jeudi 19 juin 2025
Editorial: Code de l'inhospitalité?
Y-a-t-il une véritable politique d’encouragement pour les promoteurs étrangers ? Le code des investissements, dont l’objectif est d’établir un cadre juridique et fiscal attractif pour ceux-là et dont on ne cesse de nous rebattre les oreilles, il sert à quoi, finalement ? A-t-on vu, depuis sa promulgation, accourir de gros investisseurs dans notre pays, comme on en voit au Maroc et au Sénégal voisins ? Que nenni ! Au contraire, malgré la fondation d’une agence destinée à leur faciliter la tâche, les candidats sont découragés. Ils ne trouvent ni accueil chaleureux ni oreille attentive. Il y a quelques mois, un investisseur étranger – qui préfère garder l’anonymat – arrivait à Nouakchott. Il envisageait la construction d’un complexe touristique en bord de mer. Accompagné de son correspondant local, il se présenta au guichet (vraiment) unique de l’APIM pour y exposer le motif de sa visite. On lui expliqua qu’il ne pouvait être aidé qu’en aval, pas en amont ; c’est-à-dire… lorsque son projet aurait vu le jour ! Un terrain pour son projet ? En cette quête expédiée, par la direction du Tourisme, au ministère du Patrimoine de l’État, il n’y fut pas plus le bienvenu. Et ainsi démoralisé, le voilà embarqué pour Dakar…où il est reçu, le même jour, à bras ouverts par deux ministres ! L’un d’eux lui rend même visite à l’hôtel et lui promet que rien ne serait épargné pour que tous ses projets voient le jour… « L’hospitalité mauritanienne, qu’en reste-t-il ? », s’interrogeait un certain Mohamed Hademine, il y a une dizaine de jours, sur CRIDEM. Flûte ! Quelqu’un l’aurait-elle vendue à nos voisins ?
Ahmed ould Cheikh
jeudi 12 juin 2025
Editorial: Plus qu'une élection....
L’éclatante victoire du docteur Sidi Ould Tah à la présidence de la Banque Africaine de Développement (BAD) avec plus de 76% des voix (une Première dans l’histoire de cette importante institution financière) est significative à plus d’un titre. C’est avant tout un succès diplomatique pour le pays dont le président, qui vient d’achever son mandat à la tête de l’Union Africaine, a su mobiliser un vaste réseau de relations au profit du candidat. Agissant avec tact, le président Ghazouani est resté en contact permanent avec ses pairs africains dont le vote a fait pencher la balance en faveur de Sidi. Au point qu’il n’a fallu que trois tours pour que notre candidat écrase la concurrence. C’est aussi le succès d’un homme, docteur en économie, qui a franchi les échelons de l’Administration jusqu’au prestigieux poste de de ministre de l’Économie et des finances qu’il a occupé sept ans durant, avant d’aller fourbir ses armes à la tête de la Banque Africaine pour le Développement Économique en Afrique (BADEA) pendant dix ans. Une période au cours de laquelle il fit, de cette banque à l’activité marginale, un monstre financier dont les investissements ont atteint un record de 2,2 milliards de dollars en 2023 contre une moyenne de seulement 250 millions de dollars auparavant. Le capital de la banque a, lui été multiplié par cinq, passant de 4,2 milliards à 20 milliards de dollars. C’est fort de ce bilan élogieux, dont les premiers bénéficiaires furent les pays africains, que Sidi a décidé de briguer les suffrages des actionnaires de la BAD. C’était donc, dans les faits, quasiment prêcher des convaincus. Ce fut enfin plus qu’une élection, un sacre dont on peut s’enorgueillir pour quelque temps encore.
Ahmed ould Cheikh
vendredi 30 mai 2025
Editorial: Investissements souterrains
La semaine dernière, le président de la République et son homologue sénégalais se sont rendus sur la plateforme établie par BP en haute mer pour l’exploitation du champ gazier Grand Tortue/Ahmeyim commun aux deux pays. Accueillis en grande pompe par le PDG de la société anglaise, les deux présidents ont fait le tour du propriétaire et se sont déclarés ravis, photos et vidéos à l’appui, que le projet ait enfin abouti, malgré les différents écueils qui ont jalonné son parcours et dont le moindre n’est pas le litige relatif aux coûts d’investissement. Les deux pays accusent en effet le géant pétrolier d’avoir exagéré le cost oil – autrement dit, le montant investi dans l’exploration et la production qui doit être déduit des recettes du champ – dans des proportions pas vraiment anodines : des trois milliards de dollars initialement prévus, on serait passé à plus de dix !
Pour trancher ce débat qui a empoisonné un moment les relations entre les partenaires, un bureau d’études international a été choisi d’un commun accord en vue d’évaluer les coûts réels. Il n’est pas loin de rendre son rapport et, selon certaines indiscrétions, ses conclusions seraient «explosives ». Si c’est le cas, comment BP sortira-t-elle de cette bourrasque ? Fera-t-elle comme ELF en France en 2000 ? À la suite de démêlés politico-judiciaires, cette société pétrolière fortement présente en Afrique où elle avait fait, de la corruption des dirigeants locaux, son sport favori, s’était fait (laissé ?) absorber par Total. Et ni vu ni connu ! Le même scénario se produira-t-il sous nos yeux entre BP et Shell ?
Selon le très sérieux institut Bloomberg, Shell travaille avec des conseillers pour évaluer une éventuelle acquisition de son concurrent BP. Cependant, le groupe attendrait une nouvelle baisse de l’action de celui-ci et des prix des hydrocarbures avant de lancer une offre. Si elle est réalisée, cette fusion pourrait-elle clore le dossier Grand Tortue/Ahmeyim ? Nos présidents ont-ils envisagé cette hypothèse ? Et prévu, avec leurs propres conseillers, une stratégie en conséquence ? Autant de questions susceptibles en tout cas de nous rappeler que le pétrole et le gaz nécessitent toujours des investissements… souterrains.
Ahmed ould Cheikh
jeudi 22 mai 2025
Editorial: Elles en sont où, les autres affaires ?
Une page se tourne mais l’histoire n’en est pas finie pour autant. Le procès en appel d’Ould Abdel Aziz, de deux anciens Premiers ministres, de hauts responsables et des hommes « à tout faire » a rendu son verdict… mais l’affaire n’est toujours pas close. Dans quelques mois commencera une nouvelle bataille de procédures, d’arguments et de contre-arguments. Devant la Cour suprême cette fois. Les avocats des deux camps s’en donneront de nouveau à cœur joie, multiplieront attaques, piques et allusions à peine voilée avant de défendre ou d’attaquer le verdict.
Toujours est-il que ce procès en appel n’a pas dérogé à la règle. Après une longue bataille de procédures, des plaidoiries-fleuves et des réquisitoires à charge, le tribunal a eu la main lourde pour au moins trois accusés : Ould Abdel Aziz voit sa peine de prison ferme de cinq ans en première instance passer à quinze. Son beau-frère en prend deux, ainsi que l’ancien directeur général de la SOMELEC. Pourquoi ces deux-là et seulement eux ? Ont-ils fait pire que les autres qui occupaient pourtant des fonctions plus importantes et étaient plombés des mêmes charges ? Ou fallait-il faire en sorte que MOAA ne soit plus le seul visé et battre ainsi en brèche l’argument selon lequel il n’était question que d’un règlement de comptes ne visant qu’à le faire tomber seul ? Enfin, bref : la justice a apparemment ses raisons que la raison arrive difficilement à expliquer. D’autant moins que d’autres affaires graves – et beaucoup plus d’actualité, elles – attendent d’être traitées. Histoire de se faire oublier, elles aussi ?
Ahmed Ould Cheikh
vendredi 16 mai 2025
Editorial: Etre citoyen
Ils ne se contentent plus de nous vendre les produits alimentaires périmés et les médicaments contrefaits dont les conséquences sur la santé sont désastreuses ! Et ce n’est pas un hasard si, au cours des dernières années, les malades atteints de cancer, diabète, hypertension artérielle et insuffisance rénale, entre autres affections inconnues il y a peu encore sous nos latitudes, écument désormais les couloirs de nos structures sanitaires. Et voilà que nos profiteurs sans vergogne ont également mis la main à une dangereuse pâte, les substances psychotropes ! Le fait est clairement prouvé : il y a quelques jours, une équipe spécialisée de la Gendarmerie a réussi, après une enquête minutieuse, à faire tomber une bande dont certains leaders ayant pignon sur rue étaient au-dessus de tout soupçon.
Cette clique était spécialisée dans l’importation et la distribution de comprimés hallucinogènes. Des quantités astronomiques ont été saisies dans leurs magasins. De quoi inonder le marché national et celui des pays voisins, pour peu que leurs frontières soient aussi poreuses que les nôtres. Ce serait d’ailleurs l’un de ces derniers qui aurait donné l’alerte. Depuis, l’opinion publique s’est saisie de l’affaire. Et les réseaux sociaux s’en donnent à cœur joie. Douze millions de comprimés auraient été ainsi saisis. Soit trois par mauritanien : de quoi faire tourner bien des têtes ! Mais à quelque chose malheur est bon. Quoi qu’elle porte préjudice à notre pays et le place dans la position peu enviable de plaque tournante du trafic de produits dangereux, cette affaire aura permis de démanteler un réseau qui allait faire mal à notre jeunesse.
Espérons seulement qu’elle ne finira pas en queue de poisson comme tant d’autres qui l’ont précédée ! Car on présume bien, dans l’ampleur du trafic et la difficilement explicable facilité des trafiquants à passer les contrôles dans nos ports et le long de nos routes, qu’il est encore et toujours question, ici, de corruption. Et je ne manquerai pas de saluer, à cet égard, le valeureux officier de notre Gendarmerie qui aurait opposé un niet catégorique au milliard d’ouguiyas que lui aurait été proposé le chef apparent de la bande pour fermer les yeux sur le micmac. Comme quoi, ça peut vouloir dire quelque chose être citoyen mauritanien !
Ahmed ould Cheikh
vendredi 9 mai 2025
Editorial: Lucidité
Dans son classement annuel qui sert de baromètre à la liberté de presse dans le Monde et publié chaque année le 3 Mai, à la veille de la Journée mondiale de la Presse, Reporters Sans Frontières (RSF) a rétrogradé la Mauritanie de la 33ème place qu’elle occupait l’an dernier à la 50ème. Pourquoi, à votre avis ? La presse n’a plus affaire avec le tristement célèbre article 11 qui lui valut tant de déboires, de saisies et d’interdictions jusqu’en 2005. Les journalistes ne sont ni jetés en prison, ni empêchés de faire leur travail, encore moins maltraités par le pouvoir en place. Le mal est plus insidieux. Il ronge la profession depuis ses débuts et RSF ne s’y est pas trompé en mettant le doigt sur la plaie.
« Depuis la dépénalisation des délits de presse en 2011 », fait en effet observer son rapport, « les journalistes peuvent travailler dans un environnement moins répressif mais vivent dans une grande précarité. […] la fragilisation économique des media constitue l’une des principales menaces pour la liberté de la presse ». Tout est dit. La situation financière du secteur est plus que précaire : les ventes de la presse-papier sont en chute libre depuis plusieurs années du fait de la concurrence d’Internet, la publicité est inexistante, les annonces officielles restent l’apanage du quotidien national, le fonds d’aide à la presse est distribué à la va-vite et les vraies entreprises de presse n’y ont droit qu’à la portion congrue. Si la disparition, à moyen terme, de la presse-papier est sans doute inéluctable, il reste impératif de maintenir la réflexion citoyenne et sa libre capacité d’investigations hors de l’excitation généralisée de ce monde. Garder la tête froide a un coût.
Ahmed ould Cheikh
jeudi 1 mai 2025
Editorial: Mais bon sang, un peu de tenue !
Faire le buzz est désormais le souci de tout un chacun. « Faire tendance », comme on dit, c’est-à-dire voir ses avis largement partagés sur les réseaux sociaux. C’est la ruée au plus grand nombre de lectures et de partages ! Au prix de n’importe quoi à tout bout de champ… Des exemples ? En veux-tu, en voilà : tel député de l’opposition accusant, dans une déclaration au Parlement européen, une communauté de confisquer le pouvoir… avant de se rétracter dès son retour au pays, en disant qu’il ne parlait que d’une minorité. Telle autre députée du même camp traitant tous nos dirigeants de cafards… Des soutiens du pouvoir en place n’hésitant pas à taxer les dirigeants de l’opposition active de tous les noms d’oiseaux avec, en cible privilégiée, Biram, accablé de volées de bois vert pour un oui ou pour un non.
On est à mille lieues d’un débat politique serein où les problèmes du pays seraient débattus dans la sérénité et le respect de l’Autre. Où en est-on des tables rondes organisées par la télévision nationale il y a quelques années et auxquelles la presse privée était conviée ? Tout le monde a encore en tête le face-à-face mémorable entre les deux candidats arrivés en tête lors de la présidentielle 2007. Une expérience qui ne sera jamais renouvelée, pour la simple raison qu’il n’y a jamais eu de deuxième tour depuis cette date et qu’il n’y en aura peut-être jamais plus.
La courte parenthèse civile de 2007 à 2008 ayant été tuée dans l’œuf, les militaires sont revenus à la charge et ne lâcheront plus le morceau. D’où la sempiternelle question : à quelle sauce serons-nous mangés en 2029, lorsque Ghazouani décidera de rendre le tablier ? A moins qu’il ne veuille rempiler pour un hypothétique troisième mandat « pour garantir la paix et la stabilité du pays ». On entend certes bien que plane l’exemple du Sénégal voisin et de sa révolution populaire de 2023. Mais, franchement, on n’aurait pas mieux à faire en notre république réputée islamique ?
Ahmed ould Cheikh
jeudi 10 avril 2025
EDitorial: En toute bonne foi
Depuis quelques semaines, la presse régionale et même internationale – RFI se chargeant d’en mettre une bonne couche… – fait ses choux gras du traitement par la Mauritanie de la question des immigrés. Et chacun y est allé de ses commentaires et médisances. Du jour au lendemain, notre pays, jadis terre d’accueil, se serait ainsi transformé, selon certains, en enfer pour les étrangers d’Afrique subsaharienne, désormais maltraités, frappés, délestés de leurs biens et expulsés sans ménagement dans d’horribles conditions. Pour d’autres non moins dépourvus de mauvaise foi, il serait devenu -contre monnaie sonnante et trébuchante, insistent-ils lourdement… – le gendarme de l’Europe, gardien des frontières de celle-ci et un pays où il ne fait plus bon vivre pour les candidats aux voyages. Qu’avons-nous donc fait pour mériter cette volée de bois vert ? Comme partout ailleurs dans le Monde, nous avons exigé des étrangers de se mettre en règle vis-à-vis de la loi. Ceux qui s’y sont conformés – et ils sont nombreux… – exercent leurs activités en toute quiétude. Par contre, ceux qui refusent de la respecter, considérant qu’ils ne sont là que de passage, prennent le risque de se faire expulser. Et, pour une fois, la Mauritanie s’est résignée à appliquer la loi dans toute sa rigueur face au flux incessant d’immigrés. Le résultat est là : elle se fait traiter de tous les noms. Certes, l’opération ne s’est peut-être pas déroulée partout dans les règles de l’art ; des débordements, probablement inévitables en ce genre de situations, ont été signalés et il restera à en punir les auteurs pour que ceux-là ne se reproduisent plus. Mais qu’on se le dise : la construction d’un État de droit passe bel et bien par un contrôle rigoureux de son territoire et de tous ceux qui y pénètrent, même seulement pour le traverser. Cela ne remet certainement pas en cause notre nature hospitalière et RFI aurait bon ton de le rappeler à tous ceux qui en doutent… Un petit reportage sur place, peut-être ? En toute bonne foi ?
Ahmed ould Cheikh
lundi 31 mars 2025
Editorial: Chapeau, maître Bouhoubeyni !
Maître Ahmed Salem ould Bouhoubeyni vient de boucler son deuxième et dernier mandat à la tête de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH), un organisme officiel mauritanien créé en vertu de l’ordonnance N°015/2006 du Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD). On avait remarqué, à l’époque, le caractère essentiellement consultatif – et donc limité… – des missions confiées à cette nouvelle institution et certains opposants au pouvoir n’ont cessé, depuis, de reprocher à l’ex-président du forum de l’Opposition d’avoir accepté cette contrainte. Mais, habile avocat et fin négociateur, comme en témoigne également son passage à la présidence de l’Ordre des Avocats Mauritaniens, Me Bouhoubeyni a néanmoins su extraire de cette entrave des avancées significatives dans la lutte vers l’établissement d’un État de droit en Mauritanie.
Il a notamment établi une relation de confiance avec les autorités, dans une posture d’écoute et de dialogue n’excluant pas des critiques et des défis strictement basés sur des faits concrets et objectivement irréfutables. Une confiance également établie avec les partenaires de la Mauritanie qui s’est soldée par un soutien sans précédent de la Communauté internationale : ambassadeurs accompagnant jusqu’aux confins du pays les campagnes de la CNDH contre l’esclavage, avec des slogans marquants comme « Esclavage, tournez la page ! » ; visite officielle du président du Conseil européen, Charles Michel, au siège de la CNDH, après sa rencontre avec Mohamed Cheikh El Ghazouani ; consultation du président de celle-ci par l’ambassadeur de l’Union européenne, deux jours avant la revue entre l’UE et le gouvernement mauritanien il y a quelques semaines ; soirée exceptionnelle du 18 Mars dernier, réunissant les ambassadeurs des principales puissances diplomatiques (États-Unis, France, Allemagne, Espagne, UE), les représentants des Nations Unies, notamment leur coordinatrice générale, les représentants de la Banque mondiale, du HCR et du Bureau du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme et autres acteurs majeurs…
Et maître Ahmed Salem ould Bouhoubeyni de souligner : « notre méthodologie sur des dossiers sensibles, comme celui de l’esclavage, a permis de dépasser les polémiques stériles pour apporter des réponses concrètes. Nous avons invité tous les acteurs à chercher ensemble des solutions à des problèmes précis, démontrant ainsi notre volonté d’action plutôt que de débat théorique. Aujourd’hui, la Mauritanie bénéficie d’une reconnaissance internationale avec le statut A au sein des Nations Unies. Il est essentiel que cette dynamique soit préservée par la future présidence de la CNDH, car les droits de l’Homme restent un combat permanent. »
Ahmed ould Cheikh
samedi 22 mars 2025
Editorial: Le dialogue, une nécessité nationale
Le climat international se tend, des positions extrémistes, notamment en ce qui concerne la libre circulation des biens et des personnes, se développent : sans conséquence sur notre quotidien mauritanien ? Les informations qui nous parviennent et que nous nous faisons le devoir de rapporter dans toute la diversité de leur expression démontrent tout le contraire. Propulsée par des difficultés économiques croissantes en Afrique sahélienne, la problématique migratoire amène des mesures vexatoires à l’encontre des étrangers subsahariens venus chercher, auprès de nous, de meilleures conditions d’existence et cette politique protectionniste a des retombées sur certaines de nos propres populations variablement intégrées dans notre organisation nationale.
De fait, c’est bel et bien la question des inégalités raciales qui se retrouve aiguisée et la communauté haratine ne manque pas de le remarquer, en rappelant l’urgence d’en finir enfin avec l’esclavage et ses séquelles. Ce n’est à proprement pas parler d’arsenal juridique à l’encontre de ces plaies – il est déjà relativement bien développé – mais beaucoup plus de volonté politique et plus encore de prise de conscience, chez tous les mauritaniens, particulièrement ceux qui sont aux commandes, de la nécessité de partager réellement le pouvoir et les richesses de notre nation. La solution serait-elle, a contrario, de favoriser l’immigration maghrébine pour contrer la montée de l’Afrique noire ? Bref et abruptement, troquer notre ancestrale fonction de trait d’union entre les deux bilads contre une position d’affrontement ?
Mais à qui profiterait au final une telle attitude ? Notre sous-sol et ses richesses font l’objet de bien des convoitises et rien de plus excitant pour celles-ci que l’entretien de situations conflictuelles au sein de notre nation. C’est précisément à ce point de réflexion que se présente l’opportunité d’un nouveau dialogue entre toutes nos composantes politiques et civiles. Non pas, bien évidemment, que le dossier racial soit le plus central à discuter – la pauvreté touche tout le monde, tout comme la corruption, la gabegie et les dessous-de-table… – mais il est assez volumineux pour inciter les plus nantis – et paradoxalement donc, les plus exposés aux conséquences de remue-ménages intempestifs – à se plier aux conditions d’un dialogue vraiment ouvert, sincère et inclusif, n’excluant aucun sujet. Ce n’est pas seulement à conclure : à bon entendeur, salut !
C’est toute la nation qui y appelle.
Ahmed ould Cheikh
samedi 15 mars 2025
Editorial: Il faut sauver la MAI
Arrivés comme prévu à l’aéroport de Las Palmas, le vendredi 7 Mars, pour prendre le vol de la Mauritania Airlines à destination de Nouakchott, les passagers qui avaient libéré leurs chambres d’hôtel et épuisé leurs frais de séjour ont eu la désagréable surprise de se voir notifier que l’avion qui devait les transporter n’arriverait que dimanche. En vertu des lois qui régissent le transport aérien, ils auraient dû être pris en charge par la compagnie, logés, nourris jusqu’à leur départ et même indemnisés. Mais notre compagnie nationale semble ignorer ou refuse d’appliquer ces textes. Les passagers n’auront même pas droit à un mot d’excuse. Et ce n’est pas la première fois. La MAI a sans doute la politique commerciale la plus pourrie de tout l’Univers.
Et que dire de sa gestion ? Comment une compagnie qui dispose de six avions (dont quatre dans un état presque neuf, deux Boeings et deux Embraers) peut-elle se retrouver du jour au lendemain sans aucun aéronef en mesure de voler ? « Gouverner, c’est prévoir », dit-on. Pourquoi n’a-t-elle pas prévu que les avions totalisant un certain nombre très précis d’heures de vol doivent nécessairement aller en révision ? N’a-t-elle pas les moyens de faire face à ces charges ? Où vont les milliards qu’elle encaisse ? Sa situation serait devenue, dit-on, si proche du coma qu’elle navigue désormais à vue, vivant au jour le jour d’expédients et se contentant de louer des avions pour assurer ses dessertes. Elle a pourtant tout pour réussir : des avions qui lui appartiennent et qui ne lui ont rien coûté, des lignes rentables et un personnel qualifié… mais il lui manque l’essentiel : un pilote.
Ahmed ould Cheikh
vendredi 7 mars 2025
Editorial: Pas de loi antitrust en Mauritanie : un diktat de quel pouvoir ?
On s’étonne à bon droit de l’incohérence politique que cela implique : on ne peut pas prétendre mettre fin à l’incurie et la corruption… tout en entretenant les conditions qui les génèrent. Car c’est bel et bien le pouvoir actuellement en place qui a élevé Mohamed Zeïne El Abidine Cheikh Ahmed au rang d’homme d’affaires privilégié. Œuvre de Mohamed ould Abdel Aziz ? Certes mais le successeur de celui-ci n’en a pas non seulement perpétué la démarche mais l’a encore amplifiée, alors que s’accumulaient les preuves des insuffisances dudit personnage. J’évoquais la semaine dernière ses « manquements » dans l’exécution du projet « Aftout ech-Chargui » et les « indulgences » dont l’AFD l’avait gratifié. Cette semaine, c’est « Le Quotidien de Nouakchott » qui fait état des « largesses » de l’État mauritanien qui confie à sa trouble société de génie civil BIS TP la réhabilitation et de l’extension des écoles de la commune de Toujounine. Pour 908 millions MRO. Comme si de rien n’était.
On me rétorquera que ces « faveurs » ne lui sont pas exclusives, à proprement parler, puisque d’autres sociétés – la PME de génie civil TCC, Electotech SA et Best Buy – vont se partager quelque mille six cent vingt millions MRO sur le projet de réhabilitation et d’extension de cent trente-deux infrastructures scolaires de Nouakchott, piloté par Taazour. Mais, quand on constate l’ampleur des activités déployées par l’affairiste – ainsi que le souligne avec pertinence notre estimé confrère : informatique, secteur bancaire, génie civil, hydrocarbures, télécoms, électricité, médias, énergies etc. – on soupçonne bien, là-dessous, une volonté de préserver les intérêts d’un système profondément incrusté dans le fonctionnement de notre République.
Bref, le pouvoir affiché va devoir faire des choix. Continuer à faire « comme si de rien n’était » et s’exposer, preuves à l’appui – comptez là-dessus sur nous ! – à une réprobation croissante envers ces « irresponsabilités protégées » réduisant ses promesses à de vulgaires slogans vides de sens ; ou bien s’attaquer clairement aux insuffisances dans l’exécution des contrats du patron des patrons avec l’État. Si celui-là n’est pas un simple homme de paille de celui-ci – et cela pose évidemment des questions plus troublantes encore… – on apprendra alors vite que ces insuffisances tiennent surtout de l’omniprésence de cet homme sur le marché des affaires. « On ne peut pas être à la fois au four et au moulin », rappelle un célèbre dicton populaire français. Est-ce pour cette raison qu’apparut en 1890 aux USA la première loi antitrust au monde ? C’est peu probable mais une chose est en tout cas certaine : c’est bien celle-ci qui initia leur développement…
Ahmed ould Cheikh
vendredi 28 février 2025
Editorial: Expédients coûteux… mais manifestement sans lendemain
On s’en doutait un peu, pour ne pas dire que cela ne faisait aucun doute : l’aide française au développement est une arme diplomatique en Afrique. Pas que française, au demeurant, mais c’est bien aujourd’hui la France qui est sur la sellette dans les rapports de l’AFD avec le pouvoir en Mauritanie, dernier régime du Sahel à n’avoir pas tourné le dos à l’ex-colonisatrice. En cause, les vingt-deux millions d’euros balancés par ladite agence au profit théorique du mirifique programme de l’Aftout ech-Chargui, ce fameux projet-phare d’adduction d’eau potable au bénéfice tout aussi théorique de cent cinquante mille personnes du Sud mauritanien et dont l’ONG mauritanienne Transparence Inclusive avait, il y a un an déjà, dénoncé le total fiasco, ainsi que nous l’évoquions dans l’éditorial du N°1375 (14/02/2024) de notre journal.
La « nouveauté », si l’on peut dire, c’est que l’on sait aujourd’hui à quel point l’AFD s’est, en cette aventure, distinguée dans l’irrespect de ses propres règles de contrôle, décaissant l’intégralité des fonds prévus avant même la fin officielle du chantier, négligeant de réclamer la moindre pénalité de retard, après avoir accordé des rallonges substantielles pour des « améliorations »… déjà inscrites dans le cahier initial de charges ! Certes, la campagne « Publish what you fund », qui publie chaque année un indice évaluant la transparence des organismes d’aide au développement dans le Monde a déjà épinglé l’Agence française, en la classant à une peu glorieuse 35ème place sur cinquante mais on se demande tout de même au nom de quels « principes » – humanistes ? – la patrie des droits de l’Homme et du Citoyen a laissé pour sa part passer ces étranges « manquements »…
D’aucuns subodorent une complicité à tout le moins passive avec le système – très actif, lui – de corruption en Mauritanie et, un cran tout de même en dessous, au Sénégal, puisque les deux sociétés qui ont surtout bénéficié de ces « indulgences » sont respectivement dirigées par un mauritanien et un sénégalais : BIS TP, par le décidément sulfureux Zeïne El Abidine ould Cheikh Ahmed – mais néanmoins toujours président de l’Union Nationale du Patronat Mauritanien (UNPM)… – et la Compagnie Sahélienne d’Entreprises (CSE) par Oumar Sow qui s’évertue aujourd’hui à se dégager de projets extérieurs à son pays et en conséquence difficilement contrôlables (c’est le moins qu’on puisse dire en ce concerne ceux engagés en Mauritanie). Et qu’ont donc en commun ces deux hommes si apparemment différents ? On ne voit guère que leur proximité avec le chef de l’Etat de leur pays respectif, durant le projet Aftout ech-Chargui : Mohamed Ghazouani, pour le premier, et Macky Sall, pour le second. Variablement francophiles, certes, mais tout aussi attentifs à recueillir le beurre de la mamelle hexagonale… Et c’est avec de tels coûteux expédients que la France entend se refaire une santé au Sahel ?
Ahmed ould Cheikh
vendredi 21 février 2025
Editorial: Corruption et magouilles, encore et encore…
Confortablement assis dans son fauteuil à regarder un match de foot à la télé, sa douce moitié à son côté, il était loin de s’attendre, ce paisible citoyen, à ce que sa soirée puisse se transformer subitement en cauchemar, quand un bip l’incita à consulter l’application ‘’Houwiyeti’’ (mon identité) qu’il avait récemment installée sur son portable. Un message simple et succinct l’informant en peu de mots que son acte de mariage avait bel et bien été établi. Manquant de s’étrangler, il ne peut s’empêcher de se tourner vers sa dame qui, finaude, aperçoit illico son trouble, jette sans tarder un coup d’œil… puis les deux !... sur la petite note apparemment si anodine et la voilà aussi sec sur ses grands chevaux ! Et pour cause, l’épouse mentionnée sur l’avis de justes noces… ce n’est pas elle ! « C’est qui, cette traînée ? », rugit-elle. « Mais… mais », tente-t-il de se justifier, « je ne la connais ni d’Ève ni d’Adam, celle-là ! – Ha oui ! Tu me prends pour qui ? » Et les noms variablement fleuris volent en tous sens… Nuit agitée. Au matin, le digne époux parvient cependant à convaincre sa légitime de l’accompagner dans les bureaux de l’Agence des Titres Sécurisés pour tirer cette incroyable affaire au clair.
Voilà comment ces deux braves personnes ont ouvert une véritable boîte de pandore. Une enquête a été ouverte sans délai. Elle a déjà permis de découvrir deux cent cinquante falsifications d’actes de mariage établis pour des quidams en souffrance de visa Schengen. Un réseau apparemment bien huilé qui négocie ces sésames au prix fort – jusqu’à deux millions MRO ! – et opère depuis quelques années au vu et au su de tous. Mais personne ne pouvait imaginer que ces faussaires pouvaient aller jusqu’à falsifier un acte de mariage pour une personne dont le (ou la) « conjoint(e) » a déjà personnellement obtenu un ou plusieurs visas et retrouvant ainsi garant(e), par simple paperasse interposée, de la demande de celui ou celle qu’il (ou elle) ne connaît en aucune façon.
Douze personnes ont été placés sous mandat de dépôt et trois autres sous contrôle judiciaire, en attendant la fin d’une instruction qui risque ne pas dévoiler tous les contours de cette scabreuse affaire. Pour un acte de mariage falsifié, combien d’autres sont passés sous le boisseau ? Quoique fasse l’Agence et malgré toutes les précautions, des indélicats poussés par l’appât du gain trouveront toujours un moyen de déceler une faille qui leur permettra de réaliser leurs sombres desseins…
Ahmed ould Cheikh
samedi 15 février 2025
Editorial: la bataille des ordures
Comme si les coupures d’eau et d’électricité ne suffisaient pas. Voilà que des incendies entrent dans la danse macabre. Et pas n’importe lesquels : ceux de tonnes d’ordures accumulées en plein centre-ville, qui plus est entre deux hôpitaux : le CHN et celui de traumatologie. Une scène digne de l’Apocalypse. La fumée et l’insoutenable odeur empestent l’air de tout le voisinage et même au-delà. Les pompiers sont intervenus, semble-t-il plusieurs fois, mais le feu reprend inlassablement.
Comme pour l’eau et l’électricité, le problème vient de loin. Il met présentement en cause la Société Mauritanienne de Transport des Déchets (SMTD) chargée, en fin de règne d’Ould Abdel Aziz, d’organiser durant cinq ans la récolte et le transport de nos ordures. Un pactole de 5,7 milliards de nos MRO qui permit, entre autres, à son principal actionnaire, Zeïne El Abidine ould Cheikh Ahmed, le patron des patrons, de s’assurer une transition en douceur entre les deux représentants de l’armée au pouvoir.
Mais en dépit des dénégations de ladite société assurant avec véhémence de la qualité de ses prestations durant ces cinq dernières années, les dépôts sauvages d’ordures se sont accumulés aux quatre coins de Nouakchott. Un constat accablant qui n’aura certainement pas été pour rien dans l’exclusion de l’offre de la SMDT lors de l’attribution du nouveau marché relatif à la collecte et au transport des déchets solides de notre capitale nationale au Centre d’enfouissement technique. Cette fois fixé à 7,5 milliards d’ouguiyas, le pactole a été attribué, à la mi-Janvier dernière, à une entreprise marocaine, SOS Nouvelle Dynamique Durable (SOS NDD) mais Zeïne El Abidine s’est enragé à faire annuler, une semaine plus tard, cette décision au niveau de l’Autorité de Régulation des marchés publics (ARPM). A priori, la SMTD ne devrait pas pouvoir postuler au nouvel appel d’offres, son exclusion du premier ayant été confirmée par cette même Autorité. Des tractations en sous-main n’en sont pas moins en cours… Et, pendant ce temps-là, les Nouakchottois suffoquent…
Ahmed ould Cheikh
vendredi 7 février 2025
Editorial: Petits détails et grandes conséquences…
Chaque fois que la Mauritanie révise et améliore son code d’investissement, le climat de celui-ci ne s’améliore pas pour autant et les investisseurs ne se bousculent pas au portillon. Une zone franche a été établie à Nouadhibou et… rien n’a changé. Un organisme de promotion des investissements a été fondé à Nouakchott et… rien n’a changé. Car pour encourager ceux-ci, il ne suffit pas de promulguer des lois générales, quelles que soient les incitations qu’elles contiennent. Il faut aussi veiller à ce qu’il y ait un climat psychologique, administratif et judiciaire qui garantisse la tranquillité. À commencer par celle de l’investisseur, en l’assurant de ce que ses placements ne seront pas soumis à l'arbitraire de l'administration, des impôts, de la police ou de la justice.
À cet égard fort instructif, l’exemple de ce financier du Golfe qui avait entendu parler, il y a des années, de la fondation d’une zone franche à Nouadhibou. Il se rendit en Mauritanie chez un de ses amis, avec l'intention d'investir dans le tourisme balnéaire, une activité qu’il avait déjà menée avec succès en d’autres pays. Arrivé à Nouakchott, il avait choisi de rejoindre tranquillement Nouadhibou par la route avec son ami pour découvrir le pays. Mais à peine sorti de l’aéroport Oum Tounsi, les tracas commencèrent au premier poste de police où on lui demanda de remplir les mêmes fastidieuses formalités d’accueil qu’il venait juste d’accomplir à sa sortie de l’avion. Un peu énervé, il obtempéra cependant poliment aux injonctions de l’agent. Puis la multiplication des contrôles tout au long du chemin acheva de lui faire perdre tout enthousiasme à investir chez nous… Résultat des courses, il ne fit qu'une rapide visite de courtoisie à Nouadhibou et retourna dans son pays.
Un autre investisseur du Golfe se contenta, lui, d’un bref séjour à Nouakchott. Il comptait construire à Nouadhibou une usine chargée d’importer, transformer et conditionner des huiles pétrolières de son pays, avant de les commercialiser auprès des entreprises locales de pêche et d'exploitation minière, afin de répondre aux besoins de notre marché et celui de la sous-région. S’informant alors auprès d’un responsable de l’APIM ( l’agence chargée de promouvoir les investissements) sur le droit mauritanien des affaires, les procédures de gestion, les règles d'import-export et de commercialisation, etc., la piètre qualité des réponses de celui-là ne fut guère relevée par l’étrangeté de son dernier conseil : « Si vous rencontrez un problème, comptez sur nous pour vous aider à le résoudre ». Très près peu enclin à se suffire d’une garantie si « personnalisée », le prudent homme d’affaires préféra retourner at home…
Il existe de nombreux autres exemples de telles brèves déconvenues qui ont suffi à décourager les plus entreprenants. Pour produire un climat d’investissement confortable et attrayant, il faut, au-delà de l’élaboration et l’affinement de textes légaux clairs et précis, mobiliser tout-à-la-fois des spécialistes vraiment compétents en divers domaines, juridiques, administratifs et sociaux, ainsi qu’en celui des relations publiques, tous attentifs à coopérer pour le bien commun.
Ahmed ould Cheikh
samedi 1 février 2025
Editorial: Non à la loi de la jungle!
Le dimanche 27 Janvier, au sortir d’une émission sur TTV, Hanevy ould Dahah, le directeur de celle-ci, a été violemment agressé par un jeune homme venu avec l’intention manifeste d’en découdre avec lui. L’excité dont l’entreprise avait gagné, il y a quelques années, le marché de réhabilitation d’un quai au Port de Nouadhibou mais n’avait pas respecté ses engagements – provoquant l’annulation du contrat et le lancement d’un nouvel appel d’offres – se considère victime d’un acharnement de la part du célèbre journaliste. Subite et d’une violence inouïe, l’agression a suscité de vives réactions. C’est la première fois, en effet, en 34 ans de liberté de la presse, qu’un professionnel des media est attaqué dans l’exercice de ses fonctions. On croyait, un peu naïvement peut-être, que ces pratiques d’un autre âge n’avaient plus cours dans un monde civilisé et que la loi de la jungle avait cédé la place à celle d’un État de Droit.
Certes, celui-ci éprouve bien des difficultés à imposer ses règles en Mauritanie et c’est à tout le moins le devoir de la presse libre – le quatrième pouvoir de toute démocratie – de l’y aider. Un appui singulièrement nécessaire en ces temps de lutte acharnée contre la gabegie, la corruption et les passe-droits. Notamment en dénonçant les pratiques douteuses dans la passation et l’exécution des marchés publics. S’agissait-il, en l’occurrence de cette lamentable affaire, de dissuader les journalistes d’accomplir leurs tâches ? On ne peut pas ignorer l’hypothèse que le jeune écervelé ait pu être manipulé par de plus discrets prédateurs de la chose publique, inquiets du combat mené par la presse aux côtés de l’État.
On attend donc de celui-ci qu’il réagisse sans tarder, en frappant juste et fort contre de telles intimidations. Une réponse immédiate, claire et vigoureuse, que tous nos confrères soutiendront sans faillir. Ensemble, conscients des enjeux cruciaux pour notre démocratie. Il nous faut mobiliser tous les pouvoirs de celle-ci – exécutif, législatif, judiciaire et médiatique – afin d’éradiquer au plus vite les séquelles de la loi de la jungle. Pas de faux-fuyants : la fermeté est ici de rigueur !
Ahmed ould Cheikh
samedi 25 janvier 2025
Editorial: Le nerf de la paix
La Sionie ne cessait de déclarer qu’elle ne quitterait l’enclave de Gaza qu’après y avoir construit des colonies et éradiquer le Hamas : elle va s’en retirer dans les quarante-deux prochains jours, la queue entre les pattes, humiliée, discréditée, sans atteindre un seul objectif d’une guerre qu’elle voulait éclair, et à des conditions qui sont loin de lui être favorables. Le secrétaire d'État américain Antony Blinken ne déclarait-il pas récemment que chaque soldat du Hamas tué était remplacé par une nouvelle recrue ou un volontaire ? En plus, l’accord qui a été imposé aux Sionistes par Trump qu’ils considéraient pourtant comme un allié sûr, ne prévoit-il pas que chaque otage sioniste sera échangé contre trente prisonniers politiques palestiniens et cinquante autres le seront contre une seule soldate de l’entité sioniste qui a perdu, elle, des milliers de ses réputés invincibles fantassins…La honte, vous dis-je.
Alors que Netanyahou et Galant, son ministre de la Défense récemment limogé pour des « divergences dans la conduite de la guerre », sont poursuivis par la CPI, on se demande vraiment ce qu’a gagné la Sionie dans les massacres perpétrés à Gaza. S’être plus que jamais révélée le pantin des intérêts économiques d’un Occident qui ne sait plus comment camoufler son inéluctable déclin ? Les quarante-sept mille victimes palestiniennes, pour la plupart des femmes et des enfants innocents qui auraient pu accentuer la différence de taux de fécondité entre les deux communautés condamnées par l’Histoire à vivre un temps côte-à-côte, à défaut de pouvoir réapprendre à vivre ensemble, comme naguère ?
On attend le réveil du doux prophète Yacoub-Israël (PBL). Appuyés qu’ils se sentaient par leurs alliés occidentaux, les égarés de ses descendants pensaient détenir le nerf de la guerre. Les déconvenues de leur économie depuis le 7 Octobre leur ont brutalement rappelé que tout est vanité en ce bas-monde et que[H1] rien n’y subsiste sans la lumineuse Volonté du Très-Haut. Découvriront-ils enfin le nerf de la paix ? Il y a certes beaucoup de plaies à panser mais il existe suffisamment de palestiniens bien informés de ce que Dieu est miséricordieux avec les miséricordieux pour se contraindre à les y aider, pour peu qu’ils y consentent…
Ahmed ould Cheikh
samedi 18 janvier 2025
Editorial: Trop, c'est trop!
endredi dernier, monsieur Abidine Sidaty, ADG de Frigo STPH Nouakchott adressait une lettre ouverte à notre ministre des Pêches et de l’économie maritime – https://www.lecalame.info/?q=node/16733 – pour l’alerter sur des « suspicions » d’activités illégales de bateaux turcs – « spécifiquement des senneurs spécialisés dans le petit pélagique », précisait-il – dans la zone de reproduction des poissons au Banc d'Arguin, une zone pourtant interdite à la pêche. Et de marteler : « Le respect des zones de reproduction et des réglementations de pêche est essentiel pour assurer la durabilité de notre secteur halieutique, qui constitue non seulement une richesse économique mais aussi un patrimoine naturel irremplaçable. Il est donc de votre responsabilité, monsieur le Ministre, de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger nos potentialités halieutiques et garantir que ces abus cessent ».
Nous avons mené notre propre enquête. Elle nous a permis d’établir que notamment deux bateaux turcs – le « Turk Yilmaz » et le « Ilker Yilmaz » – ont débarqué, le 9 Janvier, leur cargaison à Nouadhibou : 233 tonnes de maquereau et chinchard pour le premier ; 300 tonnes de chinchard et 600 tonnes de sardinelle plate pour le second ; soit une recette de deux cents millions MRO en quelques heures ! Ces navires spécialisés larguent leurs filets de 1500 mètres de longueur sur 100 mètres de profondeur, raclant sans vergogne toute la zone, pendant que les bateaux respectueux des impératifs de la pêche durable peinent à pêcher quelques tonnes, s'ils ne rentrent pas bredouilles…
Disposerions-nous de plus de moyens que le ministère des Pêches pour établir un tel constat ? Serait-ce que des directives en haut lieu, sinon de beaucoup plus bas dessous-de-table, forcent nos gardes-côtes à détourner leurs regards de ce pillage éhonté de nos ressources maritimes déjà fragilisées par des pratiques de pêche imprévoyantes ? Il faut agir sans tarder pour punir sévèrement les auteurs de tels ravages et leurs éventuels complices. Plus question de promesses : chaque jour qui passe à tergiverser agrandit la plaie et encourage les prédateurs. La patience a des limites : trop, c’est trop !
¨ Ahmed ould Cheikh
vendredi 10 janvier 2025
Editorial: À quand la fin des arnaques foncières ?
Des nombreux domaines où l’anarchie règne en maître à Nouakchott, c’est sans conteste le foncier qui tient le haut du pavé. Tout le monde a encore en mémoire la célèbre « poche 10 », située à la jonction entre Tevragh Zeïna et Teyarett, que l’État rasa il y a quelques années. Ceux qui y avaient construit des villas de luxe n’avaient aucun papier prouvant que les terrains leur avaient été officiellement attribués par l’Administration. Des intermédiaires peu scrupuleux leur avaient vendu du vent. Malgré leurs récriminations, l’État était resté ferme et, en quelques jours, le quartier sorti de terre ne fut plus qu’un amas de ruines. La même scène est en train de se reproduire au quartier dit 15 et à la plage. En ce qui concerne celui-là, des citoyens crédules ont acquis des lots dans une zone lotie comme une concession rurale. Là encore, l’État n’a rien voulu entendre. Les propriétaires des maisons déjà bâties devront s’acquitter du prix fort, c’est à dire 37.500 MRO par mètre carré, s’ils veulent que leur situation soit régularisée. Même chose à la plage sauf que, cette fois, toute construction située à moins de cent mètres de la côte passera à la trappe. On ne peut qu’applaudir de telles décisions qui auraient dû intervenir depuis longtemps mais, là où le bât blesse, c’est que ceux qui ont profité de la naïveté de pauvres citoyens n’ont toujours pas été inquiétés. Ils sont pourtant connus de tout le monde et certains d’entre eux ont même pignon sur rue. C’est par là que devait commencer l’opération pour éviter que de telles arnaques se reproduisent. Se conclura-t-elle sur un tel radical assainissement ? Ce serait de fort bon augure : mieux vaut tard que jamais…
Ahmed ould Cheikh
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