condamnés à quatre mois de prison ferme chacun. 

Une affaire qui devrait décourager les nombreux fonctionnaires encore enclins à exiger quelque dessous-de-table, en échange du service pour lequel l’État leur paye un salaire. Et que dire de nous ? Si un numéro vert comme celui-là est mis en place et la moindre dénonciation suivie d’effets, combien de nos agents se retrouveront-ils derrière les barreaux ? Il est indéniable que la corruption et la gabegie font partie des maux qui minent notre administration et, tant que des mesures radicales, dictées par une volonté politique inébranlable, ne seront pas prises, ces pratiques auront encore de beaux jours devant eux. Messieurs les dirigeants, faites quelque chose! Il n’est jamais trop tard pour bien faire, dit-on, mais il faut au moins commencer un jour ou l’autre ! Et le plus tôt sera certainement le mieux…

 

                                                                                                  Ahmed ould Cheikh