vendredi 27 septembre 2024
Editorial: L'agonie d'un secteur
La pêche industrielle serait-elle en train de s’effondrer et avec elles les entreprises nationales, avec des conséquences désastreuses sur l'emploi, les banques, les recettes fiscales et les devises ? Un petit tour d’horizon rapide permet de se rendre compte qu’elle n’est plus loin du gouffre. Jugez par vous-mêmes.
Au début de cette année, quarante chalutiers étaient contraints à l'arrêt en rade de Nouadhibou, faute de rentabilité liée, entre autres, au prix élevé du gasoil. Puis, après diverses négociations qui ont permis d’atténuer ce problème, les bateaux ont repris la mer le 10 Juillet et les recettes se sont légèrement améliorées. Le Port autonome de Nouadhibou (PAN) fait ressortir des arriérés de facturation fantaisistes, sur la base de statistiques de la Garde-côte. Au lieu de confronter les accusateurs et les accusés, le DG du port se contente de bloquer les navires, refusant de collaborer avec la mission envoyée par le nouveau ministre. La mairie a procédé à la fermeture de plusieurs usines avec l'appui du trésorier régional et de la force publique, sous prétexte de recouvrement de la taxe foncière, alors que certaines de ces usines sont agréées au régime des points qui les exonère explicitement de cette taxe, tandis que d’autres ne sont liées que par un contrat de bail avec la Zone franche propriétaire des lieux. La Garde-côte a dérouté des navires nationaux pour un problème de quota, alors que ceux-là sont loin d’avoir atteint le leur. Le quota 2024 du segment « Pêche industrielle des céphalopodes » n’est en effet actuellement consommé qu’à hauteur de 39% et pourrait atteindre 50% à la fin de la campagne : on est donc loin de toute surexploitation. Même les Impôts s’en mêlent en réclamant des arriérés de 2016 qui avaient déjà l’objet d’arrangements à l'époque.
On sent comme un acharnement tous azimuts à couler notre flotte nationale. Dans l’intérêt de qui ? Au moment où les bateaux chinois, turcs et européens se pavanent dans nos côtes et pillent allègrement nos ressources, le ministère des pêches assiste, impassible, à la lente agonie de ce secteur vital.
Ahmed ould Cheikh
vendredi 13 septembre 2024
Editorial: Toujours bon chic bon genre, la DPG !
Ça y est ! Ould Djay, le nouveau PM, a sacrifié au rituel : la lecture d’une déclaration de politique générale de près d’une quarantaine de pages devant les députés. Une même litanie qui se répète depuis 1992 et la nomination de Sidi Mohamed Ould Boubacar, le premier Premier ministre de l’ère qui se prétendait – et se prétend toujours – démocratique. Un discours-fleuve qui s’apparente à une longue liste de promesses et donne généralement lieu à de violentes joutes verbales entre les députés de la majorité qui l’applaudissent à tout rompre et ceux de l’opposition qui le descendent en flamme. Et la tradition a été de nouveau respectée. Ould Djay a fait l’objet d’un feu nourri de la part de certains députés mais a laissé, impassible, passer l’orage, comptant sur une majorité automatique prête à avaler toutes les couleuvres. La DPG estdonc passée comme une lettre à la poste avec 140 pour et 25 contre. Le contraire aurait d’ailleurs étonné. A-t-on déjà vu une seule fois les députés de la majorité émettre la moindre critique, amender un projet de loi ou le rejeter ? La seule fois où ils osèrent élever la voix finit en pantalonnade. C’était lors de « La » décennie. Ils avaient à l’époque décidé de ne pas voter la loi de Finance s’ils n’obtenaient pas une augmentation de salaires. Furieux, Ould Abdel Aziz les avait alors menacésde dissolution et ils avaient tous accouru le soir même, voté la loi et étaient rentrés at home la queue entre les jambes. La bienséance, donc… Qu’attendre de plus de députés choisis on ne sait selon quels critères, d ont la compétence est loin d’être la qualité première, parfois élus « miraculeusement » et à qui l’on ne demande que de dire oui ?
Ahmed ould Cheikh
samedi 7 septembre 2024
Editorial: Mariez-vous!
« Jeunes de tout le pays, mariez-vous ! » Dans un élan de compassion avec les plus démunis dont il gardait jalousement le secret, notre patronat propose qu’aucune dot de mariage ne dépasse plus 5000 MRU. Dans le but, selon lui, de mettre cette union sacrée à la portée de tous et d’éviter en conséquence les manifestations ostentatoires de gaspillage. Une charte a même été édictée en ce sens. Pour joindre l’acte à la parole, le président de ce qui s’apparente à un club de nouveaux riches – pour ne pas dire « anciens pauvres », comme les surnomme l’humoriste franco-marocain Ghad El Maleh – a décidé de parrainer le mariage de cinquante couples et d’offrir à chacun un million MRO pour commencer leur nouvelle vie. Sans préciser sur quels critères seront-ils choisis, ni l’origine des fonds ni sous quel ‘’haut patronage’’ la célébration commune sera-t-elle organisée. Faut-il l’applaudir l’initiative, en rire ou en pleurer ? Le problème de notre jeunesse se résume donc, selon notre patronat éclairé, aux difficultés de se marier. Certes, à chacun ses soucis. Tout comme les problèmes du peuple se limitent, selon notre gouvernement, au ciment et au poulet.
Enfin, bref… Si l’on écarte l’effet d’annonce, que restera-t-il de ces mesures ? De la poudre aux yeux, très certainement. Le patronat devrait commencer par une « charte de vertu », en vertu de laquelle il ne trichera plus lorsqu’un de ses membres gagne un marché public ; fixer une marge bénéficiaire raisonnable pour les produits de première nécessité ; ne plus importer des médicaments et autres produits périmés ; payer les impôts en déclarant les vrais bilans de leurs entreprises, donner plus de chances aux jeunes lors des recrutements, etc. : la liste des manquements pénibles est extensible à l’infini. Charte du « patron-modèle » ? De quoi s’ériger alors en donneurs de leçons, ainsi qu’en avait donné l’exemple sa mouture du début des années 2000 alors sous la présidence de Mohamed Bouamatou, qui avait décidé de recruter quatre mille diplômés-chômeurs. Un succès notoire. Est-il ici nécessaire de souligner que c’est plutôt de ce genre d’initiatives dont on a besoin ?
Ahmed ould Cheikh
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